Le ministre des Finances Michel Sapin a réaffirmé la prévision de croissance de 1% du gouvernement français pour 2014, un objectif mis en doute le même jour par le Haut conseil des Finances publiques. "La prévision de 1% peut parfaitement être atteinte grâce à (...) deux moteurs qui s'allument", a estimé M. Sapin lors d'une conférence de presse, en référence au pacte de responsabilité qui prévoit des aides à la compétitivité des entreprises, et à la politique offensive de la Banque centrale européenne. Le Haut conseil des Finances publiques a lui jugé mercredi "moins probable" d'arriver à ce chiffre au vu des derniers indicateurs. "Avec une croissance nulle au 1er trimestre et un acquis de croissance de 0,3%, la prévision de croissance de 1,0% pour l'année 2014 suppose une forte accélération de l'activité à partir du 2e trimestre. Cette accélération n'apparaÎt pas dans les indicateurs conjoncturels, ce qui rend l'atteinte de l'objectif de croissance en 2014 moins probable", écrit le Haut conseil, organisme indépendant consultatif associé à la Cour des comptes. Par acquis de croissance, il entend la croissance qui serait observée sur l'ensemble de l'année si l'activité restait au niveau du 1er trimestre. Cet acquis dépend non seulement de la croissance constatée au 1er trimestre, mais également aux trois trimestres précédents. "Sans être hors d'atteinte, la prévision de croissance du gouvernement pour 2014 paraÎt désormais élevée", résume l'avis. "La reprise de l'économie mondiale, qui joue un rôle essentiel dans le scénario du gouvernement, est plus lente qu'escompté", ajoute le Haut conseil. "En revanche, l'assouplissement supplémentaire de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, annoncé le 5 juin, pourrait contribuer progressivement à l'amélioration de l'activité", précise-t-il dans cet avis relatif aux projets de lois de finances rectificatives et de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 présentés mercredi en conseil des ministres. Le Haut conseil critique par ailleurs la prévision d'inflation de 1,2% en moyenne sur l'année 2014 maintenue par le gouvernement, qu'il considère comme "manifestement élevée au vu de celle constatée depuis l'automne 2013 (0,7% en glissement annuel en moyenne) et des anticipations des chefs d'entreprise sur l'évolution de leurs prix de vente".
Déficit à 3,8% du PIB Les créations d'emplois marchands et donc l'évolution de la masse salariale aussi "paraissent surestimées" dans les prévisions du gouvernement. Le déficit public (Etat, Sécurité sociale et collectivités territoriales) prévu fin 2014 est dorénavant de 3,8% du produit intérieur brut (PIB) contre un taux de 3,6% prévu lors de la préparation du budget 2014 en septembre. La France s'est engagée vis-à-vis de ses partenaires européens à faire reculer ce chiffre à 3% fin 2015. Mais "une croissance inférieure à celle prévue par le gouvernement se traduirait par un déficit effectif plus important" à la fin de l'année, souligne le Haut conseil. Quant au déficit structurel (calculé hors effets de la conjoncture) prévu pour fin 2014, il se dégrade de 0,6 point par rapport à l'estimation de septembre, pour atteindre 2,3% du PIB. Pour le Haut conseil, ce fait "résulte principalement du non-respect des objectifs de solde structurel des années 2012 et 2013". De plus, dans l'ajustement structurel en 2014, "la révision à la baisse de la croissance des recettes et de certaines mesures nouvelles en prélèvements obligatoires n'est (...) pas compensée par des économies suffisantes sur les dépenses". Et le déficit structurel risque selon l'organisme d'être aggravé. Les recettes fiscales pour 2014 sont "encore surestimées", explique-t-il. De plus, les prélèvements sociaux "pourraient pâtir d'une croissance moins dynamique de la masse salariale". Enfin, le ralentissement des dépenses de personnel des collectivités locales et de prestations sociales versées par elles "est loin d'être acquis", avertit le Haut conseil. "Tout en reposant désormais sur des hypothèses de finances publiques plus réalistes qu'au stade du projet de loi de finances, le déficit structurel pour 2014 risque néanmoins d'être supérieur à la prévision de 2,3% du PIB", estime le Haut conseil.