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LES MOTS DU JEUDI
Un A�d et quatre enterrements
Publié dans Le Soir d'Algérie le 27 - 01 - 2005


Par Ma�mar FARAH http://farahblog.tk
Un beau et tendre soleil d'hiver, chassant rapidement les quelques nuages rescap�s de la veille, submerge la plaine d�v�tue et cingl�e par de violents vents froids. A gauche de la petite route r�cemment asphalt�e, le domaine des Mehtali. Tayeb a r�ussi � planter de beaux arbres fruitiers fi�rement debout au milieu de petits lots verdoyants o� poussent quelques l�gumes qui finissent plus souvent dans les couffins des amis que sur les �tals du march� local.
Au printemps dernier, et par une journ�e superbe, nous avons pu appr�cier les produits agricoles de Tayeb, tous �bio� comme on dit aujourd'hui : une galette de bl� dur fra�chement cuite sur un feu de bois, des tomates, du piment et des oignons cueillis sur place, une superbe huile d'olive pour les assaisonner, du petit lait fait maison, du miel de saison d�licieux et transparent. Et au dessert, ce furent les bras de Morph�e qui nous accueillirent tendrement sur l'herbe ti�die par le soleil… Notre visite d'aujourd'hui n'est pas pour Tayeb, mais pour un autre membre de la famille, Mouldi qui vient de perdre un superbe gar�on de 25 ans dans l'embuscade tendue par des terroristes � des �l�ments de l'ANP du c�t� de A�n-Defla. La masure de Mouldi ne paye pas de mine : un cube blanc plant� sur les terres ancestrales, une cour ext�rieure ouverte aux souffles de l'hiver, un vieux tracteur en �tat de ferraille, voil� tout… De grosses flaques d'eau entourent la maisonnette, rendant difficile l'acc�s par la petite piste qui sort de la d�partementale. Notre voiture contourne la petite mare pour se garer � quelques m�tres de l'entr�e, sous le regard malicieux d'un bambin qui joue � cache-cache avec le vent. Le fils du martyr ? Non, me dit-on, Hani n'est pas encore mari�… Pourquoi les enfants de chez moi reviennent souvent dans des cercueils ? Et pourquoi les enterre-t-on au cr�puscule, loin des projecteurs de l'actualit� ? Et si ma tribu dit merci aux gendarmes et aux membres de l'ANP qui accompagnent souvent les cercueils, elle ne comprend pas pourquoi les ministres et les walis font semblant d'ignorer ces morts-l� ! Il y avait trois ministres � Guelma pour une explosion de gaz, et c'est normal, pensons-nous, que le pouvoir d�l�gue ses repr�sentants dans des circonstances aussi douloureuses. Il y avait deux ministres � Chlef pour une autre explosion, dans une cimenterie celle-l�, et c'est tout aussi normal que les membres du gouvernement viennent soutenir les parents des victimes dans de si p�nibles conjonctures. Mais que dire � Mouldi et � sa femme? Et que dire � Kadri et � sa femme ? Oui, eux aussi ont perdu leur enfant dans une autre embuscade � Biskra. Son enterrement a eu lieu le jour m�me o� est tomb� Hani. Deux autres cercueils sont �galement arriv�s chez moi. Deux autres m�mes � la fleur de l'�ge, fauch�s par les balles d'un terrorisme qui ne veut pas mourir, qui ne veut pas entendre parler du pardon, des r�conciliations et de toutes les amnisties. Cela fait quatre cercueils en tout qui sont arriv�s en quelques jours. A vingt heures, la t�l�vision montre des ministres en visite � Chlef. Ils disent leur compassion et leur solidarit� avec les familles des victimes de la cimenterie. Mais que dire � la maman Souad ? Elle qui r�p�te � tout le monde que son enfant est mort en martyr. Qui viendra calmer sa douleur en lui expliquant simplement o� et comment son fils est mort ? Pourquoi les enfants de chez moi reviennent souvent dans des cercueils ? Et pourquoi les enterre-t-on au cr�puscule, loin des projecteurs de l'actualit� ? Chaque fois que des soldats tombent dans une embuscade terroriste, je suis presque certain que des m�mes d'ici sont au nombre des victimes. Une explication : la pauvret�, terrible r�alit� qui colle � la peau de ces r�gions d�sh�rit�es, pousse les jeunes � s'engager dans l'arm�e, � d�faut d'autre chose. Il n'y a pas une seule famille qui ne compte pas de djoundi. Jadis, on pouvait les voir arborer leurs belles et �clatantes tenues � l'occasion des f�tes qui les ramenaient chez nous, comme les hirondelles du printemps. Mais, depuis la flamb�e terroriste, ils viennent en civil, cach�s, presque �clandestins�… Certains n'ont pas pu aller jusqu'au bout du voyage, descendus froidement ou �gorg�s sauvagement dans les faux barrages. Souad a fait un cauchemar le jour m�me de la mort de son gosse. Presque � la m�me heure, dit-elle, en retenant un sanglot :
- "J'ai sursaut�, tremp�e de sueurs et j'ai r�veill� Mouldi… J'�tais stress�e depuis que le portable de Hani ne r�pondait plus. L'appareil �tait peut-�tre jet� sous les fourr�s, l�-bas dans les montagnes de A�n-Defla… Il �tait peut-�tre d�j� mort au moment o� je l'appelais… Cette sonnerie qui n'en finissait pas, c'�tait un autre cauchemar, mais j'�tais �veill�e cette fois-ci… C'est l'A�d le plus triste de ma vie."
Elle me tend une tasse de caf� chaud que sa fille vient de ramener de la cuisine. Elle me montre la jeune femme :
- "Elle a un dipl�me de l'universit�, mais il ne lui sert � rien ! Le travail, c'est pour les enfants pistonn�s et les riches".
La fille, silencieuse, s'assied sur le canap�, tout pr�s du po�le � mazout qui renfle depuis plusieurs jours, avalant une quantit� consid�rable de fuel, ce pr�cieux liquide utilis� pour le chauffage domestique dans les campagnes, ce liquide que les nouveaux politiques, partisans d'un lib�ralisme outrancier, viennent de rendre encore plus co�teux, donc inaccessible aux bourses modestes ! Dans le petit et modeste salon au sol recouvert de tapis authentiques, tiss�s par les braves femmes chaouies, il y la grand-m�re de Hani et une autre parente. Je m'inqui�te :
- Mais o� est Mouldi ?
- Il est au cimeti�re. Pour s'occuper de la tombe…
Souad ne termine pas sa phrase. Elle est secou�e par un nouveau sanglot. Puis elle se ressaisit et poursuit :
- "Je lui ai parl� le mardi, quelques heures avant sa mort. J'entendais un bruit qui pouvait �tre celui d'un moteur de camion. Je lui ai demand� : vous �tes hors de la caserne, dans la montagne ? Hani voulait me rassurer : non, maman, je suis en ville. Mais moi, je suis s�re qu'il �tait dans le maquis, l� o� des terroristes cach�s allaient mettre fin � sa vie quelques heures plus tard".
Pourquoi les enfants de chez moi reviennent souvent dans des cercueils ? Et pourquoi les enterre-t-on au cr�puscule, loin des projecteurs de l'actualit� ? Qui a tu� Hani ? Un m�me qui a peut-�tre le m�me �ge et dont le cercueil ira un jour arracher des sanglots � une autre maman, sous les m�mes rafales du vent hivernal, dans une masure aussi d�pouill�e, dans une autre r�gion pauvre de cette Alg�rie profonde, �cras�e par le poids du capitalisme new-look et qui meurt en silence, loin des discours emphatiques et des clignotants teint�s de vert. Mais cette soudaine richesse profite � qui ? En tout cas pas � cette Alg�rie profonde qui pleure encore les morts hors d�lais d'une guerre surr�aliste et oubli�e. Ces cercueils anonymes qui circulent dans des ambulances banalis�es � la tomb�e de la nuit sont minutieusement cach�s aux cam�ras �professionnelles�, fourvoy�es dans l'apologie et le dithyrambe. Et la t�l�vision, qui pr�sente toujours ses excuses en retard, le fera certainement un jour vis-�-vis de ces familles d�munies qui produisent en s�rie des h�ros pour l'Alg�rie… Depuis la p�riode coloniale et jusqu'� aujourd'hui. Jusqu'� demain… Sur la route du retour, je cherche Mouldi dans le cimeti�re. L�-bas, une ombre courb�e sur une tombe. Dans le soir qui descend doucement sur les collines environnantes, la silhouette immobile de Mouldi ressemble � une statue d'airain fig�e dans une pose immortelle. Non, inutile de le d�ranger dans ce moment de profond recueillement. Je le laisse � sa douleur, dans cette intimit� qui le lie encore � son enfant, Hani, un h�ros alg�rien oubli� par les autorit�s et la presse. Un num�ro dans les communiqu�s laconiques. Le soleil s'effondre de l'autre c�t� des collines. La nuit et le froid s'installent de nouveau, alors que le vent reprend sa litanie � travers ce long corridor qui va des altitudes de Tiffech aux montagnes rocheuses de Oued Keb�rit.
M. F.
P.S. : Hier, quand nous parlions du mouvement citoyen kabyle, de la plate-forme d'El Qseur et de Bela�d Abrika, nous �tions "manipul�s" par la "main de l'�tranger", larguant de "l'huile sur le feu". Ceux qui nous taxaient ainsi traitaient Abrika et les arouch de tous les noms ! Finalement, nous avions raison et ils avaient tort. Benchicou et Le Matin avaient raison et la t�l�vision avait tort ! Nous avions raison de nous inqui�ter de la r�cente augmentation des produits �nerg�tiques. Des �meutes ont �clat� comme pour signifier aux autorit�s et aux d�put�s qu'ils se sont lourdement tromp�s ! Ils avaient tort, mais un jour ils le reconna�tront… Nous avions raison de traiter certains barons de "voleurs", eux qui piquent tout, jusqu'aux terres du domaine symbole de la Trappe, arrach�es � Borgeaud par le sang et les larmes. Que penserait le chahid Bouchaoui — qui a donn� son nom � cette ferme mythique — de ce qu'un confr�re appelle "le d�pe�age de l'Alg�rie fonci�re" ?


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