Après les diversions de l'été, nous assistons ces derniers jours à une mobilisation des habituels chargés de mission des officines (fonctionnaires de presse, troubadours boulitiques, intellectuels organiques), appelant l'armée à « prendre ses responsabilités » afin de se débarrasser du locataire d'El Mouradia et du Gaïd des Tagarins, prétextant « l'inquiétante dégradation de la situation ». Subitement et comme par hasard, ils se réveillent pour découvrir aujourd'hui que notre malheureux pays coule. L'oligarchie militaro-financière, véritable pouvoir en Algérie et dont les aiguilles de son horloge se sont arrêtées aux années 70 et 80, pense continuer à manipuler l'opinion publique et pouvoir peut-être encore une fois utiliser notre jeunesse à qui elle a fait perdre ses repères et qui se trouve sans présent ni avenir, comme chair à canon comme en 88, 92 et 2001, pour régler ses comptes internes, dans le cadre du partage du butin de guerre que représente notre Algérie, à ses yeux. Nous ne sommes pas dupes pour participer à ce jeu malsain que se livrent les gangs de l'oligarchie. Le problème de l'Algérie n'est pas le locataire d'El Mouradia, ni tel ou tel officier supérieur. Le problème de l'Algérie est celui d'un pouvoir illégitime qui perdure depuis 62 et qu'il faudrait régler définitivement afin de mettre un terme à la crise politique qui s'aggrave au fil des ans et qui risque de mener le pays vers d'autres drames, à Dieu Ne Plaise. Quant à l'armée nationale, elle ne peut-être républicaine que si elle est sous l'autorité et le contrôle d'un pouvoir politique LEGITIME. Il est temps de rappeler aussi et de manière claire et franche à l'oligarchie qui a pris en otage le pays et utilise l'institution militaire comme bouclier que cette dernière ne doit être ni à son service ni au service d'un clan, mais au service exclusif de l'Algérie, Etat et Nation. Elle doit donc cesser d'être la source du pouvoir et doit impérativement cesser d'être instrumentalisée, comme elle l'a été depuis 62. Cette institution nationale doit prendre conscience de sa responsabilité historique, en ces moments de grave crise politique que traverse le pays, dans l'accompagnement des forces politiques REELLES, dans la voie d'une transition démocratique vers un Etat de Droit et des Libertés démocratiques. C'est à ce prix que se réglera définitivement la question de la légitimité du pouvoir, une légitimité usurpée par l'armée des frontières un certain mois de septembre 62 au prix d'un millier de morts. Salah-Eddine SIDHOUM