Le président chinois Xi Jinping a pressé hier, lors d'un entretien téléphonique, son homologue américain Donald Trump d'éviter "les mots et les actes" qui pourraient "exacerber" les tensions déjà fortes dans la péninsule coréenne. Au cours d'une communication téléphonique samedi matin (heure locale, vendredi soir heure américaine), M. Xi a appelé les parties à la "retenue" et à "persister dans la direction générale du dialogue, des négociations et d'un règlement politique", a indiqué la télévision d'Etat chinoise CCTV. De son côté, la Maison-Blanche a publié un communiqué selon lequel les deux leaders appellent la Corée du Nord à "cesser son comportement provocateur et porté à l'escalade" et réitèrent "leur engagement mutuel envers une dénucléarisation de la péninsule coréenne". Cet entretien téléphonique intervient après plusieurs jours de surenchère sans précédent entre Washington et Pyongyang. Vendredi, le président Trump avait assuré que l'option militaire était désormais "prête à l'emploi". Depuis son golf de Bedminster, près de New York, où il passe ses vacances, M. Trump s'est également entretenu avec le gouverneur de Guam Eddie Calvo, à qui il a "assuré" que "les forces américaines étaient prêtes à garantir la sûreté et la sécurité de la population de Guam, comme celle de l'ensemble des Etats-Unis", a indiqué la Maison-Blanche dans un communiqué. La Corée du Nord a annoncé qu'elle projetait de lancer des missiles à proximité de cette île américaine du Pacifique. L'armée nord-coréenne, citée par l'agence de presse officielle KCNA, a fait état jeudi de ce projet consistant à lancer quatre missiles qui survoleraient le territoire japonais avant d'aller s'abattre en mer "à 30 ou 40 kilomètres de Guam". En réponse, le Japon a commencé samedi à déployer son système de défense antimissile Patriot, après les menaces de Pyongyang.
"Le feu et la colère" Mardi, Donald Trump avait affirmé que la Corée du Nord se heurterait "au feu et à la colère" des Etats-Unis si jamais les menaces de Pyongyang continuaient. Vendredi, il avait estimé que ces paroles n'étaient "peut-être pas assez dures". La Chine, principal partenaire économique de la Corée du Nord, joue un rôle crucial pour l'efficacité des sanctions économiques prises contre Pyongyang pour l'obliger à freiner ses programmes nucléaire et balistique. Mais Pékin, dont la marge de manœuvre est étroite, était jusqu'alors restée en retrait, renvoyant volontiers dos à dos les deux pays. Lors de l'entretien téléphonique, M. Trump a assuré, selon la télévision chinoise, que "pour le moment, les relations américano-chinoises étaient sur la bonne voie". "Je pense qu'elles peuvent être encore meilleures", a-t-il dit selon la même source. Washington a appelé à plusieurs reprises Pékin à faire davantage contre son allié nord-coréen. Avant cette discussion entre les deux chefs d'Etat, aucun signe d'apaisement n'était perceptible. Or les prochains exercices militaires conjoints entre Séoul et Washington, durant lesquels les tensions sur la péninsule coréenne tendent à s'aggraver, commencent prochainement, autour du 21 août. La Chine a proposé à plusieurs reprises un double "moratoire": l'arrêt simultané des essais nucléaires et balistiques nord-coréens et des manoeuvres militaires conjointes de Washington et Séoul. Cette montée des tensions entre les Etats-Unis et la Corée du Nord pèse sur les marchés financiers et inquiète de nombreux dirigeants mondiaux.
Moscou "très inquiet" A Moscou, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov s'est dit vendredi "très inquiet" des risques de conflit "très élevés" entre Etats-Unis et Corée du Nord. "Il est clairement temps pour toutes les parties de se concentrer sur les moyens de faire baisser les tensions", a renchéri Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres. "Je ne vois pas de solution militaire à ce conflit (...) Je considère l'escalade verbale comme une mauvaise réponse", a mis en garde vendredi la chancelière allemande Angela Merkel. Un responsable de la Maison-Blanche a indiqué qu'il ne fallait pas voir dans les propos du président le signe d'une action militaire imminente. "Il y a des plans militaires pour à peu près toutes les crises du globe (...) Ces plans sont continuellement mis à jour et présentent des options au président. Il n'y a rien de nouveau", a-t-il dit sous couvert d'anonymat. Le président américain a promis vendredi une "grande conférence de presse" lundi à Washington, sans autres précisions. L'armée nord-coréenne doit présenter au jeune dirigeant un plan d'offensive contre Guam d'ici mi-août, selon des militaires nord-coréens. Le Pentagone dispose actuellement de 28.500 soldats au sud du 38e parallèle. Pour protéger le terrain des missiles à moyenne portée de Kim Jong-Un, les Etats-Unis ont déployé un bouclier anti-missiles, le THAAD, qui peut intercepter les lanceurs à haute altitude. Selon les analystes, des tirs vers Guam placeraient Washington dans une position délicate: si les Etats-Unis ne tentaient pas de les intercepter, leur crédibilité en prendrait un coup et Pyongyang se sentirait pousser des ailes pour mener un test de missile intercontinental (ICBM) grandeur nature. Le site 38 North, qui fait autorité sur la Corée du Nord, affirme en outre que des images par satellite suggèrent que la Corée du Nord pourrait préparer de nouveaux tests de missiles balistiques sous-marins.