Mobilisé depuis plus de quatre mois pour lutter contre la propagation de la pandémie du Covid-19, le personnel soignant affronte en permanence le risque de contamination. Outre le manque de moyens de protection, cette armée blanche est souvent livrée à elle-même. Au quotidien, ces professionnels de la santé font face aux problèmes d'hébergement et de transport qui se posent avec acuité depuis de longs mois. Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Hébergés dans des hôtels privés au début de la crise sanitaire du Covid-19, des médecins, infirmiers et autre personnel du corps médical ont été priés juste après l'Aïd-el-Fitr de libérer les lieux. Depuis, ils sont obligés de rentrer chez eux après le service, au risque de contaminer leurs proches. Ces «renvois» ont été enregistrés à travers plusieurs wilayas du pays. Le comble, certains de ces établissements hôteliers n'ont même pas pris la peine d'informer à l'avance leurs locataires. «Ce personnel de la santé n'a même pas été avisé. C'est à la réception le matin, au moment de partir pour se rendre au boulot, qu'on leur a signifié de ne pas revenir. Ceux qui étaient déjà sur leur lieu de travail ont découvert en rentrant en fin d'après-midi, leurs affaires déposées à la réception», regrette le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP). Selon lui, la décision de ces hôtels n'a pas été sans conséquences sur le déroulement et le rythme du travail dans les structures hospitalières. En effet, la plupart des employés «chassés» de ces résidences peinent pour rejoindre leur lieu de travail. Depuis, assure-t-il, un problème de transport s'est posé dans de nombreuses structures de santé. «Tous ces gens ont des difficultés pour se rendre au travail et pour rentrer chez eux. Quand il y a des absents, il faut bien sûr les remplacer. Le personnel soignant ne pouvant pas joindre son lieu de travail ne peut assurer la permanence ni les consultations. Idem pour les agents d'accueil et les femmes de ménage qui sont eux aussi indispensables pour le bon fonctionnement des services. À cause de ces absences, toute l'organisation et tout le travail de l'établissement hospitalier sont chamboulés », explique-t-il. Le Dr Merabet cite ainsi l'exemple des régions de Meftah, Larbaâ et Bougara dans la wilaya de Blida où le personnel soignant s'est heurté à l'absence de transport au début de la pandémie. Un problème qui a été résolu, dit-il, grâce à «la cimenterie de Mefah, qui nous a accompagnés depuis le mois de mars dernier en mettant à notre disposition deux véhicules de transport : un minibus et une voiture. C'est ce qui a permis de régler le problème dans cette région». Seulement, avec la reprise de l'activité de la cimenterie le 15 juillet dernier, le même problème a resurgi. «Nous avons sollicité le groupe industriel auquel appartient la cimenterie de Meftah, espérant qu'il puisse faire l'effort et continuer à nous assurer le transport», ajoute-t-il. Avec la propagation du virus SARS-CoV-2, responsable de cette pandémie, les appels d'aide pour l'hébergement du personnel soignant se font de plus en plus nombreux sur les réseaux sociaux. Le personnel médical confirmé positif au virus souffre le martyre pour trouver un gîte afin d'observer sa mise en quarantaine. Sur son compte Facebook, le Pr Salim Benkhedda, chef de service de cardiologie au CHU Mustapha-Pacha à Alger, témoigne du désarroi que vivent les médecins et infirmiers confirmés positifs au nouveau coronavirus. Il lance ainsi un appel pour trouver des endroits où les loger. «Je cherche des chambres pour mes médecins et infirmières contaminés», puisque «tous les hôtels refusent d'accueillir ces pestiférés», explique-t-il dans un post publié il y a quelques jours. Où sont les autorités locales ? Le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique estime que les autorités locales doivent s'impliquer pour trouver des solutions aux problèmes auxquels fait face le personnel médical. Il rappelle à cet effet l'instruction du Premier ministre, qui a insisté sur la responsabilisation des autorités locales. «Ce travail n'est malheureusement pas fait. Pourtant, c'est aux autorités locales de se pencher sur les problèmes existants, définir l'urgence et les priorités et trouver les moyens. Ce n'est pas au personnel soignant de le faire !», conclut-il. Ry. N.