Comment aborder le dossier de ces partis incarnant l'esprit du système s'il venait à manquer certaines interrogations en guise de préambule ? De propos délibéré, l'on pense donc qu'il est utile de se poser quelques questions au sujet de la récente mise au point diffusée par le Palais. D'abord à qui doit-on attribuer le buzz médiatique qui obligea la Présidence à recourir aux démentis visant certaines assertions concernant la carrière du chef de l'Etat et les époques où il fut un militant du FLN ? Ensuite, doit-on se tourner justement vers le binôme FLN-RND dès lors que l'on pense qu'ils étaient de connivence pour réussir un double rendez-vous grâce auquel chaque parti pouvait tenir son congrès à 48 heures d'intervalle ? Enfin, était-il sciemment souhaitable que ces shows politiques bénéficient du contexte et quel genre de profit pouvaient tirer ces deux chapelles, jusque-là contestées ? Même si l'on suppute que ce scénario, tout au moins transgressif au vu des interdits sanitaires, n'a pu se réaliser qu'avec la bénédiction de l'administration, l'on pense aussitôt que le ministère de l'Intérieur était à l'origine de cette grossière gaffe. Cela dit, peu importent les raisons qui permirent aux deux partis de profiter de l'effet d'aubaine pour capter la curiosité de l'opinion. Seulement, cette dernière ne manque pas de mémoire qui lui rappelle que, sous l'ancien régime, ces partis cultivaient des postures similaires qui faisaient d'eux un véritable duo d'excellence au service du résident du Palais. Il est vrai que l'axe qu'ils constituèrent est illustré par une longue histoire ponctuée de complicités dans le partage des faveurs dispensées par El-Mouradia mais aussi de solidarités en béton en «cas de malheur». C'est-à-dire lorsque les vents contraires se lèvent et que l'autorité même du Palais commence à tituber. En clair, malgré le fait qu'ils furent longtemps associés dans la gestion des affaires de l'Etat, l'un comme l'autre conservèrent une sorte de «quant-à-soi» qui leur avait servi d'identité électorale. Autrement dit, de factices pavillons ayant permis à chacun d'eux de se prévaloir d'une «généalogie» politique différente de celle de l'autre. En vérité, leurs discours n'étaient que des stéréotypes propres à la propagande. En somme, des songe-creux lorsqu'ils vantent leurs programmes. À ce propos, le FLN en fut le précurseur dans le domaine des bobards lors de chaque campagne électorale. Parti unique à l'origine, il a toujours prétendu étalonner son rayonnement politique sur la durée existentielle de l'Etat algérien. Or, malgré le label de l'historicité, il n'a jamais grandi dans l'estime populaire. Bien au contraire, il connut sa première bérézina en octobre 88 et surtout de solides critiques dont les auteurs étaient de vieux militants du mouvement national. Comme cela avait été le cas de Mehri, le plus brillant parmi les secrétaires généraux qui connurent l'appareil de l'intérieur. Se démarquant aussi bien «des campagnes de glorification que celle du dénigrement», disait-il, il crut plus utile, en 2008, de recadrer le débat démocratique en examinant la perception erronée qu'avait le FLN au sujet de la fonction présidentielle. Etonné que l'on plaide pour la prolongation du mandat du titulaire, il a fini par accuser cet appareil de ne savoir décliner «l'avenir de l'Algérie que comme une présidence au lieu d'être appréhendé en termes d'Etat». Une dérive qu'il imputera à un FLN ayant perdu de vue les valeurs républicaines pour s'installer au service d'une autocratie. C'est à cela qu'en était réduit cet acronyme lorsqu'il devint le porte-drapeau du régime de Bouteflika. Vidé de tous les fondamentaux doctrinaux hérité du passé, le FLN a fini par muter en devenant une agence de recrutement dont la valeur est cotée à la bourse d'un carriérisme, lequel ne pouvait générer que des promotions de hauts cadres dont les compétences étaient douteuses. De surcroît, certains analystes avaient mis en exergue l'imposture qui a consisté à doter ce (P)FLN d'une paternité abusivement attribuée à Novembre 1954, alors qu'il n'en fut rien. En effet, sa création eut pour origine la fameuse conjuration de l'été 1962 que le fameux congrès de 1964 ratifia définitivement. Depuis, il fonctionnera sans discontinuer sur la base du clanisme et avec une propension morbide à user de la stigmatisation et l'épuration. Or, 56 années après l'institution du parti unique qui inaugura sa supposée intransigeance en excluant de ses rangs Ferhat Abbas, l'on retrouve de nos jours la même culture et le même mode opératoire, toutes les fois où il est question d'adouber un nouveau «scribe général». C'est à partir de ces procédés infâmes que de faux leaders purent s'imposer. Cette stratégie qui administre la machine en multipliant les servilités rabaissantes, à ne pas confondre d'ailleurs avec les servitudes qui, elles, relèvent des respectables tâches. Etonnamment, ce sera le RND qui s'en inspirera dès la seconde année de son existence lorsqu'un certain Ouyahia fut parachuté à sa tête grâce à la bénédiction des pouvoirs occultes. Justement, à qui s'apparente ce «rassemblement» devenant un compagnon de route du FLN au lendemain de l'investiture de Bouteflika ? Pour bon nombre d'observateurs, sa singularité tient au fait que, contrairement à la « génétique » classique des partis, lui n'a pas été fécondé par un courant politique ou, par exemple, la maturation d'un projet social susceptible de devenir un levier des revendications. En réalité, son existence ne fut que le produit d'une nécessité : celle de contester la montée des périls émanant du courant islamiste et du lobbying efficace des réseaux d'influence qui s'étaient illustrés à Sant'Egidio, lesquels parvinrent à embrigader aussi bien le FLN que le FFS d'Aït-Ahmed sans omettre le PT et des îlots d'intellectuels qui prêchèrent pour une «régression féconde» en légitimant la victoire du FIS aux législatives de 1991. C'est dire que l'on tablait sur un RND comme un solide antidote à la capitulation d'autant plus qu'il se revendiquait doctrinalement comme un courant du progrès. Cette illusion, hélas, ne dura que quelques mois avant le départ forcé d'un Zeroual, sacrifié par ses pairs de l'armée qui s'en allèrent chercher un Bouteflika en qui ils voyaient le politicien providentiel. C'est à la suite de ce tournant historique que coïncidera la révolution copernicienne d'un RND qui prêchera pour la réconciliation, l'amnistie et, parfois même, faire de l'islamisme politique un complément du programme présidentiel lors de son second mandat (2004). Excellent lieutenant de Bouteflika, Ouyahia incarnera personnellement la duplicité sous toutes ses facettes et fera de ses prétendus militants autant de Rastignac en herbe qui ne jurent que par un maroquin de parlementaires ou de strapontins de maires. Appareil croupion imaginé à l'origine par une volonté administrative en 1996, il lui fallait un parrain d'une autre trempe pour survivre. Ce que décida et fit Ouyahia qui se mit au service de Bouteflika au moment où celui-ci se consacra au tissage de sa toile d'araignée en intégrant un Hamas, maître dans l'entrisme, et un Parti des travailleurs, dont l'égérie devint son opposante de service. La saga de l'imposture était signée un certain 12 novembre 2008 lorsque la Constitution fut violée grâce aux approbations de cette alliance. C'était le temps des fossoyeurs de la République. B. H.