[email protected] Au d�but du Ramadan, le roi Abdallah d'Arabie saoudite a pris la d�cision d'interdire au tout-venant d'�diter des fatwas, afin de mettre fin � l'anarchie pr�valant dans ce domaine. Apr�s avoir r�pandu durant plusieurs d�cennies la pand�mie de la fatwa, le souverain wahhabite s'est ravis�, devant les retours de boomerang inattendus et le danger que courait la monarchie, m�re de toutes les fatwas. La critique, aussi bien � l'ext�rieur qu'� l'int�rieur du royaume, s'adressait surtout aux cha�nes religieuses, g�n�ralement financ�es par des Saoudiens. Celles-ci ont fini par mettre en place un v�ritable �march� ou �bazar� de la fatwa, o� chacun pouvait voir midi � sa porte. Devant les multiples exc�s des pr�cheurs, multimillionnaires pour certains, il a donc �t� d�cid� de ramener la fatwa au bercail, en l'occurrence l'institution royale d�sign�e � cet effet. Les m�dias arabes ont alors fait chorus, et ont unanimement salu� cette initiative royale qui r�tablissait le contr�le de la maison- m�re sur ses multiples et indisciplin�es succursales. Rass�r�n�s et rassur�s sur leur avenir, les th�ologiens de la cour ont d�fendu le d�cret royal, qui ne vise pas selon eux � imposer un monopole de la fatwa. Ceci impliquant cela, ils ont rejet� la probabilit� d'un �march� noir� de la fatwa. Or, et comme un d�fi hautain au d�cret royal, un th�ologien n'appartenant pas au haut conseil de la fatwa y est all� la semaine derni�re de son �dit personnel. Le cheikh Youssef Al-Ahmad a sorti une fl�che de son carquois magique et l'a d�coch�e en direction des supermarch�s �Panda�, l'�quivalent saoudien de notre �Family Shop�. La fr�quentation et le recours aux services de cette cha�ne rel�vent d�sormais du �haram�, pour le fait qu'ils emploient des femmes comme caissi�res. Youssef Al-Ahmed a avanc� comme argument � sa fatwa le fait que l'emploi des femmes � ce poste �tait susceptible de les �loigner de leur identit� islamique. Selon lui, l'emploi des femmes comme caissi�res faisait partie d'un plan visant � d�voiler la femme saoudienne et � la ramener dans le giron de l'Occident. C'est en partie la m�me argumentation qu'il avait reprise, il y a une quinzaine de jours, lors du d�c�s de l'�crivain et ancien ministre saoudien, Ghazi Kosse�bi. Le cheikh avait mis en doute la �sinc�rit� religieuse � des �uvres po�tiques mystiques du d�funt. Il l'avait aussi accus� de travailler, dans sa production litt�raire(1), � l'occidentalisation de la femme en Arabie saoudite. Il y a trois mois, le m�me cheikh avait, en compagnie d'un groupe de �coreligionnaires�, investi le si�ge du minist�re de l'�ducation nationale pour protester contre un vague projet de mixit� dans certaines �coles. Toutefois, c'est sur un autre champ de bataille que Youssef Al-Ahmad a acquis la c�l�brit�, toujours au nom de la lutte contre la mixit�. Ayant constat� qu'il y avait une singuli�re promiscuit� sur les lieux saints m�mes de l'Islam, il avait os� pr�coniser, en mars dernier, la destruction de la mosqu�e Al-Haram. Le sanctuaire devait �tre enti�rement reconstruit, selon lui, avec des normes visant � emp�cher toute mixit� entre les hommes et les femmes lors des pri�res rituelles. La fatwa avait soulev� un toll� g�n�ral, aussi bien � l'int�rieur du royaume que dans le monde arabe et musulman. Devant les r�actions d'hostilit�, le th�ologien avait fait l�g�rement machine arri�re. Il avait pr�cis� qu'il ne pr�conisait pas la destruction totale, mais le r�am�nagement architectural de la mosqu�e, pour respecter le principe de non-mixit�. A la suite de cette initiative tr�s controvers�e, la cha�ne islamiste Al-Bidya, d'o� il avait lanc� sa fatwa, avait mis fin au contrat de Youssef Al-Ahmed. Ce qui ne l'avait pas emp�ch� de trouver d'autres lucarnes pour y lancer ses br�lots. Mais c'est incontestablement sa proposition de d�truire le Masdjid Al Haram qui en a fait une c�l�brit� et lui a valu d'�tre surnomm� l'Abraha(2) de ce si�cle. Comme les imitateurs ne sont jamais loin, le nom d'Abraha et de son arm�e d'�l�phants a �t� aussi �voqu� ces derniers jours, � propos d'une mosqu�e et d'un petit village de Kabylie. On sait que des citoyens oppos�s � l'�dification d'une mosqu�e salafiste avaient utilis� des engins pour en d�truire les fondations. Le parti du Hamas, qui devait avoir quelques sympathisants dans la place, a r�agi en comparant les destructeurs d'Aghribs aux �Gens de l'�l�phant�, comme le Coran d�crit Abraha et ses animaux. Ce qui est une surestimation h�tive au vu de la proportion et des forces en pr�sence. Le plus ennuyeux, dans le cas de ce village, c'est la tenace et pesante rivalit� entre le FFS et le RCD, soudain camp�s dans ce coin perdu comme les protagonistes d'une guerre entre oiseaux �ababil�, et �l�phants �thiopiens. On appr�ciera donc, d'autant mieux, la r�ponse pr�t�e � Nordine A�t-Hamouda, d�put� du RCD, en r�plique aux commentaires d�sobligeants du Hamas, made in Algeria. D�cid�ment tr�s inspir� ces temps-ci, le fils d'Amirouche a invit� le leader du Hamas � balayer devant sa porte. Il a, opportun�ment, rappel� � M. Aboudjerra Soltani qu'il s'�tait tenu coi lorsque les autorit�s avaient d�truit la mosqu�e, dans laquelle il priait, pour lib�rer le terrain � un investisseur �tranger. Ce qui navre aussi dans cette affaire, c'est que tous les journaux qui crient au feu d�s qu'ils voient un briseur de je�ne ou un �vang�liste, gardent un pieux silence sur les tentatives fondamentalistes de contr�ler l'espace social. Sans doute, est-ce l'effet du Ramadan qui incite la plupart de nos confr�res � se ranger sous la banni�re du religieusement correct ? Cependant, cette unanimit� de fa�ade, contre ceux qui ne je�nent pas et contre les envahisseurs chr�tiens ne r�siste pas face � la rivalit� ouverte entre certains titres. Ainsi, lorsque le quotidien Al-Nahar d�nonce, photo � l'appui, les distractions �illicites� de nos jeunes footballeurs, son alter ego Echourouk fait le contraire. Il s'emploie � montrer de quelle mani�re les joueurs de l'�quipe nationale pr�parent leur match en plongeant dans la m�ditation et le recueillement. C'est � croire qu'il ne s'agit pas de la m�me �quipe, ni des m�mes joueurs. Le second nous apprend m�me que la JSK se doperait aux Saintes �critures entre deux galops d'entra�nement. Si on continue comme �a et si nos joueurs ont vraiment renonc� aux plaisirs d'ici-bas, il faudra bient�t ajouter de nouveaux crit�res pour les joueurs s�lectionn�s, comme la participation obligatoire � la comp�tition des �Chevaliers du Coran�. En attendant, essayons simplement de battre la Tanzanie, en esp�rant que Sa�dane aura fait de son mieux pour amadouer la divine providence. A. H. 1) Ghazi Kosse�bi a r�ussi, de son vivant, l'exploit d'�tre membre du gouvernement tout en �tant l'auteur de livres interdits par ce m�me gouvernement en Arabie saoudite. C'est sans doute pour cela que Riyadh n'a pas d�fendu avec beaucoup d'�nergie sa candidature � l'Unesco, ouvrant ainsi la voie � la piteuse �quip�e de l'�gyptien Farouk Hosni. 2) Souverain �thiopien qui avait tent� de d�truire la Ka�ba, avec sa cohorte d'�l�phants, l'ann�e de la naissance du Proph�te. Il en avait �t� emp�ch� par une arm�e d'oiseaux mythiques (Ababil) qui avait an�anti les agresseurs.