Abdelhak, un retraité de 66 ans, entra à la poste de Réghaïa et son premier souci fut de trouver un mur contre lequel il s'appuierait parce que le petit trajet qu'il avait effectué pour venir de la maison jusque-là l'avait exténué. Abdelhak, un retraité de 66 ans, entra à la poste de Réghaïa et son premier souci fut de trouver un mur contre lequel il s'appuierait parce que le petit trajet qu'il avait effectué pour venir de la maison jusque-là l'avait exténué. Il enfonça sa main sénile à l'intérieur de sa vieille veste et en sortit un chèque qu'il avait pris soin de placer entre les pages d'un livre pour ne pas le froisser. Ce n'est qu'à ce moment là qu'il leva la tête et qu'il s'aperçut qu'il y avait une grande foule devant le guichet des retraites. Et il ne pouvait pas espérer passer avant les autres parce qu'ils avaient tous l'air plus âgé que lui. Au moment où il allait remplir son chèque, il se frappa le front. Il regarda encore autour de lui et il vit arriver un jeune homme portant veste et cravate. - Tu as besoin de quelque chose, mon père ? - Oui, je dois retirer de l'argent et je cherche quelqu'un pour remplir mon chèque… L'homme regarda le livre que le vieil homme tenait à la main et sourit : - Qu'est-ce que je vois là ? Tu lis des livres et tu ne sais pas remplir un chèque ? - Non… ce livre n'est pas à moi mais à mon petit-fils. Je n'ai jamais su lire ni écrire. Je suis un peu hors de moi parce que j'ai oublié mes lunettes pour voir de près. C'est pour tout à l'heure quand je signerai le chèque. - Hum…je comprends…mais tu n'as pas besoin de bien voir. Je suis là, je sais que le chèque t'appartiens, je travaille ici à la poste… - Ah ! Mais, c'est formidable… Tu peux me remplir alors mon chèque ? - Mais avec plaisir, mon brave, père. Tu as ton chéquier ? - Non, j'ai juste un chèque… - Je vais te le remplir mais il faut toujours venir avec son chéquier à la poste ; une erreur est toujours possible. Tu vas retourner chez toi pour ramener un autre ? - C'est juste mon fils… la prochaine fois, je ramènerai mon chéquier. - Tu as ta carte d'identité sur toi ? - Oui, bien sûr... - Et tu as de l'argent dans ton compte ? - Oui…j'ai fait hier une demande d'avoir… j'ai 11.000 DA, mais je ne vais tirer que 10.000 DA. Il faut toujours laisser une petite somme dans le compte sinon, on risque de me le fermer… - Qui a dit ça ? - L'employé qui m'a ouvert le compte, il y a quelques années. - Ce n'est pas vrai…Enfin, ce n'est pas un problème. Donne-moi ta carte d'identité et ton chèque, je m'occupe de tout, mais il faut attendre un peu…parce qu'il y a du monde. Et puis, il faut espérer qu'il y aura encore des liquidités quand ton tour arrivera. - Ah ! C'est vrai…depuis quelques jours, il y a des problèmes. Des gens ont fait la chaîne et quand ils sont arrivés devant la caisse on leur a dit qu'il n'y avait plus d'argent. - C'est vrai… Le problème n'est toujours pas réglé… Mais rassure-toi, mon père, je m'arrangerai pour que tu sois payé même s'il n'y a plus d'argent…parce qu'il y a toujours un petit fonds de secours en cas d'extrême urgence… - Ah ! Oui ? C'est bon à savoir ça ! - Mais, attention, il ne faut pas le répéter… - Oh ! Merci, mon fils, merci ! Que Dieu t'octroie tout ce que tu désires ! L'homme remplit le chèque tout en ayant sous les yeux la carte d'identité du vieil homme. Une fois qu'il avait fini de le remplir, il demanda au vieil homme de le signer comme il en avait l'habitude et celui-ci griffonna deux lettres qui ressemblaient vaguement à un « D » et à « A » : les initiales du vieil homme. - Très bien, maintenant tu n'as qu'à t'asseoir quelque part ; le guichetier va t'appeler dès que ton chèque arrivera entre ses mains. Le jeune homme s'éloigna et le vieil homme le suivit du regard. Il le vit s'approcher du guichet et poser le chèque et la carte d'identité sous une pile d'autres chèques et d'autres cartes, puis il ouvrit une porte et entra dans un espace normalement interdit au public. Le vieux Abdelhak s'installa alors sur un siège et entreprit d'attendre stoïquement son tour. Une heure s'écoula puis deux heures et son tour n'était toujours pas arrivé. Il n'y avait presque plus aucun retraité devant le guichet. Même ceux qui étaient arrivés après lui étaient partis. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Il se présenta au guichet, s'enquit au sujet de son chèque et de sa carte d'identité et le préposé au guichet lui fit savoir qu'on avait trouvé sa carte d'identité mais pas de chèque. - Comment ça, pas de chèque ? C'est même un de vos collègues qui l'a rempli ! - Un de nos collègues qui l'a rempli ? Attends… je vais vérifier. Au bout de quelques minutes, le guichetier releva la tête. - J'ai trouvé ton chèque mais l'argent a été encaissé par une autre personne si j'en juge d'après les renseignements inscrits sur le chèque. Mon brave père, tu as été escroqué ! Tu as donné ton chèque à quelqu'un pour qu'il le remplisse et il a porté des renseignements autres que les tiens et il l'a encaissé à ta place ! Et même les renseignements que ce chèque porte ne sont peut-être pas à lui. Il doit s'agir d'une carte d'identité qu'il a volée. - Et alors, mon argent ? fit le vieil homme désemparé. - Ton argent ? Il faut déposer plainte et espérer que la police parvienne à mettre la main sur cet escroc ! Un mois plus tard, vers le 15 septembre de l'année en cours, l'escroc est arrêté. Il avait à son actif plusieurs retraités qu'il avait escroqués de la même manière. Jugé par le tribunal de Rouiba en première instance, il a été condamné à 5 ans de prison ferme. En seconde instance, la cour de Boumerdes l'a condamné tout récemment à 10 ans de prison ferme. Il enfonça sa main sénile à l'intérieur de sa vieille veste et en sortit un chèque qu'il avait pris soin de placer entre les pages d'un livre pour ne pas le froisser. Ce n'est qu'à ce moment là qu'il leva la tête et qu'il s'aperçut qu'il y avait une grande foule devant le guichet des retraites. Et il ne pouvait pas espérer passer avant les autres parce qu'ils avaient tous l'air plus âgé que lui. Au moment où il allait remplir son chèque, il se frappa le front. Il regarda encore autour de lui et il vit arriver un jeune homme portant veste et cravate. - Tu as besoin de quelque chose, mon père ? - Oui, je dois retirer de l'argent et je cherche quelqu'un pour remplir mon chèque… L'homme regarda le livre que le vieil homme tenait à la main et sourit : - Qu'est-ce que je vois là ? Tu lis des livres et tu ne sais pas remplir un chèque ? - Non… ce livre n'est pas à moi mais à mon petit-fils. Je n'ai jamais su lire ni écrire. Je suis un peu hors de moi parce que j'ai oublié mes lunettes pour voir de près. C'est pour tout à l'heure quand je signerai le chèque. - Hum…je comprends…mais tu n'as pas besoin de bien voir. Je suis là, je sais que le chèque t'appartiens, je travaille ici à la poste… - Ah ! Mais, c'est formidable… Tu peux me remplir alors mon chèque ? - Mais avec plaisir, mon brave, père. Tu as ton chéquier ? - Non, j'ai juste un chèque… - Je vais te le remplir mais il faut toujours venir avec son chéquier à la poste ; une erreur est toujours possible. Tu vas retourner chez toi pour ramener un autre ? - C'est juste mon fils… la prochaine fois, je ramènerai mon chéquier. - Tu as ta carte d'identité sur toi ? - Oui, bien sûr... - Et tu as de l'argent dans ton compte ? - Oui…j'ai fait hier une demande d'avoir… j'ai 11.000 DA, mais je ne vais tirer que 10.000 DA. Il faut toujours laisser une petite somme dans le compte sinon, on risque de me le fermer… - Qui a dit ça ? - L'employé qui m'a ouvert le compte, il y a quelques années. - Ce n'est pas vrai…Enfin, ce n'est pas un problème. Donne-moi ta carte d'identité et ton chèque, je m'occupe de tout, mais il faut attendre un peu…parce qu'il y a du monde. Et puis, il faut espérer qu'il y aura encore des liquidités quand ton tour arrivera. - Ah ! C'est vrai…depuis quelques jours, il y a des problèmes. Des gens ont fait la chaîne et quand ils sont arrivés devant la caisse on leur a dit qu'il n'y avait plus d'argent. - C'est vrai… Le problème n'est toujours pas réglé… Mais rassure-toi, mon père, je m'arrangerai pour que tu sois payé même s'il n'y a plus d'argent…parce qu'il y a toujours un petit fonds de secours en cas d'extrême urgence… - Ah ! Oui ? C'est bon à savoir ça ! - Mais, attention, il ne faut pas le répéter… - Oh ! Merci, mon fils, merci ! Que Dieu t'octroie tout ce que tu désires ! L'homme remplit le chèque tout en ayant sous les yeux la carte d'identité du vieil homme. Une fois qu'il avait fini de le remplir, il demanda au vieil homme de le signer comme il en avait l'habitude et celui-ci griffonna deux lettres qui ressemblaient vaguement à un « D » et à « A » : les initiales du vieil homme. - Très bien, maintenant tu n'as qu'à t'asseoir quelque part ; le guichetier va t'appeler dès que ton chèque arrivera entre ses mains. Le jeune homme s'éloigna et le vieil homme le suivit du regard. Il le vit s'approcher du guichet et poser le chèque et la carte d'identité sous une pile d'autres chèques et d'autres cartes, puis il ouvrit une porte et entra dans un espace normalement interdit au public. Le vieux Abdelhak s'installa alors sur un siège et entreprit d'attendre stoïquement son tour. Une heure s'écoula puis deux heures et son tour n'était toujours pas arrivé. Il n'y avait presque plus aucun retraité devant le guichet. Même ceux qui étaient arrivés après lui étaient partis. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Il se présenta au guichet, s'enquit au sujet de son chèque et de sa carte d'identité et le préposé au guichet lui fit savoir qu'on avait trouvé sa carte d'identité mais pas de chèque. - Comment ça, pas de chèque ? C'est même un de vos collègues qui l'a rempli ! - Un de nos collègues qui l'a rempli ? Attends… je vais vérifier. Au bout de quelques minutes, le guichetier releva la tête. - J'ai trouvé ton chèque mais l'argent a été encaissé par une autre personne si j'en juge d'après les renseignements inscrits sur le chèque. Mon brave père, tu as été escroqué ! Tu as donné ton chèque à quelqu'un pour qu'il le remplisse et il a porté des renseignements autres que les tiens et il l'a encaissé à ta place ! Et même les renseignements que ce chèque porte ne sont peut-être pas à lui. Il doit s'agir d'une carte d'identité qu'il a volée. - Et alors, mon argent ? fit le vieil homme désemparé. - Ton argent ? Il faut déposer plainte et espérer que la police parvienne à mettre la main sur cet escroc ! Un mois plus tard, vers le 15 septembre de l'année en cours, l'escroc est arrêté. Il avait à son actif plusieurs retraités qu'il avait escroqués de la même manière. Jugé par le tribunal de Rouiba en première instance, il a été condamné à 5 ans de prison ferme. En seconde instance, la cour de Boumerdes l'a condamné tout récemment à 10 ans de prison ferme.