En pleine préparation de l'intervention syrienne, Washington espère que Téhéran restera en dehors du conflit, après que le président iranien dit vouloir fournir une assistance alimentaire et médicale à la Syrie en cas de guerre, a écrit, hier, le quotidien " Nezavissimaïa gazeta ". Washington affirme pour sa part que les dirigeants iraniens veulent passer un accord avec les USA en échange de la levée des sanctions économiques contre Téhéran. On envisage même de demander à Téhéran qu'il persuade Damas de remettre l'arme chimique à Moscou. Mais les experts soulignent que l'Iran, au même titre que la Russie, continue d'apporter un soutien politique au régime syrien et de lui fournir divers renseignements. Comment réagirait l'Iran à une intervention américaine en Syrie ? Cette question fait l'objet de débats enflammés de l'autre côté de l'Atlantique. Pour trouver la réponse, les Américains ont analysé le discours du président iranien Hassan Rohani devant le conseil des experts : il a condamné les interventions militaires dans la région, notamment en Syrie, et a souligné que la sécurité restait une priorité pour Téhéran. Mais il n'a pas mentionné que l'Iran pourrait apporter son aide militaire au président syrien Bachar al-Assad. "Si quelque chose arrivait au peuple syrien, l'Iran lui enverrait de la nourriture et des médicaments", a déclaré le président Rohani. Auparavant, les congressistes américains craignaient qu'après l'attaque de la Syrie le Hezbollah, lié à l'Iran, s'en prenne aux sites américains et à Israël. Les déclarations des partisans de la politique intransigeante de l'establishment iranien confirment ces suppositions, affirme le " Washington Post ". Le général Hossein Salami, chef adjoint du Corps des gardiens de la révolution islamique, a déclaré que si la Syrie était attaquée, "la sécurité nationale des USA serait en danger". Et le chef de la milice de rue iranienne Basij, le brigadier Mohammad Reza Naghdi, a déclaré que les "invasions illégitimes pourraient provoquer des mesures de rétorsion plus larges contre les USA". Mais ces avertissements restent des paroles et le ton d'autres représentants des autorités montre que le soutien à Damas est loin d'être inconditionnel. Le ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a même reconnu que la situation désastreuse de la Syrie était aggravée par les "graves erreurs de son gouvernement". Certains commentateurs américains supposent même que l'Iran pourrait jouer le rôle d'intermédiaire pour empêcher la guerre. Il serait capable de pousser Assad à "transmettre les armes de destruction massive à un tiers, par exemple Moscou", écrit la revue " Time ". Officiellement, la position iranienne est identique à celle de la Russie. L'Iran annonce que la prochaine présidentielle syrienne se tiendra en 2014 et qu'il soutiendra tout dirigeant élu. Tel est l'aspect juridique de la politique iranienne. Du point de vue pratique, sa participation aux opérations serait insensée. Une délégation des représentants du secteur énergétique nucléaire iranien se trouve actuellement à Moscou. Ils gardent pour l'instant le silence, suivant certainement les directives des autorités. Selon le professeur orientaliste Vladimir Sajine, la réaction de l'Iran dépendra de l'ampleur de l'attaque contre la Syrie. Aujourd'hui, le gouvernement est dirigé par des hommes pragmatiques avec une "touche" de libéralisme, qui souhaitent améliorer les relations avec les USA et l'Europe occidentale pour faire lever les sanctions économiques qui pèsent sur le pays. C'est notamment pourquoi la rhétorique emphatique concernant Israël a cessé. Cependant, Téhéran ne fera pas de concessions en termes de principes et il pourrait quitter les négociations à six sur le programme nucléaire iranien pour réagir au début de la guerre.
Entretien Lavrov-Kerry La Syrie a été la veille au centre d'un entretien téléphonique entre le secrétaire d'Etat américain John Kerry et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, ont annoncé le ministère russe des Affaires étrangères et la porte-parole du Département d'Etat américain Jen Psaki. M.Lavrov a proposé de présenter les résultats de l'enquête internationale sur l'emploi présumé d'armes chimiques en Syrie lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU avant de prendre de nouvelles décisions concernant la Syrie, selon le ministère russe. "Il faut absolument que les conclusions d'experts sur l'usage présumé d'armes chimiques en Syrie soient soumises au Conseil de sécurité de l'ONU avant qu'il prenne une décision. Nous rejetons le recours à la force décidé en contournant ce mécanisme", a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères sur son site internet.
Des répercussions dans le monde entier Une opération armée contre la Syrie pourrait se répercuter dans le monde entier, y compris dans le Caucase, au Proche-Orient et en Asie centrale, estime le vice-ministre russe des Affaires étrangères Grigori Karassine. "Je ne pense pas que les effets négatifs possibles d'une action militaire non autorisée par l'ONU se limitent au Caucase. Je suis persuadé que des frappes contre la Syrie porteraient atteinte non seulement au Caucase, mais aussi au Proche-Orient et à l'Asie centrale. Des contrecoups se feraient également sentir dans le monde entier", a déclaré le vice-ministre dans une interview au journal en ligne Russia Direct. Selon le diplomate, ces effets négatifs "ne résulteront pas de la position adoptée par la Russie, la Chine, l'Iran et par certains pays arabes". M. Karassine a également fait savoir que la question syrienne était souvent évoquée dans les capitales européennes. "Les débats sur la Syrie à la Chambre britannique des Communes a montré que les parlementaires du Royaume-Uni n'avaient pas oublié les leçons de l'Irak. Ce que Tony Blair a fait il y a dix ans pourrait à peine passer aujourd'hui", a indiqué le diplomate. "Le monde en a tiré des conclusions", a résumé le vice-ministre.
L'aval d'une opération par le Congrès US serait illégitime Une opération militaire en Syrie ne peut dépendre du Congrès américain, dont l'aval serait illégitime, a estimé à Saint-Pétersbourg Sergueï Ivanov, chef de l'administration du président russe. "Même si le Congrès vote pour l'usage de la force militaire (contre la Syrie, ndlr), cette décision sera illégitime en tout état de cause", a déclaré M.Ivanov devant les journalistes.
La plupart des dirigeants du G20 hostiles à une intervention La plupart des chefs d'Etat du G20 réunis à Saint-Pétersbourg sont hostiles à une intervention militaire en Syrie, a annoncé à Strelna, une banlieue de Saint-Pétersbourg, le chef de l'administration présidentielle russe Sergueï Ivanov. "La plupart d'entre eux se prononcent pour un règlement du problème syrien par la voie pacifique", a indiqué M. Ivanov devant les journalistes qui couvrent le sommet du G20. Selon lui, le sommet du G20 de Saint-Pétersbourg est une bonne occasion d'examiner la situation en Syrie.
Pékin refuse la "guerre" La Chine est persuadée que le conflit syrien n'a pas de solution militaire, et qu'une solution politique est la seule voie possible pour désamorcer la crise en Syrie, a indiqué à Saint-Pétersbourg le porte-parole de la diplomatie chinoise Qin Gang. "La guerre n'est pas un moyen de régler le conflit en Syrie, la voie politique est la seule possible", a déclaré M. Qin au premier jour du sommet duG20 de Saint-Pétersbourg. Et d'ajouter que l'ONU devrait étudier les données sur l'usage d'armes chimiques et seulement sur la base de cette enquête, faire des démarches ultérieures. "Nous estimons que toute action doit reposer sur les résultats de l'enquête (sur l'usage d'armes chimiques en Syrie, ndlr), et que les décisions doivent être adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies. Toute démarche appelée à contourner le Conseil de sécurité peut avoir de sérieuses conséquences et déboucher sur une tragédie humanitaire encore plus grave", a averti le diplomate.
Toute la Méditerranée en pâtirait Une opération militaire envisagée par les Etats-Unis en Syrie infligerait un dommage énorme à toute la région de la Méditerranée, a prévenu le vice-ministre russe de la Défense Anatoli Antonov. "Une action militaire prévue par les Etats-Unis en Syrie ne manquerait pas d'infliger un sérieux dommage économique, politique et écologique à l'ensemble de la Méditerranée", a déclaré M. Antonov devant les journalistes. Et d'expliquer qu'il s'agissait d'une zone balnéaire où une multitude de personnes passaient leurs vacances et où la concentration de navires civils était immense. "Pendant ce temps (temps de l'opération militaire), la navigation y serait pratiquement fermée, tous craignant qu'un missile ne frappe un bateau civil. Et je ne peux même imaginer ce qui pourrait arriver si un missile touchait, par exemple, un bâtiment de guerre russe", a ajouté le vice-ministre.
Le ministre syrien des AE bientôt à Moscou Le ministre syrien des Affaires étrangères Wallid al-Moualem se rendra à Moscou le 9 septembre pour rencontrer son homologue russe Sergueï Lavrov, selon un communiqué de la diplomatie russe rendu public. "Des entretiens entre les chefs de la diplomatie sont fixés au 9 septembre et porteront sur tous les aspects de la situation en Syrie et autour d'elle", indique le document publié sur le site du ministère russe des Affaires étrangères. Moscou ne cesse d'insister sur la nécessité de mettre fin sans tarder aux violences et aux souffrances de la population syrienne et de rechercher une solution politique à la crise en rejetant toutes tentatives d'une intervention militaire sans l'aval de l'ONU, est-il dit dans le document.
Moscou saisira l'AIEA sur les risques nucléaires La Russie évoquera les risques nucléaires liés à une possible frappe américaine contre la Syrie lors de la prochaine session du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), a déclaré le ministère russe des Affaires étrangères. "La Russie évoquera ce sujet dans le cadre de la session du Conseil des gouverneurs de l'AIEA qui débutera le 9 septembre prochain", a fait savoir le ministère. Auparavant, le porte-parole de la diplomatie russe Alexandre Loukachevitch a indiqué qu'une intervention militaire occidentale en Syrie constituait une menace pour la sécurité nucléaire de la région. Par la suite, Moscou a appelé le secrétariat de l'Agence à présenter une analyse des risques liés aux possibles frappes américaines contre le territoire syrien.
Brahimi à Saint-Pétersbourg pour promouvoir Genève-2 L'émissaire international pour la Syrie Lakhdar Brahimi s'est rendu au sommet du G20 à Saint-Pétersbourg pour accélérer la tenue de la conférence dite Genève-2, a fait savoir un porte-parole des Nations unies. La crise syrienne figure parmi les principaux sujets du sommet pétersbourgeois qui s'est déroulé hier et la veille sur fond de débats du Congrès américain sur une possible opération militaire contre les forces fidèles au gouvernement de Damas. La conférence internationale sur la Syrie, baptisée Genève 2, devrait réunir à une même table des responsables du régime syrien et de l'opposition pour tenter de trouver une solution politique négociée entre Damas et la rébellion. La situation en Syrie s'est aggravée le 21 août, date à laquelle certains médias hostiles au président Bachar el-Assad ont fait état de l'attaque chimique lancée par les troupes gouvernementales dans une banlieue de Damas. Selon les rebelles, cette attaque présumée pourrait avoir fait 1 300 morts. Des pays occidentaux, dont les Etats-Unis et la France, ont profité de cette information non confirmée pour appeler ouvertement à une intervention militaire en Syrie sans l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU.