Rien ne va plus pour Mohammed VI. Décidé à démonter de toutes pièces les entraves au processus de décolonisation du Sahara occidental, le Secrétaire général des Nations-Unies a décidé de réagir très fermement aux manœuvres marocaines en exigeant des autorités de ce pays de s'assurer du respect de l'ONU dans ce pays. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Le communiqué publié hier par les Nations-Unies fait même état d'une grande colère de Ban Ki-moon au lendemain de l'organisation d'une marche à Rabat en réaction aux propos qu'il a tenus lors de sa dernière visite à Alger et dans les camps de réfugiés sahraouis. A l'issue de sa tournée il avait, on s'en souvient, exprimé sa volonté d'œuvrer pour relancer les négociations entre le Front Polisario et les autorités marocaines en vue de parvenir à l'organisation d'un référendum d'autodétermination jusque-là impossible à tenir en raison des blocages de la partie marocaine. M. Ban Ki-moon avait également affirmé avoir été «sensible à la situation des réfugiés» et des conditions humanitaires dans lesquelles ils se trouvent, appelant la communauté internationale à redoubler d'efforts pour offrir aux Sahraouis une vie plus décente. L'attitude du premier responsable de l'ONU a très fortement déplu au royaume. Mohammed VI, qui avait refusé de recevoir Ban Ki-moon sous prétexte d'un déplacement et qui avait surtout refusé de délivrer une autorisation d'atterrissage à l'avion devant également le transporter à El-Ayoun, a violemment réagi, accusant le Secrétaire général des Nations-Unies d'avoir fait preuve de partialité. Plus grave, il a officiellement fermé la porte à la tentative de relance des pourparlers entre les deux parties, imputant cet échec à l'attitude de l'ONU. Pour enfoncer davantage le clou, Mohammed VI a donc organisé cette fameuse marche, dimanche à Rabat, pour dénoncer le «manque de neutralité» de Ban Ki-moon. Le roi a en outre dépêché son ministre des Affaires étrangères à New-York pour lui remettre une lettre de protestation. Et c'est justement à l'issue de cette rencontre qu'un communiqué a été publié pour faire état de la «colère» du Secrétaire général de l'ONU après les attaques verbales contre sa personne. Les propos des autorités marocaines ont été qualifiés «d'irrespectueux» envers l'ONU. Ban Ki-moon a, d'autre part, exprimé sa «profonde déception» et son «étonnement» suite à la marche de Rabat dirigée contre sa personne. «De telles attaques sont irrespectueuses envers les Nations-Unies et son Secrétaire général», ajoute le communiqué qui s'étonne, enfin, de la présence de membres du gouvernement marocain au sein de cette manifestation. Selon la même source, des propos très réprobateurs ont été tenus à l'encontre de l'envoyé spécial de Mohammed VI, sommé de maintenir le respect des Nations-Unies au Maroc. Rabat a été, par ailleurs, accusé d'avoir présenté de manière « délibérément erronée» les objectifs de son déplacement dans la région. Enfin, un nouvel appel à la reprise des négociations «sans conditions préalables» avec le Front Polisario a été lancé dans l'objectif de parvenir à des «progrès aussi vite que possible». Cette nouvelle évolution dans le dossier du Sahara occidental marque un tournant inédit dans l'histoire d'un Maroc dénudé et acculé comme il ne l'a encore jamais été. Mis au pied du mur par la communauté internationale qui a réagi y compris en annulant des contrats économiques qui pesaient lourds dans les caisses marocaines, Mohammed VI semble aujourd'hui faire le prix de sa politique un peu partout à travers le monde. En récent déplacement à Moscou, connu pour sa position en faveur de l'indépendance du Sahara Occidental, le roi a reçu un accueil glacial des autorités russes lesquelles ont dépêché uniquement un adjoint de Lavrov, leur ministre des Affaires étrangères, pour le recevoir. Habituellement, l'accueil des chefs d'Etat est assuré par un adjoint de Vladimir Poutine. Mohammed VI n'a pas eu droit non plus au traditionnel bouquet de fleurs et encore moins à la présence d'ambassadeurs arabes. Seuls quelques membres de la diplomatie de pays africains ont été invités par le protocole russe à assister à l'arrivée du roi, qui doit à présent déployer des sommes d'imagination pour redorer son blason.