Un mois après avoir franchi les 60 dollars, le baril de pétrole a accroché cette semaine le prix inimaginable il y a encore quelques semaines de 70 dollars, en attendant des pics que des analystes prédisent pouvant atteindre les 100 dollars. Des cours qui permettent de ranger dans le placard des mauvais souvenirs, les terribles mois de la première vague de la pandémie, mais sans pouvoir effacer les conséquences et leurs impacts évalués en milliards de dollars de pertes sur les producteurs et les investisseurs. Du répit certes, mais les temps demeurent durs, pour les pays producteurs notamment, les grandes compagnies ayant plus d'un tour dans leur sac pour s'en sortir malgré les mutations qu'est en train d'induire la transition énergétique de par le monde et ses conséquences sur le pétrole et les énergies fossiles en général. Passé l'euphorie de la tendance haussière des prix depuis le début de cette année plus particulièrement, il est des conjonctures qui rappellent, si besoin est, que le marché pétrolier demeure le plus sensible, voire versatile, comme l'illustraient les séances de mardi et d'hier mercredi, du moins jusqu'à la mi-journée, sur les marchés asiatique, londonien et new-yorkais. Des séances du marché qui viennent un peu à l'encontre des perspectives optimistes établies par des institutions aussi sérieuses que les banques les plus puissantes au monde, à l'instar de JP Morgan ou Goldman Sachs qui, sans être totalement remises en cause, rappellent que les temps et la demande mondiale en pétrole en sont encore à l'incertitude. Ceci du fait des «grincements», pour le moins que l'on puisse dire, qui frappent encore la machine économique mondiale. Un exemple parmi tant d'autres puissances économiques consommatrices de pétrole, l'Allemagne où, selon les tout derniers chiffres de l'Office allemand des statistiques, la production manufacturière, déjà rudement mise à mal en 2020, a reculé de 2,5% sur un mois, en janvier, alors que dans le secteur du bâtiment, la chute a atteint 12,5%. Des données qui viennent rappeler qu'il faudra se garder de céder à l'euphorie, comme le reflète donc le cours des prix lors de la séance de mardi sur les marchés principaux, lorsque le baril s'est mis à céder de la valeur engrangée la veille, refroidi par les spéculations sur les nouvelles au sujet de l'inventaire des stocks de pétrole emmagasinés aux Etats-Unis. Le baril de Brent ayant en fin de séance à Londres dû céder 1,5% de son prix de la veille, affichant 67,52 dollars, au moment où la séance était clôturée à New York avec un baril de WTI cédé à 64,01 dollars, soit 1,59% de moins que son prix de lundi. Une configuration du marché qui indique, comme le soulignent de nombreux analystes, que rien n'est vraiment acquis, et que même si l'Opep+ a, de façon inattendue, opté pour reporter l'augmentation de sa production, en maintenant les coupes à leur niveau de la fin de l'année dernière, ce qui a fait grimper immédiatement le prix du Brent à 70 dollars tout juste après cette décision, il n'en demeure pas moins qu'il est à craindre, comme le soutiennent de nombreux pays consommateurs, que les prix du pétrole les plus élevés pourraient freiner la reprise de la demande mondiale, demande que l'Opep elle-même qualifie de fragile. Ce dont doivent se convaincre tous les pays à l'image de l'Algérie, qui a payé et paye encore le prix fort de la chute des prix de l'année dernière. Une chute qui, doit-on le rappeler, a été accompagnée par la glissade du dollar de 7%, impactant directement donc nos ventes d'hydrocarbures libellées en monnaie US. L'Algérie, qui a accueilli la nouvelle année sous un meilleur angle avec la remontée du prix du baril de pétrole et celle du dollar de près de 1% depuis le début 2021, grâce à la politique économique «apaisée» du nouveau locataire de la Maison-Blanche. Toutefois, le prix du pétrole de ces derniers mois, bien qu'en hausse de manière spectaculaire, demeure encore loin du prix que requièrent les ajustements budgétaires espérés par les autorités algériennes qui, doit-on également le rappeler, ont besoin d'un baril de plus de 130 dollars, selon certains analystes, alors que si l'on doit se fier à l'estimation du FMI, l'Algérie a besoin d'un baril de Brent coûtant en moyenne plus de 135 dollars sur l'année pour parvenir à l'équilibre du budget prévu par la loi de finances 2021, établie avec un prix moyen de référence à 40 dollars. C'est dire donc si l'on est encore loin du compte. Azedine Maktour