Deux fois excisée, deux fois mère, Wafaa Helmy s'était jurée de ne jamais mutiler ses filles. La cadette y a échappé, mais l'aînée, emmenée par sa grand-mère chez une exciseuse de leur village de Haute-Egypte, a été opérée en secret un soir d'été. Pour la mère de Wafaa, la peur de la stigmatisation a été la plus forte. Comme beaucoup de ses compatriotes, elle reste convaincue que l'excision, qui consiste généralement en l'ablation du clitoris et des petites lèvres, est un précepte religieux et qu'elle préserve la vertu et l'honneur des jeunes filles. Dans un pays où près de 97% des femmes entre 15 et 49 ans, chrétiennes comme musulmanes, sont excisées selon des chiffres officiels, nombreuses sont celles qui se sentent garantes de l'ordre social et n'osent pas déroger à cette tradition remontant au temps des pharaons, communément appelée "purification" en Egypte. Même si toutes racontent la douleur, les saignements, parfois les malaises, les infections et les séquelles. "Voilà, c'est simple: je suis frigide", lâche Wafaa, venue assister à une réunion d'information sur l'excision organisée par une ONG. "C'est un gros problème avec mon mari, on se dispute tout le temps. Je n'ai jamais envie de faire l'amour, je n'ai aucune réaction, pas de sensations, pas de plaisir", explique cette Copte de 35 ans, deux fois excisée à dix ans "parce qu'il restait un petit bout à couper". Kawkaba Fathi, elle, a été excisée "à la soudanaise", c'est-à-dire que tous ses organes génitaux externes ont été enlevés. Traumatisée, elle a décidé, en accord avec son époux, de ne pas faire exciser ses trois filles. Aujourd'hui, comme une soixantaine d'autres villageoises, en majorité chrétiennes et toutes excisées, Wafaa et Kawkaba sont venues écouter une gynécologue travaillant avec le centre copte. "L'excision est une vieille, très vieille tradition et n'a aucun lien avec la religion", commence Mariam Mounib, avant de se lancer dans une description de ses conséquences: hémorragie, incontinence, relations sexuelles douloureuses, accouchements difficiles... Beaucoup opinent du chef, mais certaines s'inquiètent du qu'en-dira-t-on. "Et si jamais le mari renvoie ma fille pendant la nuit de noces parce qu'elle n'est pas excisée?" s'alarme l'une d'elles. "Il faut bien qu'on sache si la fille est normale, si ce n'est pas trop gros, si elle n'a pas de malformation?", demande une autre, en écho à la croyance que certaines femmes aux organes génitaux trop "saillants" doivent être excisées. La présidente de l'ONG, sœur Joanna, une petite femme brune à poigne, entre alors vivement en scène. "Emmènes-tu ta fille chez le médecin pour savoir si elle a un trop gros nez, ou des yeux trop grands ou trop petits? Alors pourquoi pour cette partie-là du corps?", tance-t-elle la villageoise. Le centre suit sans relâche les filles de huit à douze ans, "âge sensible" pour l'excision, dans quinze villages de Haute-Egypte. Tout est bon pour convaincre les villageois d'assister aux réunions, comme la distribution de thé, de lessive ou de savon. Deux fois excisée, deux fois mère, Wafaa Helmy s'était jurée de ne jamais mutiler ses filles. La cadette y a échappé, mais l'aînée, emmenée par sa grand-mère chez une exciseuse de leur village de Haute-Egypte, a été opérée en secret un soir d'été. Pour la mère de Wafaa, la peur de la stigmatisation a été la plus forte. Comme beaucoup de ses compatriotes, elle reste convaincue que l'excision, qui consiste généralement en l'ablation du clitoris et des petites lèvres, est un précepte religieux et qu'elle préserve la vertu et l'honneur des jeunes filles. Dans un pays où près de 97% des femmes entre 15 et 49 ans, chrétiennes comme musulmanes, sont excisées selon des chiffres officiels, nombreuses sont celles qui se sentent garantes de l'ordre social et n'osent pas déroger à cette tradition remontant au temps des pharaons, communément appelée "purification" en Egypte. Même si toutes racontent la douleur, les saignements, parfois les malaises, les infections et les séquelles. "Voilà, c'est simple: je suis frigide", lâche Wafaa, venue assister à une réunion d'information sur l'excision organisée par une ONG. "C'est un gros problème avec mon mari, on se dispute tout le temps. Je n'ai jamais envie de faire l'amour, je n'ai aucune réaction, pas de sensations, pas de plaisir", explique cette Copte de 35 ans, deux fois excisée à dix ans "parce qu'il restait un petit bout à couper". Kawkaba Fathi, elle, a été excisée "à la soudanaise", c'est-à-dire que tous ses organes génitaux externes ont été enlevés. Traumatisée, elle a décidé, en accord avec son époux, de ne pas faire exciser ses trois filles. Aujourd'hui, comme une soixantaine d'autres villageoises, en majorité chrétiennes et toutes excisées, Wafaa et Kawkaba sont venues écouter une gynécologue travaillant avec le centre copte. "L'excision est une vieille, très vieille tradition et n'a aucun lien avec la religion", commence Mariam Mounib, avant de se lancer dans une description de ses conséquences: hémorragie, incontinence, relations sexuelles douloureuses, accouchements difficiles... Beaucoup opinent du chef, mais certaines s'inquiètent du qu'en-dira-t-on. "Et si jamais le mari renvoie ma fille pendant la nuit de noces parce qu'elle n'est pas excisée?" s'alarme l'une d'elles. "Il faut bien qu'on sache si la fille est normale, si ce n'est pas trop gros, si elle n'a pas de malformation?", demande une autre, en écho à la croyance que certaines femmes aux organes génitaux trop "saillants" doivent être excisées. La présidente de l'ONG, sœur Joanna, une petite femme brune à poigne, entre alors vivement en scène. "Emmènes-tu ta fille chez le médecin pour savoir si elle a un trop gros nez, ou des yeux trop grands ou trop petits? Alors pourquoi pour cette partie-là du corps?", tance-t-elle la villageoise. Le centre suit sans relâche les filles de huit à douze ans, "âge sensible" pour l'excision, dans quinze villages de Haute-Egypte. Tout est bon pour convaincre les villageois d'assister aux réunions, comme la distribution de thé, de lessive ou de savon.