Des heurts opposant manifestants et policiers tunisiens ont repris, hier, à Ben Guerdane, près de la frontière libyenne, des violences nourries par les frustrations sociales en Tunisie qui fêtera lundi les deux ans de sa révolution dans un climat de tensions. Des dizaines de jeunes, excédés par leurs conditions de vie et le chômage, se sont rassemblés dans la matinée face au commissariat qu'ils avaient incendié jeudi et ont lancé des pierres en nombre sur les policiers qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène. Leurs slogans visent en particulier les islamistes d'Ennahda, le parti qui dirige le gouvernement et dont le siège dans la ville a aussi été saccagé et pillé cette semaine. Une réunion au siège de la délégation (sous-préfecture) de Ben Guerdane pour tenter de trouver une solution à la crise a échoué en milieu de journée, selon Amar Hamdi, le dirigeant de la branche locale de l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), principal syndicat du pays. Les autorités présentent les évènements comme un problème sécuritaire alors que nous réclamons des projets de développement, a-t-il dit, dénonçant le fait qu'aucun membre du gouvernement n'est venu à Ben Guerdane pour essayer de résoudre le problème. Les violences dans cette ville ont éclaté dimanche après une manifestation réclamant la réouverture de la frontière tuniso-libyenne, fermée depuis début décembre à l'initiative de la Libye et bloquant le commerce transfrontalier, une source de revenu importante pour la région. Le Premier ministre tunisien a obtenu après des négociations lundi à Tripoli la réouverture jeudi du point de passage voisin de Ras Jdir mais la contestation ne s'est pas pour autant essoufflée et les violences ont repris le soir même. Le commissariat, le siège de la douane, les locaux d'Ennahda ainsi qu'un marché ont été saccagés, alors que les jeunes manifestants réclament désormais des mesures de lutte contre le chômage et la misère. Les mouvements sociaux dégénérant en violences se sont multipliés ces derniers mois en Tunisie, compte tenu des espoirs socio-économiques déçus deux ans après la première des révolutions du printemps arabe. Le pays célèbrera lundi le deuxième anniversaire de la fuite du président déchu Zine El Abidine Ben Ali. Depuis le 14 janvier 2011, la Tunisie est sous le régime de l'état d'urgence.