Les cours du pétrole reculaient hier en Asie au lendemain de la signature d'un accord pour le sauvetage financier de Chypre qui n'a pas levé toutes les incertitudes quant à la vulnérabilité d'économies périphériques dans la zone euro. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en mai cédait neuf cents, à 94,72 dollars tandis que le baril de Brent de la mer du Nord à même échéance abandonnait 13 cents, à 108,04 dollars. Les détenteurs de comptes dans d'autres pays susceptibles de devoir faire appel à l'Europe pour éviter la faillite "se demandent si le plan de sauvetage de Chypre ne crée par un précédent", relève ainsi Ker Chung Yang, analyste chez Phillip Futures à Singapour. L'accord de principe conclu entre le président chypriote et les dirigeants de l'Union européenne (UE) et du Fonds monétaire international (FMI), puis avalisé par l'Eurogroupe, garantit à l'île un apport de 10 milliards d'euros moyennant de douloureux sacrifices pour les Chypriotes. Laïki Bank (Popular Bank en anglais), la deuxième banque du pays, va être mise en faillite de manière ordonnée et les titulaires de comptes dépassant 100 000 EUR auprès de la Bank of Cyprus vont subir une ponction de l'ordre de 30% de leurs avoirs. Jeroen Dijsselbloem a donc laissé entendre que ces mesures pourraient s'appliquer à d'autres pays à l'avenir mais il a ensuite fait machine arrière en affirmant que Chypre était un cas spécifique. "Les programmes d'ajustement macro-économique sont faits sur mesure en fonction de la situation du pays concerné et aucun modèle ou patron n'est utilisé", a souligné M. Dijsselbloem dans un court communiqué. Il n'empêche que le cas chypriote "a rendu beaucoup de gens nerveux", souligne l'analyste Jonathan Barratt de Barratt's Bulletin à Sydney. "La question est " à qui le tour? "", estime-t-il. La veille, les prix du pétrole ont terminé en nette hausse à New York, dans un marché rassuré par l'accord entre Chypre et ses bailleurs de fonds malgré des incertitudes sur l'impact de ce plan en zone euro, et stimulé par une reprise de la demande de brut aux Etats-Unis. Le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mai a gagné 1,10 dollar pour terminer à 94,81 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), son plus haut niveau depuis le 20 février. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai a terminé à 108,17 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), en hausse de 51 cents par rapport à la clôture de vendredi. Le plan conclu dans la nuit de dimanche à lundi pour éviter la faillite de Chypre et sa sortie de la zone euro a nourri l'appétit des investisseurs pour les actifs risqués comme le brut new-yorkais, faisant grimper le baril jusqu'à 95,65 dollars. Cet accord de principe conclu entre le président chypriote et les dirigeants de l'UE et du FMI, puis avalisé par l'Eurogroupe, garantit à l'île un apport de 10 milliards d'euros moyennant de douloureux sacrifices pour les Chypriotes. Les ramifications potentiellement négatives pour la demande en brut si la crise s'était étendue à d'autres économies de la zone euro, comme l'Italie ou l'Espagne, faisaient craindre le pire au marché, a souligné Matt Smith, de Schneider Electric. D'où le sentiment de soulagement, et le regain de vigueur des marchés aujourd'hui. Après la réaction initialement positive au plan, les cours ont cependant effacé une partie de leurs gains au fur et à mesure de la séance. Une fois que l'accord a commencé à être disséqué, on a réalisé que certains dépositaires allaient être durement touchés, a souligné Robert Yawger, de Mizuho Securities USA. Des déclarations du président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, indiquant que ce plan pourrait servir de modèle au reste de la zone euro, ont aussi participé à freiner l'avancée du marché, a ajouté l'analyste. Quand le chef de file des ministres des Finances de la zone euro a assuré que le plan de sauvetage de Chypre ne saurait servir de modèle au règlement d'autres problèmes à l'avenir, les cours se sont d'ailleurs repris. Le prix du WTI a aussi été soutenu par le regain d'activités de raffineries américaines après une période de maintenance, qui va faire monter la demande en brut ces prochains mois, selon l'analyste indépendant Andy Lipow. Même si le Brent a terminé en hausse, l'accès de faiblesse du pétrole coté à Londres observé en cours de séance a aussi profité au WTI, a noté l'expert. Le brut européen, qui pâtit déjà depuis plusieurs jours de l'abondance de l'offre en mer du Nord, est en effet soumis plus intensément aux déconvenues chypriotes, a-t-il noté. Les acteurs du marché ont par ailleurs digéré des déclarations du ministre saoudien du Pétrole, Ali al-Nouaïmi, qui a estimé qu'un baril de brut à 100 dollars était raisonnable, réitérant ainsi le niveau de prix cible du premier pays exportateur de pétrole du monde. Cela entretient la montée des cours du WTI car cela signifie que l'Arabie saoudite va se garder d'apporter plus de barils sur le marché tant que ce prix ne sera pas atteint, a remarqué John Kilduff, d'Again Capital.