Incontestablement, Abderrazak Mokri, le successeur d'Aboudjerra Soltani à la tête du MSP, se met dans la peau d'un leader en devenir de la mouvance islamiste. S'il se retient de se revendiquer comme un redresseur soft de la trajectoire imprimée au parti par son prédécesseur, il se fait cependant un honneur à situer les points de démarcation. Dans son propos au forum El Bilad , où l'on sent de la mesure et de la prudence calculée, il indique le cap de sa navigation. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) - Les islamistes ne souffrent finalement de la même suffisance. Si Soltani aimait souvent à partir de son rire glauque, pour masquer ses gênes, Abderrazak Mokri semble être parvenu, à force d'exercice et de l'effort sur soi, à se forger l'image d'un politique tranquille. Même s'il est difficile de lui trouver des tendances au compromis politique, il n'en demeure qu'il ose les premiers pas en direction du reste des dirigeants de la sphère islamiste. En direction d'autres personnalités aussi, à l'instar des deux anciens chefs du gouvernement, Ali Benflis et Ahmed Benbitour. Abderrazak Mokri, qui n'invente pas une autre façon de faire de la politique, se présente faussement en novice qui veut apprendre. Il affirme que ses contacts avec Benflis et Benbitour ne sont pas dictés par un quelconque agenda politique, le plus important étant, d'aucuns l'auront deviné, l'élection présidentielle d'avril 2014. Il dément aussi que ses rencontres avec les dirigeants du FLN et du RND procèdent d'une recherche de possibilité d'alliances électorales. D'ailleurs, des deux partis, anciennement alliés du MSP, au Parlement et dans le gouvernement, il n'hésite pas à médire, sans pousser jusqu'à provoquer quelques courroux. Pour lui, ni le FLN, encore moins le RND ne sont des grands partis. Le poids dont ils se revendiquent, tranche-t-il, est le fruit des fraudes électorales successives, à commencer par celle de 1997. Ses espoirs politiques, Mokri les entrevoit dans la banlieue politique du MSP. Aussi ambitionne-t-il d'élargir l'AAV, structurée du temps de Soltani, à d'autres forces de la nébuleuse islamiste. Mokri dit avoir la conviction faite que l'échéance de 2014 est celle de la rupture. Il est vrai qu'il ne prétend pas à une candidature, la sienne propre, assurément pour ne pas se griller, mais il jure que le MSP sera du rendez-vous, quitte à soutenir une candidature qui aura récolté le consensus des partis de la mouvance. Mais avant d'arriver à cela, Mokri estime qu'il faille d'abord éviter la reproduction des scenarii passés, à savoir un choix de candidature par le système et une répartition des tâches et des rôles parmi la classe politique. En tout cas, Mokri pense que si le changement n'intervient pas en 2014, les coûts seront très lourds pour le pays. « Si le rendez-vous est raté, ça sera une catastrophe», prophétise-t-il.