Des diplomates, notamment d'Arabie saoudite, ont continué à quitter la capitale du Yémen, un pays de plus en plus isolé au fur et à mesure que la puissante milice chiite des Houthis renforce son pouvoir à Sanaa. S'exprimant jeudi devant le Conseil de sécurité, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé à tout faire pour aider le Yémen à éviter le précipice, un pays à majorité sunnite connu jusqu'à il y a quelques mois pour son combat contre Al-Qaïda, pour lequel il recevait l'appui des Etats-Unis. L'Arabie saoudite, voisine du Yémen, est le premier pays arabe à annoncer l'évacuation de son ambassade, après des décisions similaires cette semaine des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni. En raison de la situation politique et de la détérioration de la sécurité dans la capitale yéménite, l'Arabie saoudite a suspendu toutes les activités de son ambassade et évacué son personnel diplomatique, a indiqué le ministère saoudien des Affaires étrangères. Le royaume saoudien, poids lourd du Conseil de coopération du Golfe, avait dénoncé samedi, comme les cinq autres monarchies du CCG, un coup d'Etat des miliciens chiites, dit Houthis, qui avaient dissous la veille le Parlement et mis en place un Conseil présidentiel en guise d'exécutif. Les chefs de diplomatie des monarchies pétrolières doivent se réunir samedi à Ryad pour discuter de la crise au Yémen. L'Allemagne et l'Italie ont annoncé vendredi des mesures similaires et rapatrié du personnel, Berlin invoquant un niveau de dangerosité totalement inacceptable pour son personnel et Rome arguant de l'aggravation progressive des conditions de sécurité.
'Effondrement' Nous ne pouvons pas nous contenter d'assister impuissants à l'effondrement du Yémen, a déclaré M. Ban. Il a souligné les défis auxquels fait face le Yémen dont une crise politique dangereuse, des tensions sécessionnistes croissantes dans le Sud et une grave crise humanitaire qui touche désormais 16 millions de personnes. Autant de défis qui constituent selon lui une menace pour la sécurité régionale et internationale. M. Ban a en outre appelé à tout faire pour aider le Yémen à restaurer le processus politique, en référence au processus engagé après le départ de l'ancien président Abdallah Saleh, poussé en 2012 par une révolte populaire. Le Yémen est à la croisée des chemins: soit il plonge dans la guerre civile, soit il trouve un moyen de remettre la transition sur ses rails, a affirmé de son côté l'émissaire de l'ONU au Yémen, Jamal Benomar, qui s'efforce de relancer des négociations après la prise du pouvoir par les Houthis. Dans une vidéo conférence depuis Sanaa, il a évoqué les risques d'une nouvelle sécession du Sud et d'une résurgence d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique(Aqpa), un groupe né de la fusion des branches saoudienne et yéménite d'Al-Qaïda, et considéré par Washington comme le bras le plus dangereux du réseau extrémiste. Aqpa s'en prend régulièrement aux forces de l'ordre, comme vendredi quand des membres présumés du groupe ont tué un pilote de l'armée dans le sud du pays, selon un responsable gouvernemental local. Mais le groupe sunnite radical a également dans le collimateur les Houtis. Des combats ont eu lieu vendredi dans plusieurs quartiers de Baïda (centre) où la milice chiite est entrée mardi, entre Houtis d'un côté et hommes de tribus et membres présumés d'Al-Qaïda de l'autre, faisant quatre morts, selon des sources gouvernementales locales. Les Houtis ont mené des raids dans des maisons et arrêté des habitants qu'ils ont accusé de liens avec Al-Qaïda, selon ces mêmes sources. Jeudi, Al-Qaïda avait frappé fort en s'emparant d'un camp militaire et d'importantes quantités d'armes dans un secteur à l'est de la capitale. Vingt-sept personnes ont été tuées dans les combats, selon un dernier bilan d'un responsable militaire. Le Yémen est plongé dans le chaos depuis la montée en puissance de la milice chiite qui est entrée en septembre à Sanaa et s'est emparée fin janvier des bâtiments officiels, poussant à la démission les chefs de l'Etat et du gouvernement, avant de mettre en place le 6 février de nouvelles instances dirigeantes. Des manifestations ont régulièrement lieu dans la capitale et dans d'autres villes contre leur mainmise sur le pays.
Les Emirats se joignent au mouvement Les ambassades continuent de suspendre leurs activités à Sanaa, en raison du chaos régnant dans la capitale yéménite. Dernier pays en date: les Emirats arabes unis ont évacué leurs diplomates. L'annonce a été faite hier matin par le ministère des Affaires étrangères à Abou Dhabi. "Les Emirats ont suspendu les activités de leur ambassade à Sanaa et rapatrié tous leurs diplomates", a indiqué un communiqué du ministère cité par l'agence officielle Wam qui justifie cette décision par "la détérioration de la situation politique et sécuritaire" dans la capitale yéménite. Les Emirats sont le second pays arabe à prendre pareille mesure après l'Arabie saoudite.
Combats dans le sud Alors que la communauté internationale déserte le Yémen, les affrontements entre houthis et membres de tribus sunnites liées à Al-Qaïda ont fait 26 morts ces dernières heures, selon des responsables locaux. D'intenses combats, qui ont fait 16 tués parmi les houthis et dix parmi les sunnites, se poursuivaient d'ailleurs samedi dans la province montagneuse d'Al Baïda dans le sud du pays.