Le président de la CAF Patrice Motsepe est arrivé hier matin à Yaoundé en provenance de Doha où il doit repartir pour assister mercredi à la Super Coupe d'Afrique entre le Raja et le Ahly d'Egypte. Motif de cette «escale» de 48 heures, non prévue dans l'agenda du président de l'instance du football africain, une dernière tentative de persuader les dirigeants camerounais de reporter la CAN-2021 à l'été prochain comme souhaité par le président de la Fifa, Gianni Infantino et les clubs européens. La négociation se poursuit en haut lieu pour décaler la phase finale de la Coupe d'Afrique des nations programmée du 9 janvier au 6 février au Cameroun. L'intervention du patron du football mondial en personne a provoqué un énorme chambardement dans l'agenda des responsables de la CAF dont certains étaient présents à Doha (Qatar) pour assister à la Coupe arabe qui ont dû organiser une réunion informelle par visioconférence avec les autres membres non-invités au tournoi arabe pour discuter de la proposition d'Infantino de renvoyer la CAN-2021 à l'été 2022. Un débat qui a duré plus de cinq heures sans que le «projet» d'Infantino soit retenu par la majorité des membres du Comex de la CAF qui semblaient divisés sur la question du report d'une compétition à 20 jours de son début. Pour autant sans faire véritablement opposition à la proposition du président de la Fifa, mandaté par les puissants clubs européens, les membres du Comité exécutif ont fini par accepter un dernier round de négociation qui aura lieu au Cameroun avec les autorités du pays de Paul Biya. Histoire de ne pas trop se mouiller certainement, les membres de l'instance dirigeante du football en Afrique voudraient bien que la décision d'un éventuel report émane de la partie camerounaise. Comme ça, leur «conscience» serait moins troublée par un acte qui enlève tout crédit à cette organisation qu'est la CAF. Une institution qui dit «oui» à tout ce que décide l'instance faîtière du football international, même si les intérêts du sport-roi africain sont squattés. L'approbation du projet du président de la Fifa de tenir une Coupe du monde chaque deux ans par la CAF en est le parfait exemple. Une telle périodicité nuirait fondamentalement à la tenue de la Coupe d'Afrique tous les 2 ans, comme c'est le cas, à quelques exceptions près, depuis sa création en 1957. Lors de la réunion par visioconférence des membres du Comex/CAF, il n'était plus question des retards enregistrés dans la livraison des stades choisis pour accueillir les 52 rencontres de la phase finale, encore moins de la logistique qui accompagne une telle organisation. Les 21 membres du Comité exécutif de la Confédération africaine (18 membres, le président et ses deux vice-présidents) se sont penchés sur les questions portant sur la capacité du Cameroun à assurer une couverture médicale efficiente lors de ce tournoi, notamment avec l'apparition du variant Omicron qui serait derrière cette menace de report. Selon les échos parvenus au lendemain de cette visioconférence, sur les 18 membres non-présents à Doha où la CAF était représentée par son président Patrice Motsepe, son vice-président Augustin Senghor, 14 ont émis un avis défavorable au report, mais ont souhaité que la décision soit assumée par tout le monde. à savoir que le Cameroun, pays hôte, offre des garanties suffisamment convaincantes s'agissant de l'aspect de la sécurité médicale de tous les acteurs de ce tournoi panafricain. C'est une autre manière de se dédouaner en cas de pépins. Hier, à son arrivée à Yaoundé accompagné de son vice-président sénégalais Senghor, ainsi que le nouveau président de la Fécafoot Samuel Eto'o, le Sud-Africain Motsepe a fait une déclaration pour le moins alambiquée qui a tout l'air d'être une invite aux autorités camerounaises de suivre la voie de la raison. «Le Cameroun est notre espoir, c'est l'espoir de l'Afrique, nous en parlerons demain et vous donnerons le retour. Nous sommes très clairs quant à notre engagement à faire de la CAN un succès au Cameroun», a-t-il souligné devant les médias camerounais qui étaient à son accueil à l'aéroport Yaoundé-Nsimalen. Au propre comme au figuré, M. Motsepe réclame une «compréhension» des risques à tout point de vue qui pourraient traîner le football africain et l'Afrique tout entière dans la boue. Une CAN ratée sur le plan organisationnel aurait des conséquences sur l'image globale d'un continent en difficulté dans tous les domaines mais dont le football et les footballeurs continuent d'illuminer la planète. Une belle leçon de démagogie que Gianni Infantino veut imposer aux Africains pour protéger son projet d'un Mondial biennal qu'il souhaite aussi faire adopter par les Européens en réalisant le vœu de leurs grands clubs. C'est comme ça qu'il faut interpréter la confidence d'Infantino au président de la CAF de ne pas aller vers une compétition sans les Africains d'Europe qui deviendrait un CHAN sans relief et sans intérêt, économiquement parlant. Et puis, le maintien d'une phase finale de la CAN chaque deux ans ferait mal au calendrier que compte mettre en place la Fifa d'Infantino. Un tournoi (de 2021) organisé en 2022 suivi d'un autre en 2023, d'un troisième en 2025 et d'un quatrième en 2027 aura certainement des répercussions sur le Mondial-2026 qu'organiseront les Etats-Unis, le Canada et le Mexique (en présence de 48 pays) mais aussi sur l'éventuelle copie en 2028 (au lieu de 2030) que la Fifa compte attribuer rapidement. Pour un président de la Fifa qui briguera un troisième mandat lors du congrès électif de 2023, il a de beaux projets pour les clubs européens et il ne veut pas que ces derniers soient «dérangés» par de «petits Africains» dont les dirigeants sont souillés par les scandales de corruption et de fraude. C'est pourquoi le combat de «Cameroun-2021» ne peut être mené par les seuls responsables du football africain mais par toute l'Afrique. M. B. Le Maroc et l'Egypte favorables à l'annulation de la CAN ? Ce sont les révélations des médias camerounais qui accusent deux membres de l'exécutif de la CAF, le Marocain Fawzi Lekjaâ et l'égyptien Hani Abou Rida d'être des soutiens inconditionnels à la proposition du président de la Fifa, Gianni Infantino, pour le report et l'annulation de la CAN du Cameroun. Les mêmes sites d'information assurent que le dirigeant marocain a été derrière l'idée de transférer le tournoi africain au Qatar, ce que la majorité des membres du Comex/CAF ont refusé. M. B.