Le lundi 25 octobre, un coup d'Etat militaire place à la tête du Soudan le général Fatah Al Bourhane. Le régime civil est dissous, les dirigeants politiques sont arrêtés et l'Etat d'urgence déclaré. Quelques jours plus tard, bravant l'état d'urgence et la répression, des centaines de milliers de personnes défilent pacifiquement à l'appel d'organisations de la société civile et de comités de résistance. Aux cris de « Le peuple est plus fort et le retour en arrière impossible », ils exigent un gouvernement civil et le départ de la junte militaire. Le nouveau pouvoir n'hésite pas à tirer sur la foule à balles réelles et à prendre d'assaut les hôpitaux où se sont réfugiés les manifestants. Pendant ce temps, le Premier ministre Abdallah Hamdok, arrêté avec les membres de son cabinet et d'autres dirigeants civils, exhorte la population à poursuivre les manifestations pacifiques. Depuis la chute de l'autocrate Omar Al-Bachir en 2019 (30 ans de pouvoir islamo-militaire), le Soudan était dirigé par un gouvernement de transition constitué par un Conseil de souveraineté composé de civils et de militaires, présidé par le général Fatah Al-Bourhane, le Premier ministre Abdallah Hamdok étant un civil. Le but de ce régime de transition était d'organiser des élections et de passer à un régime civil en juillet 2023. Mais les tensions entre groupes politiques rivaux et les divisions au sein de l'armée eurent raison de l'accord de partage. Prétextant de ces luttes intestines et des difficultés économiques du pays, le général Al Bourhane qui aurait, dit-on, pris ses ordres auprès du Président égyptien Al Sissi, lequel souhaitait une reprise en main de l'armée, assume ainsi la remise en question des alliances et des rapports de force dans la région. En effet, le Soudan avait signé les « Accords d'Abraham » qui entérinaient un rapprochement avec Israël avec la promesse d'une aide financière US. La réponse n'a pas tardé du côté des Etats-Unis qui viennent de suspendre le versement de 700 millions de dollars au Soudan tandis que la Russie, elle, se félicite du coup d'Etat militaire. La Corne de l'Afrique est aujourd'hui à la croisée de toutes les ambitions, US, russe et chinoise, bien sûr, mais aussi des pays du Golfe et de la Turquie, entre autres. A. T.