La baguette de pain de 10 dinars se fait rare depuis plusieurs semaines. La plupart des boulangeries ne proposent que du pain dit amélioré, à partir de 15 dinars la baguette. La Fédération nationale des boulangers incombe cette indisponibilité à des augmentations successives des prix des intrants. Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Depuis le mois de juillet dernier, les consommateurs peinent à trouver la baguette de pain de 10 dinars. Dans la majorité des boulangeries, seul le pain dit amélioré est disponible. Faute de la baguette au prix «administré», les consommateurs sont contraints de se rabattre sur le pain qui se trouve à profusion sur les étagères, mais plus cher. Ces variétés de pain sont proposées à longueur de journée à 15 dinars pour la baguette la moins chère, et à 50 dinars pour le pain «doublement amélioré». Résidant à Belouizdad, à Alger, Lyes se plaint de la pénurie de la baguette de pain de dix dinars dans les boulangeries de son quartier, mais aussi dans celles des quartiers avoisinants. «Ça fait des semaines que je n'ai pas pu trouver la baguette de dix dinars. Elle a quasiment disparu des étalages des boulangeries de Belouizdad, Sidi-M'hamed et Alger-Centre», témoigne-t-il. Ce père de famille se retrouve ainsi sommé de prendre du pain plus cher. «Les boulangers nous imposent du pain soi-disant amélioré, parsemé de semoule ou de quelques graines de nigelle, à 15 dinars, voire à 20 dinars», confie-t-il. Outré par cette situation, il rappelle que le prix de la baguette de pain «normale» a été fixé par les pouvoirs publics à 8,50 dinars. «Cette baguette n'a jamais été commercialisée. Les boulangers l'ont supprimée dès le départ et aujourd'hui, c'est au tour de la baguette de 10 dinars. C'est une augmentation du prix du pain qui ne dit pas son nom !», peste-t-il. Devenu pratiquement introuvable, le pain à dix dinars se fait désirer. Une pénurie qui a touché la plupart des communes de la capitale. «Il faut se lever tôt pour trouver la baguette de 10 dinars», plaisante Sadek. Ce retraité affirme qu'à Chéraga, seul du pain à 30 dinars est proposé dans les boulangeries, alors qu'à Dely-Brahim, la baguette de 50 dinars a pris la place de celle de 10 dinars. «À ces prix, la baguette de pain est devenue, aujourd'hui, comme une brioche ou une pâtisserie», dit-il. Le président de la Fédération nationale des boulangers affiliée à l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), Youcef Kalafat, confirme qu'effectivement, la baguette de pain de 10 dinars manque dans pas mal de boulangeries. «Il y a une augmentation monstre sur les prix de la levure et des améliorants», précise-t-il. Selon lui, ces deux produits, indispensables pour la confection du pain, connaissent chaque trimestre, depuis le début de 2021, une augmentation de prix de 10 à 15%. «Le boulanger se trouve dans le pétrin car il ne s'en sort pas avec l'actuelle marge bénéficiaire sur la baguette de dix dinars. S'il se contente uniquement de la fabrication de cette baguette, il ira droit vers la faillite. Il est donc obligé de l'arrêter et de se pencher sur la fabrication d'autres pains dont les prix sont libres, tels que le pain de son, le pain de semoule, le pain d'orge et le pain complet», tente-t-il d'expliquer. Il assure, cependant, que certaines boulangeries continuent, par contre, à fabriquer la baguette de pain de dix dinars, tout en proposant des viennoiseries et pâtisseries afin, dit-il, d'«éviter d'être déficitaires». Soulignant la faiblesse de la marge bénéficiaire du boulanger, Youcef Kalafat rappelle que son organisation a toujours revendiqué son amélioration. «C'est à l'Etat de trouver une solution pour que le boulanger ait une marge bénéficiaire qui lui permettra de poursuivre son activité», dit-il. Pour lui, parler d'un prix subventionné de la baguette de pain est faux. «Le pain n'est pas subventionné, c'est uniquement la farine qui l'est», note-t-il. D'ailleurs, poursuit-il, «cette farine ne va pas uniquement aux boulangeries. Sa subvention profite également aux biscuiteries et aux pizzerias». Le président de la Fédération nationale des boulangers estime que pour avoir un pain subventionné, il faudrait également soutenir les prix de la levure, des améliorants et de l'énergie destinée aux boulangers. Ry. N.