Adolfo Kaminsky est l'un plus grands photographes du monde mais surtout le plus grand faussaire encore en vie. A 94 ans, le musée d'art et d'histoire du judaïsme, à Paris lui rend hommage, l'Algérie lui a déjà rendu des hommages. Retour sur l'histoire d'un grand homme qu'on a eu comme professeur de photographie. On est en 1976. On est une dizaine de jeunes à nous retrouver trois par semaine dans une petite salle de l'institut Goethe à Alger pour prendre des cours de photographie. Le professeur barbu était très sympathique et faisait tout pour nous donner tous les secrets de la photographie. Le modeste artiste avec lequel on a passé presque deux années, ne parlait pas de son parcours mais de photographie. A la fin de l'année, lors de la cérémonie de fin d'année de l'institut culturel allemand, le photographe barbu nous avait remis des prix où il avait signé de son nom Adolfo Kaminsky. Des années plus tard, on avait appris que cet homme barbu qui nous donnait des cours dans la chambre noire de l'institut était l'un des plus grands photographes du monde et un grand militant qui avait travaillé pour plusieurs pays en guerre dont l'Algérie. Un bon professeur Dans la petite salle de l'institut Goethe, la discussion ne tournait qu'autour de la photographie. Houda, Mimi et tous les élèves de la classe n'avaient pas de temps à perdre. Ils tenaient à profiter des connaissances du grand photographe qui tenait à ne garder aucun secret pour lui. C'est avec lui qu'on a appris que les produits (fixateur, révélateur) pouvaient être utilisés à d'autres fins notamment pour la récolte de l'argent comme le faisaient les photographes d'autrefois. Au fait durant les deux sessions de stage qu'on avait passées auprès de lui, il n'avait parlé qu'une seule ou deux fois de lui-même, lorsqu'il nous avait dit que durant la guerre de libération, il trafiquait les pièces d'identité et les passe port pour les militants algériens qui étaient en guerre contre la France et qu'il fut directeur photo de plusieurs. Adolfo Kaminsky dont les parents étaient des juifs russes n'avait jamais parlé de son origine ni de sa religion. L'homme semble savoir depuis sa naissance à Buenos Aires en Argentine, qu'il aura comme vraie patrie le monde et comme frères, les opprimés de toute la terre. Pour les défendre et les aider, il ne leur demande jamais d'où ils sont. Arrivé avec sa famille à Paris en 1932, il se retrouvera quelques années après comme résistant contre les Nazis de Hitler en mettant son savoir faire de trafiquant de papier. Sauver des vies En fabriquant de faux papiers, il sauvera des centaines de personnes notamment des juifs que devaient exécuter les soldats Nazis. Après la guerre, les services secrets français le recrutent mais il quitte son poste pour ne pas combattre les vietnamiens. Après la guerre, alors qu'il pouvait être officiellement être honoré par des titres comme la légion d'honneur, il prefere rester dans la clandestinité et continuer à militer en fabriquant de faux papiers. Même s'il a aidé beaucoup de juifs à rejoindre la Palestine entre 1946 et 1948, il rejoindra à la fin des années 1950 le réseau Jeanson et Curiel, qui soutenaient le FLN en France. Après l'indépendance de l'Algérie, l'infatigable militant et artiste photographe portera son aide aux mouvements de libération d'Amérique latine dont l'Argentine, le Brésil, le Chili et le Nicaragua ainsi que ceux d'Afrique tels que l'Angola et l'Afrique du Sud. Il aidera aussi les militants portugais et ceux d'Espagne et ceux de Grèce. Il fabriquera aussi de fausses pièces d'identité aux déserteurs américains qui ne voulaient pas faire la guerre au Vietnam. Ayant passé une dizaine d'années en Algérie de 1971 à 1981, Adolfo Kaminsky cet homme discret qui a combattu les pays qui colonisent les autres pays a passé sa vie en clandestin pour aider des pays à se libérer. «Je ne dirais jamais tout» Toutefois, on ne sait pas s'il a fabriqué de faux papiers pour les militants de Septembre noir qui luttaient pour libérer la Palestine. Dans une déclaration, il a avait dit qu'il ne pourrait jamais tout raconter. On le comprend, le militant ne peut pas tout dire s'il a aidé certains contre les siens. En aidant les militants ayant combattu Israel tels que Mohamed Boudia, Adolfo Kaminsky auquel une exposition lui est dédiée au musée d'art et d'histoire du judaïsme à Paris aurait terminé, à 94 ans, une vie de vrai homme du monde ayant passé un parcours exceptionnel pour la paix et l'élimination des frontières entre les pays. Sa fille Sarah, née à Sidi M'hammed à Alger vit en France où elle est comédienne et écrivain. Elle lui a consacré un livre intitulé Adolfo Kaminsky, une vie de faussaire (éditions Calmann-Lévy). Enfin, ce professeur de photographie qu'on a connu à l'institut Goethe reste un grand artiste, un grand militant.