La Russie et l'Union européenne doivent coopérer afin de stabiliser la situation en Ukraine, a estimé hier le chef de la diplomatie luxembourgeoise Jean Asselborn en visite à Moscou. «Je suis heureux que notre coopération se développe de façon très dynamique dans le cadre de discussions sur l'Ukraine», a déclaré le ministre lors de négociations avec son homologue russe Sergueï Lavrov. M. Asselborn a particulièrement insisté sur d'étroits liens historiques entre la Russie et l'Ukraine. «La Russie doit coopérer avec l'Union européenne pour essayer de désamorcer ce conflit», a-t-il indiqué, ajoutant que, de son côté, l'UE était elle aussi intéressée à intensifier sa coopération avec Moscou pour aider l'Ukraine à revenir à la normale. Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a également demandé à la Russie de soutenir l'Ukraine. «Tout le monde doit aider l'Ukraine à s'en sortir», a affirmé le chef du Quai d'Orsay tout en soulignant que le FMI devait se pencher sur le cas ukrainien. «L'Europe peut aider, mais elle ne peut aider que si le FMI lui-même aide, et il serait normal que l'ensemble des partenaires, y compris la Russie, puissent aider». Puis le ministre français a souligné l'idée d'une conférence internationale des potentiels donateurs : «Cela suppose des réformes, et ce n'est pas facile, il y a notamment la question du tarif du gaz». Dans ce contexte, Moscou a estimé hier que l'élection présidentielle en Ukraine ne devrait pas se dérouler en mai prochain, mais après la réforme constitutionnelle prévue en septembre, a déclaré hier le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov lors d'une conférence de presse. «L'accord du 21 février [entre le président Viktor Ianoukovitch et les chefs de file de l'opposition] stipule que cette réforme pourrait être effectuée d'ici septembre prochain. C'est seulement après - et le document le souligne - que l'élection présidentielle devrait avoir lieu. Pour le moment, nous avons entendu de la part de ceux qui adoptent aujourd'hui des lois à la Rada suprême (parlement) que l'élection présidentielle se déroulerait le 25 mai. Il s'agit là d'un renoncement aux ententes conclues», a indiqué le chef de la diplomatie russe. Samedi 22 février, au mépris des ententes entre les chefs de file de l'opposition et le président Viktor Ianoukovitch et sans attendre que ce dernier signe une loi autorisant la réforme constitutionnelle en Ukraine, la Rada suprême a modifié la Constitution, limogé certains ministres et fixé l'élection présidentielle au 25 mai. Les députés ont également confié les pouvoirs de chef de l'Etat au président de la Rada suprême, Alexandre Tourtchinov. «Nous sommes d'accord (...) sur le fait qu'il est dangereux et contre-productif de forcer l'Ukraine à un choix entre ‘'soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre nous''», a déclaré M. Lavrov. «Nous avons intérêt à ce que l'Ukraine fasse partie de la grande famille européenne dans tous les sens du terme», a-t-il ajouté, à l'issue d'une rencontre avec son homologue luxembourgeois Jean Asselborn. Il a par ailleurs souligné que la Russie ne souhaitait pas intervenir dans les affaires du pays. «Nous avons confirmé notre position de principe qui est de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures», a-t-il dit. «Nous espérons que tout le monde s'en tiendra à la même logique et utilisera ses contacts avec les diverses forces politiques en Ukraine pour permettre d'apaiser la situation et ne pas tenter de tirer certains profits à une étape où l'on a besoin d'un dialogue national et pour que la situation rentre dans le cadre légal», a-t-il poursuivi. Une violation du droit «La mise en application de l'interdiction des chaînes de télévision russes en Ukraine serait une violation grave des normes internationales», a déclaré par ailleurs le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov lors d'une conférence de presse à l'issue de négociations avec son homologue luxembourgeois Jean Asselborn. «Ce qui se passe autour des médias est également inquiétant. Nous sommes au courant des initiatives appelant à priver d'antenne les compagnies des pays non signataires de la convention européenne sur la diffusion [transfrontalière]. La Russie n'est pas membre de cette convention, ce qui ne nous empêche pas de diffuser en Europe et dans tous les pays de l'UE. Si une telle décision [interdisant la diffusion en Ukraine] était adoptée, il s'agirait d'une violation de la liberté d'expression», a indiqué le ministre russe. Plus tôt dans la journée d'hier, les médias ont rapporté que le leader du parti ukrainien Svoboda (Liberté) Oleg Tiagnibok avait proposé à la Rada suprême (parlement) d'interdire en Ukraine les chaînes russes «déformant l'image» de la situation en Ukraine.