Selon Dalil Boubakeur, l'inamovible recteur de la Mosqu�e de Paris, il n'est fait mention nulle part dans l'Islam de l'obligation pour une femme de porter le voile int�gral. Il avait dit aussi, il y a quelques ann�es, que le voile (hidjab) �tait une obligation religieuse. Il �tait dans son tort, nagu�re, en validant une affirmation qui fait encore d�bat et qui est source de probl�mes. Il a encore moins raison, aujourd'hui, en lan�ant une �vidence, plut�t per�ue comme un soutien � Nicolas Sarkozy. Ce en quoi il n'a pas enti�rement tort, parce que sans Sarkozy et quelques supporters alg�riens par n�cessit�, Boubakeur aurait bu la tasse. Il a �chapp� provisoirement � la noyade, mais il est astreint � boire le fond du calice. Alors, il s'est enferm� dans sa tour et il convoque un conclave chaque fois que ses avis �autoris�s � sont sollicit�s en haut lieu. Ce n'est qu'apr�s m�re r�flexion et d�bats approfondis avec ses conseillers connus comme experts en th�ologie qu'il se prononce. C'est ce qu'il aurait d� faire, me direz-vous, lorsqu'il a accord� la fameuse et doucereuse interview � une revue touristique isra�lienne, mais que voulez-vous, la profession a ses contraintes. Il a bien publi� un d�menti, par la suite, affirmant qu'on avait abus� de sa bonne foi, mais le mal �tait fait. L� encore, Dalil Boubakeur avait tous les torts de son c�t�, sans compter ceux qui riaient jaune. La communaut� alg�rienne de France l'a bruyamment rappel� � ses devoirs, mais l'�tat alg�rien, qui finance la mosqu�e, n'a rien entendu. Ou plut�t, l'�tat fait la sourde oreille et il nous en donne la raison : il a d�j� assez de difficult�s � trouver des candidats � degr� z�ro de comp�tence pour remplacer ses mauvais ministres actuels. De l�, � songer s�rieusement au remplacement du recteur de la prestigieuse Mosqu�e de Paris. Il est �vident, en l'�tat actuel des choses, qu'il va �tre difficile de trouver un candidat qui aurait l'assentiment de Sarkozy sans susciter l'ire de Bouteflika. � moins qu'en d�pit de toutes ces f�cheries, l'on s'achemine vers une entente � torts partag�s. Depuis longtemps, le recteur de la Mosqu�e de Paris a eu tout le loisir de m�diter sur la port�e de la devise de la capitale fran�aise : �fluctuat nec mergitur !� Mais cette devise �tait valable il y a bien longtemps, bien avant l'invention des torpilles, sous-marines bien s�r. Si la �burka� fait d�bat et source de tracas en France, o� l'on n'a pas encore compris qu'il y a un Islam d'hier et un Islam d'aujourd'hui, dans les villes, la question est diff�rente de ce c�t�-ci. La soumission (on parle des femmes ici) aux r�gles de l'identit� biom�trique est diff�r�e et soumise � la r�flexion le temps de la d�livrance des nouveaux documents. A en croire, cependant, les d�clarations de Aboudjerra Soltani, il n'y a plus de probl�me de �khimar� en la demeure. C'est jur� : on n'obligera pas nos femmes � montrer les oreilles, source de plaisirs licites(1), pour les photos d'identit�. Elles pourront donc garder le �khimar� sans risquer de d�sob�ir aux m�les injonctions, et subs�quemment, � Dieu. L'�tat a donc recul�, comme le laisse entendre M. Soltani. Et l'�tat, en l'occurrence, n'a pas tort de reculer, surtout qu'il ne le fait pas pour mieux sauter. Un �tat s�rieux se doit � ses citoyens, aussi peu consid�r�s qu'ils soient, et dans un �tat s�rieux, on ne saute pas lorsqu'on est au bord de l'ab�me(2). En parlant de notre ami Aboudjerra Soltani qui serait, m'a-t-on dit, sp�cialiste de la �rokia�, j'apprends dans les colonnes du magazine El- Khabar Hebdo que l'�quipe nationale de football aurait fait l'acquisition d'un sp�cialiste en la mati�re. Cet exorciste newlook suivrait nos joueurs dans tous leurs d�placements et jusque dans leurs chambres d'h�tel. Il veillerait � ce que nul sortil�ge ou grigri ne soient dissimul�s sous leurs oreillers ou leurs matelas. Ce �rokiyiste�, si on peut l'appeler ainsi, pratique toutefois une forme de �rokia� inusit�e : la pr�ventive. Il se charge, par exemple, de d�contaminer les endroits et sites suspect�s de contenir des mal�fices plac�s par des jaloux de Sa�dane(3), ou des adversaires de l'�quipe. C'est justement contre cette forme de �rokia� pr�ventive que s'insurge le chroniqueur religieux de l'hebdomadaire, Abdelghani Gacem. S'exprimant en expert, il affirme que la �rokia� ne doit �tre pratiqu�e que sur des personnes atteintes par un sort ou un enchantement. Autrement dit, le �th�rapeute� peut pratiquer son art, � la rigueur, mais jamais sur de corps sains. Il doit attendre que le diable ait pris possession du corps d'un joueur pour tenter de l'en d�loger. Le chroniqueur salue la pi�t� des joueurs qui font souvent la pri�re sous le regard des cam�ras de la t�l�vision. Mais il s'�tonne de voir des journaux sportifs annoncer le plus s�rieusement du monde que les joueurs de l'�quipe nationale ont subi la �rokia� et sont tous en bonne sant�. Ce n'est plus le cas du d�funt Abdelkader Djeghloul(4) qui a mang� nagu�re son pain noir et qui vient de nous quitter, alors qu'il pensait qu'il en avait fini avec les travers�es du d�sert. Seulement, on ne peut pas se contenter de dire : paix � son �me et d'ignorer les circonstances de son d�c�s. Or, le tr�s inform� quotidien Al-Nahar-Al- Djadid nous a appris samedi, jour de l'enterrement de Abdelkader Djeghloul, que ce dernier aurait �t� victime d'un charlatan marocain bien connu. Souffrant d'une grave maladie et devant l'�chec des th�rapies classiques, il se serait rendu au Maroc pour solliciter les soins d'un gu�risseur-herboriste. Ce dernier lui aurait prescrit une mixture de plantes qui aurait provoqu� une subite d�t�rioration de son �tat, suivie de son d�c�s, pr�cise le quotidien. Al-Nahar-Al-Djadid interpelle les autorit�s marocaines afin qu'elles d�clenchent une enqu�te sur les circonstances de ce d�c�s. Il aurait sans doute fallu interpeller aussi les soci�t�s qui croient encore aux rem�des miraculeux, l� o� la science a �chou�. Histoire de ne pas stigmatiser uniquement le Maroc : nous avons aussi nos charlatans, � tous les niveaux, et ils ont leur client�le qui se recrute souvent dans les plus hautes sph�res. Le Maroc a sans doute le tort de laisser se d�velopper une forme de m�decine traditionnelle mais nocive. Que faisons- nous en Alg�rie pour lutter contre la pratique ill�gale d'une certaine m�decine devenue intouchable, parce que rev�tue du sceau du Proph�te ? Qui est le plus � bl�mer : le caricaturiste danois qui ne conna�t rien de l'Islam ou le th�ologien charlatan qui affirme poss�der le rem�de contre le cancer ou qui pr�tend le gu�rir � distance ? A. H. (1) C'est du moins ce que nous ont appris jadis nos professeurs de th�ologie. Si ce n'est plus le cas, notre g�n�ration a l'excuse de l'ignorance : elle a appris l'Islam au temps de la Djahilia. Bien avant l'arriv�e des �veilleurs providentiels charg�s de notre r��ducation religieuse. (2) C'est la phobie du �grand pas en avant�, au bord d'un pr�cipice, qui nous a toujours emp�ch�s de sauter des �cueils, devenus infranchissables d�sormais, pour les cinq ou six g�n�rations � venir. � moins d'une r�volution qui ne serait pas celle de M. Aboudjerra Soltani, bien entendu. (3) Cela dit, l'entra�neur de l'�quipe �gyptienne, Chehata, ne se d�placerait pas sans la compagnie d'un imam-exorciseur. Reste � savoir qui de Sa�dane et de Chehata est tomb� le premier sous l'emprise d'un exorciste. (4) Je dois � sa sagacit�, d'avoir �chapp� � la publication d'un plagiat manifeste, alors que j'�tais responsable d'un hebdomadaire, aujourd'hui disparu.