De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari Après la descente sur l'Isère, François Hollande quitte précipitamment le Sommet de Bruxelles. Dans le TGV qui le ramenait vers Paris, il apprend les attentats de Sousse en Tunisie... Dans la capitale européenne, le visage du Président français ne disait rien de bon, la voix nouée par la colère, les mots étaient protocolaires... Il est vrai que les actes de l'Isère sont un tournant majeur dans la doctrine de Daesh. la France fait, désormais, partie d'un ensemble régional à frapper. Au même titre que les autres mécréants musulmans (Syrie, Irak, Tunisie, Algérie, Yémen, Egypte...). Cet étrange sommet des chefs d'Etat et de gouvernement s'enlisait et devait se conclure par des désaccords sur tout (immigration clandestine, dette de la Grèce, quotas pour les clandestins, attitude envers l'affaire de Libye)... Comme si cela ne suffisait pas, l'attentat en Isère s'invite lors de cette rencontre des décideurs européens. François Hollande dépité, visiblement sonné, se présente devant la presse : «je vais quitter le sommet.» Puis les mots et les formules de circonstance, exercice plus protocolaire que significatif. Le Président quitte donc la capitale belgo-européenne, en cours de route vers Paris, il apprendra les attaques terroristes en Tunisie, à Sousse. Que peut l'Union européenne, actuellement, par rapport aux grands dossiers, tous dramatiques, sur le phénomène du terrorisme, la France est, tout le monde le sent, ici, plus exposée que d'autres. De par son histoire coloniale de beaucoup de pays musulmans, sa proximité géographique avec les zones de conflits, la présence sur son territoire d'une grande proportion de citoyens d'obédience musulmane et d'un Front National et de franges de la droite classique, prompts à la provocation, à l'allumage des feux destructeurs et à l'exaspération des tensions. En confondant, sciemment, islam et islamisme, sans papiers et terroristes, clandestins et islamistes, immigration illégale et légale, identité avec chrétienté, les fauteurs de troubles en France, d'un mot, le parti des Le Pen et une partie des «Républicains» peuvent transformer l'Hexagone en poudrière. En plus de ces facteurs endogènes, il y a aussi les raisons exogènes, aussi dangereuses. Parmi eux, le plus important est la diplomatie de Hollande qui joue avec le feu. Soutien des groupes djihadistes en Syrie contre l'Etat républicain, légitime et laïque de Bachar Al-Assad, les accointances avec les grands pourvoyeurs du salafisme armé et idéologique que sont l'Arabie Saoudite et le Qatar. En plus, évidemment, du positionnement aveuglément pro-américain de Paris, sur la Russie essentiellement. Fragilisée au plan économique par une crise sans précédent, reléguée en Europe par l'intransigeance allemande, la France demeure, certes, une puissance qui compte mais aux pieds d'argile. Ce n'est pas un hasard si Daesh a choisi la France pour son premier coup d'éclat en UE. En Isère (région lyonnaise), c'est bien cette organisation qui a frappé. C'est une première en Euroland. Les autres attentats n'étaient pas signés Daesh, pas même celui commis contre Charlie. Pour «Tandhim Eddaoula», la France fait, désormais, partie d'un ensemble régional avec le reste de pays tous musulman (Libye, Syrie, Algérie, Maroc, Yémen, Egypte, Irak, Liban, Mali, Sénégal). C'est une évolution doctrinale importante au sein de cette organisation. Le visage fermé du Président français en quittant Bruxelles laissait entrevoir que Hollande savait, déjà, ce que la descente sur l'Isère signifiait, désormais...