Après 4 années de détention au nord du Mali entre les mains du groupe djihadiste Jamaat Nosrat al-islam wal-muslimin, la Franco-suisse Sophie Pétronin, une travailleuse humanitaire de 76 ans, était délivrée en octobre 2020 en contrepartie de la remise en liberté de plus de 200 djihadistes, et sans doute, dit-on, moyennant rançon. Une année plus tard, on la retrouve au pays de ses ravisseurs où elle est entrée clandestinement en mars, plusieurs demandes de visas lui ayant été refusées, après un périple digne d'une séquence à la James Bond. Voilée la plupart du temps, changeant de bus à la barbe de la gendarmerie malienne pour ne pas être repérée, à califourchon sur des motos taxis, la « vieille dame indigne », du moins aux yeux du gouvernement Macron, fait un pied-de-nez aux autorités françaises autant que maliennes. Accusée d'irresponsabilité par le porte-parole du gouvernement français « vis-à-vis d'elle-même » mais aussi « de la sécurité de nos militaires », vilipendée par une partie de la classe politique française, Mariam – son nom de conversion à l'islam – revendique son droit d'aller et venir sans plus se soucier des intérêts géostratégiques des puissants. D'ailleurs, à peine libérée, elle faisait déjà état de son intention de retourner au Mali où elle se sentait chez elle, auprès de sa fille adoptive, une jeune Malienne, taxant ses ravisseurs de « groupes d'opposition armée au régime » plutôt que de djihadistes. Elle affirmait, par ailleurs, avoir transformé sa détention en retraite spirituelle. Syndrome de Stockholm réactualisé en syndrome de Bamako ? Elle résiderait aujourd'hui dans la capitale malienne sous la protection, dit-on, de l'imam Mahmoud Dicko, un influent religieux salafiste. Tandis que la septuagénaire est recherchée par les forces maliennes chargées de l'appréhender pour « la conduire sous bonne escorte » à... Bamako – où elle se trouve déjà —, celle-ci ne demande qu'une chose, le droit à l'oubli. A. T.