La fébrilité devrait rester de mise la semaine prochaine à la Bourse de Paris, avec de nombreux facteurs d'incertitudes à l'horizon, entre des chiffres de croissance chinois et une réunion de la Banque centrale européenne. La Chine ouvrira le bal lundi avec sa croissance au 3e trimestre, ses ventes de détail et sa production industrielle en septembre, des statistiques forcément très scrutées par des investisseurs inquiets d'un atterrissage brutal de la deuxième économie mondiale. "Les places européennes restent dominées par l'incertitude sur les marchés émergents en général et chinois en particulier", observe Jean-Luc Eyssautier, spécialiste des actions européennes au sein de la société de gestion suisse UBP. "Ces chiffres chinois risquent d'alimenter la volatilité en début de semaine, car globalement tant que la crainte d'un atterrissage brutal en Chine ne se sera pas dissipée nous n'aurons pas de retour au calme sur les marchés occidentaux", estime également Jean-Louis Mourier, un économiste du courtier Aurel BGC. "La réunion de la BCE jeudi prochain représente également un peu une zone de danger, car du fait des discours ultra-accommodants tenus par certains de ses responsables, certains investisseurs attendent de nouvelles annonces", poursuit-il. "Or il faudrait d'abord démontrer que ce qu'ils ont déjà fait est efficace. Notre conclusion est donc qu'il ne faut pas s'attendre à grand chose, mais plus l'espoir est grand, plus la déception risque de l'être aussi", développe-t-il. La semaine se terminera pas des indicateurs de premier plan en Europe et aux Etats-Unis avec les premiers chiffres d'activités pour octobre (PMI). Cette actualité macroéconomique se conjuguera en outre à des publications d'entreprises soutenues des deux côtés de l'Atlantique.
Bons bénéfices par action en perspective Au milieu de tout cela, "le marché va rester dans un mode assez erratique" pour M. Mourier. Au cours de la semaine écoulée, le marché parisien a néanmoins réussi à faire fi des inquiétudes sur la Chine ou des interrogations sur le calendrier d'une éventuelle remontée des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine. "Les premières publications d'entreprises n'ont pas forcément été bien orientées non plus", selon M. Mourier, mais "le rebond a été largement liée à des anticipations de politique monétaire accommodantes" avec des "éléments qui poussent plutôt la Fed à attendre et les déclarations notamment d'Ewald Nowotny", responsable de la BCE qui allaient dans le sens de mesures supplémentaires. L'indice CAC 40 a pris 0,03% sur la semaine, pour terminer vendredi à 4.702,79 points. Ses gains depuis le 1er janvier s'établissent à 10,06%. "C'est un marché dans lequel il est difficile pour un investisseur de s'orienter, tant les annonces sont nombreuses et contradictoires", note M. Eyssautier qui reste néanmoins positif. "Il y a très peu de points d'ancrage, mais parallèlement il y a de bonnes nouvelles en provenance d'Europe qui bénéficie du triple stimulus du programme de soutien monétaire de la BCE, d'un euro et d'un pétrole faible", complète-t-il. Si "la nervosité sur les marchés s'est renforcée au cours des derniers mois, particulièrement en août et en septembre", la tendance "de progression des bénéfices en Europe semble toujours bien ancrée" et "les valorisations sont bien plus favorables qu?elles ne l?étaient en début d?année", juge également Tim Stevenson, directeur Actions Europe chez Henderson Global Investors. "Clairement l'Europe présente aujourd'hui un niveau assez intéressant en terme de valorisation avec un consensus qui prévoit que la croissance des bénéfices par action augmente de 9% hors énergie", analyse M. Eyssautier. Et de noter: "en 2015 pour la première fois depuis 2008, les bénéfices par action en zone euro pourraient être supérieurs à ceux des Etats-Unis".
Wall Street suspendue aux résultats pour affiner sa perception de l'économie La Bourse de New York va se fonder la semaine prochaine sur les résultats d'entreprise pour évaluer la santé de l'économie américaine et trouver une direction, après trois semaines consécutives de hausse. Lors des cinq dernières séances, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a pris 0,77% à 17.215,97 points, et le Nasdaq, à dominante technologique, 1,16% à 4.886,69 points. L'indice élargi S&P 500, jugé le plus représentatif pour de nombreux investisseurs, a gagné 0,90% à 2.033,11 points. Le rythme de l'ascension des indices s'est toutefois nettement ralenti par rapport à la semaine précédente, les investisseurs semblant pris de doute en milieu de semaine devant des indicateurs médiocres et des annonces défavorables du géant de la distribution Wal-Mart, qui a revu en baisse sa prévision de ventes annuelles. Globalement, depuis le début de la saison des résultats, "on a vu des annonces positives, d'autres ont été mauvaises, c'est difficile de dire" globalement comment s'est passé l'été des entreprises, a commenté Tom Cahill, de Ventura Wealth Management. "Les chiffres de (la banque) Goldman Sachs ont déçu, ceux (du conglomérat) de General Electric étaient très bons", a précisé Hugh Johnson, de Hugh Johnson Advisors. Mais en tout état de cause, "ce qui compte le plus c'est les prévisions, qui ont été comme d'habitude très prudentes". "C'est pour cela que les investisseurs sont restés hésitants", et pourraient le rester la semaine prochaine, a-t-il ajouté. D'autant que "le marché n'est plus sous-évalué", si bien que, pour qu'il avance encore, "il va falloir avoir de très très bonnes nouvelles, avec des prévisions bien meilleures que ce que nous avons jusqu'à présent", a précisé M. Johnson. "Nous avons eu des résultats mitigés, mais qui ne donnent pas une lecture fiable de l'économie", a relativisé pour sa part Gregori Volokhine, chez Meeschaert, refusant de s'inquiéter devant les difficultés rencontrées dans le courtage par les banques Goldman Sachs et JPMorgan Chase, ou celles de Wal-Mart, "un dinosaure" mal adapté aux nouvelles habitudes de consommation.
Poids lourds en rafale La semaine prochaine quelque 125 entreprises du S&P 500 doivent publier leurs résultats trimestriels, parmi lesquelles des poids lourds membres du Dow Jones comme IBM (lundi), United Technologies et Verizon (mardi), Boeing, Coca-Cola et American Express (mercredi), Caterpillar etMicrosoft (jeudi) ou encore Procter & Gamble (vendredi). Parmi celles qui seront suivies de plus près, Amazon, jeudi soir: "ce sera à Amazon de prouver que la consommation se tient bien aux Etats-Unis", a souligné M. Volokhine. M. Cahill a aussi estimé que, si les ventes du géant de la distribution en ligne se portent bien, "alors cela réduira un peu l'inquiétude suscitée (ces derniers jours) par les ventes de détail" en faible progression en septembre, ainsi que l'analyse d'une croissance américaine très molle, fournie par la Réserve fédérale. Google doit publier ses résultats le même jour, et ce sera à lui "de prouver que les nouvelles technologies continuent à fortement progresser", a ajouté M. Volokhine. Enfin, le marché pourrait également être tributaire des statistiques chinoises, ayant bénéficié ces dernières séances de la reprise des Bourses de la deuxième économie mondiale. Les autorités chinoises doivent notamment publier lundi les chiffres de la croissance du troisième trimestre ainsi que ceux de la production industrielle de septembre. "Si cela entraîne une chute des marchés (chinois), cela pèsera sur le marché d'actions américains", a souligné M. Cahill. A l'inverse, "si le marché est en mesure de digérer ces chiffres et qu'on évite une dégringolade, alors je crois que l'argent reviendra encore plus sur les marchés financiers", a prédit M. Cahill. Du côté des statistiques américaines, l'impact des mises en chantier de logements, qui seront annoncées mardi, ou des reventes de logement (jeudi) devrait être plus modéré, même si, comme l'a souligné M. Johnson, "cela sera important pour les investisseurs de voir que le secteur du logement, l'un des plus encourageants aux Etats-Unis, continue à rester solide".