Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a vivement dénoncé mardi la détérioration des conditions de détention des migrants en Libye, jugeant "inhumaine" la coopération de l'Union européenne avec ce pays. "La communauté internationale ne peut pas continuer à fermer les yeux sur les horreurs inimaginables endurées par les migrants en Libye, et prétendre que la situation ne peut être réglée qu'en améliorant les conditions de détention", a déclaré M. Zeid dans un communiqué, affirmant que "la politique de l'UE consistant à aider les gardes-côtes libyens à intercepter et renvoyer les migrants (est) inhumaine". "La souffrance des migrants détenus en Libye est un outrage à la conscience de l'humanité", a-t-il ajouté, estimant que la situation était devenue "catastrophique". Cet appel intervient alors que le groupe de contact sur la route migratoire en Méditerranée centrale --réunissant 13 pays européens et africains dont la Libye-- a décidé lundi, lors d'une réunion à Berne en Suisse, d'améliorer les conditions des migrants dans les centres de détention en Libye tout en promouvant des alternatives à cette solution. Dans son communiqué, le Haut-Commissaire dénonce l'aide fournie par l'UE et l'Italie aux gardes-côtes libyens pour arrêter les migrants en mer, "malgré les inquiétudes exprimées par les groupes de défense des droits de l'homme" sur le sort des migrants. "Les interventions croissantes de l'UE et de ses Etats membres n'ont jusqu'à présent pas servi à réduire le nombre d'abus subis par les migrants", fait valoir M. Zeid. "Notre système de surveillance montre en fait une détérioration rapide de leur situation en Libye", relève-t-il, précisant que des "observateurs des droits de l'homme" s'étaient rendus, du 1er au 6 novembre, à Tripoli pour visiter des centres de détention et s'entretenir avec les migrants détenus. "Les observateurs ont été choqués par ce qu'ils ont vu: des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants émaciés et traumatisés, empilés les uns sur les autres, enfermés dans des hangars (...) et dépouillés de leur dignité", explique-t-il.
Des promesses pour aider les migrants D'autre part, les ministres européens et africains du groupe de contact sur la Méditerranée centrale ont promis de travailler à l'amélioration des conditions de vie des migrants qui passent par la Libye pour tenter d'atteindre l'Europe, à l'issue d'une réunion qui s'est tenue lundi en Suisse. Les ministres de l'Intérieur et de la Justice ont aussi promis de créer des alternatives au trafic humain, avec des projets pilotes pour que les Africains puissent atteindre l'Europe de façon légale, notamment grâce à des bourses d'étude et à l'apprentissage. Le trajet très dangereux à travers le désert entre l'Afrique sub-saharienne et l'Italie via la Libye est devenu la principale voie migratoire vers l'Europe après la fermeture par la Turquie de l'autre grande route qui passait par la Grèce et par laquelle près d'un million de personnes sont entrées dans l'Union européenne en 2015. Depuis le début de l'année, près de 115.000 migrants ont atteint les côtes italiennes et près de 2.750 sont morts en tentant la traversée, a indiqué vendredi l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le nombre de personnes mortes dans le désert du Sahara serait deux fois plus élevé. Européens et Africains sont d'accord pour dire que, si le nombre de migrants qui parviennent dans l'UE est en baisse depuis quelques mois, c'est grâce au renforcement de la lutte contre les passeurs. Mais, de ce fait aussi, plusieurs dizaines de milliers de migrants se retrouvent coincés en Libye et y sont souvent détenus dans les conditions qualifiées de dangereuses et d'inhumaines par les organisations de défense des droits de l'Homme. Les discussions de lundi ont porté sur les mesures à prendre pour lutter contre les passeurs et le trafic d'être humains, mais le communiqué final évoque surtout les efforts à faire pour alléger les difficultés du voyage pour les migrants.