C�est comme un marronnier, �a revient � dates fixes. Chaque fois que l��lection pr�sidentielle approche, on s�en prend � la presse. Un bouc �missaire du tonnerre. Une cible propitiatoire sur mesure ! On ne pourrait inventer mieux. �a a �t� le cas en 1999. �a l�a �t� davantage en 2004 avec m�me un pic de tension : l�incarc�ration de Mohamed Benchicou. Et, une fois de plus, �a le redevient. Nedjar Hadj Daoud, directeur de l�hebdomadaire El Waha, est arr�t� dans son bureau. Il est jet� en prison depuis le 2 mars. On convoque � tour de bras les directeurs de journaux ind�pendants pour r�pondre de soi-disant affaires de diffamation devant des� commissaires de police. Omar Belhouchet, Fouad Boughanem, Nacer Belhadjoudja et d�autres sont gentiment invit�s � s�expliquer devant des pandores. Ils d�clinent gentiment l�invitation. Et ils ont raison, parole ! Franchement ! Un commissaire de police traitant un d�lit de presse ? Sombre gag ! Hormis le fait que seule la justice puisse d�cider de la constitution d'un d�lit, voil� une fa�on rapide de d�tourner les forces de police de leurs missions et d�ajouter � leur impopularit�. On le voudrait sciemment qu�on ne parviendrait pas � une telle perfection. Mais que souhaitent-ils donc pour nous refaire chaque fois les m�mes coups ? C�est cousu de fil blanc, bien s�r. L�intention est nette comme le r�sultat futur de l��lection du 9 avril. Il s�agit d�intimider la presse ind�pendante, du moins celle qui continue � tenir l��chine verticale, pour atti�dir son opposition � l�autocratie en construction et, dans le m�me mouvement, se poser en victimes de diffamation. L� aussi, il y a du risible ! Comment un pouvoir qui parle seul, qui agit seul sans rendre compte � personne, qui privatise � son profit exclusif les m�dias publics, peut-il se poser en victime ? C�est la prouesse que l�Alg�rie r�alise sans coup f�rir. Si les puissants du moment font du pays ce qu�ils veulent, au m�pris de son peuple, ils sont aussi les premiers � se plaindre. Premier � frapper, premier � g�mir! Personne de sens� n�irait jusqu'� attendre d�eux un peu de hachma. C�est trop gros ? Peu leur chaut. D�ailleurs, on remarquera, au passage, qu�il y a des r�currences propres aux �lections et que, cette fois, elles sont bien r�unies. Inqui�ter les journalistes en est une. On ne la cache pas. Demander la repentance � la France ? Excellent moyen de faire vibrer la fibre. On s�y emploie aussi. Taper sur l�opposition ? On ne n�glige pas cet aspect, non plus. La totale, quoi. En l�occurrence, l�opposition a des chances de gagner sans se mouiller. Le r�gime est tellement impopulaire que l�abstention, � laquelle l�opposition appelle, risque d��tre �crasante. Moins par mobilisation autour d�un mot d�ordre que par une sorte de geste exc�d� de gens qui en ont assez de se sentir men�s en bateau. Alors pour dire ��a suffit�, ils ne vont pas crier dans la rue car on les accueille � coups de matraque. Ils ne vont pas le clamer en ch�ur avec les partis politiques car pour diverses raisons, certaines inh�rentes aux partis eux-m�mes et d�autres dues au verrouillage men� de main de ma�tre, on n�y croit plus vraiment. Du coup, il ne reste que ce geste simple : ne pas glisser le bulletin dans l�urne. Ignorer la mascarade. Dire ceci : puisque vous jouez selon les r�gles que vous avez �dict�es, eh bien, ce sera sans nous ! Heureusement, il reste cette possibilit� d�exprimer sa position ! C�est parce que ce refus grognon de la farce est dangereux que Belkhadem, l��me damn�e du r�gime, le putching-ball sur lequel on tape sans vergogne lorsque porter ses critiques sur Bouteflika peut occasionner des tr�buchements dans la carri�re, vaque � le d�noncer. Il est vrai que Belkhadem les m�rite souvent, voire toujours, ces diatribes que les siennes provoquent en retour. Mais m�me s�il tient son r�le de p�le de diversion, parfois il est plus juste de s�en prendre au seigneur qu�� ses saints, surtout lorsqu�ils sont silicon�s. Il y a des attaques qui ne planent pas mais qui, au fond, sont de bonne guerre. Si l��lection pr�sidentielle, ��v�nement majeur� � en croire un confr�re qui en a pourtant vu d�autres, ne prend pas les allures d�un sacre imp�rial, ce n�est pas � cause de la couture : un autoritarisme qui s�installe dans la g�rontocratie, tu parles d�un avenir pour le pays ! Si la f�te est troubl�e, les fautifs, ce sont les abstentionnistes. C�est lui, monsieur ! Ce sont eux, les coupables. Ils ne remplissent pas leur devoir citoyen. Ils d�m�ritent de la patrie. Inutile de perdre son temps � r�p�ter ce qu�ils ne veulent pas entendre, l�-haut : l�abstention est une position politique. On ne va pas voter parce qu�on ne croit pas � la loyaut� du scrutin, en amont comme en aval. Il faut vraiment �tre mauvais public pour ne pas appr�cier le comique de pr�senter Bouteflika comme candidat ind�pendant. Il n�est que de voir qui est en comp�tition contre lui pour mesurer � quel point on nous prend, nous, mauvais citoyens qui doutons, pour des canards sauvages ! Les vieilles marmites font les bonnes soupes, diton ! Oui, c�est pourquoi on nous ressort toujours les m�mes recettes ! C�est du tout cuit ! Faut dire qu�avec cette cuisine-l�, on n�est pas dans la politique, ou plut�t dans le politique. On est dans une sorte de morale de quartier. T�as envie de leur dire : un peu de pudeur, le monde nous observe ! Mais m�me le monde, ils s�en tamponnent !