Après les rapports accablants des organisations civiles internationales pour le Maroc, le Parlement européen se préoccupe de la situation des droits de l'homme dans l'ancienne colonie espagnole. La mission de la Minurso bloquée par le jeu d'intérêt de certaines puissances ayant de gros intérêts avec le royaume alaouite. Le Parlement européen a une nouvelle fois pointé Rabat du doigt, cette fin de semaine, pour les violations répétées des droits de l'homme au Sahara occidental. Tortures, arrestations systématiques des militants indépendantistes dans l'ensemble des autres villes sahraouies soumises à un strict Etat de siège, pressions et menaces des gendarmes marocains sur les jeunes Sahraouis pour les obliger à émigrer aux Canaries au moyen d'embarcations de fortune, refoulement des élus et des membres des organisations humanitaires et civiles à l'aéroport d'Al Ayoun, ce sont là des constats que la délégation de députés européens a pu relever au cours de son récent déplacement dans l'ancienne colonie espagnole. Faut-il rappeler que les parlementaires européens ont su attendre trois années avant de se faire délivrer le visa par les autorités marocaines. Sur place, ils ont constaté la dure réalité des droits de l'homme dans ce territoire que l'ancienne puissance coloniale a abandonné pour le Maroc qui l'occupe depuis 1975. Plusieurs rapports, une seule conclusion Le Parlement européen vient de faire le même constat que la plupart des organisations humanitaires, Human Rights Watch notamment, qui ont pu, elles aussi, après des années de démarches infructueuses auprès de l'administration marocaine, se rendre à Al Ayoun et dans certaines localités sahraouies. Tous les rapports, successifs, très accablants pour le Maroc, celui du Haut commissariat de l'ONU (HCR), il y a 3 ans, celui du HRW, il y a trois mois, et enfin celui que vient de publier le Parlement européen parlent de violations des droits de l'homme au Sahara occidental. Mieux, les députés européens ont insisté sur le respect du droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. La nouveauté, cette fois, c'est la mesure pratique que viennent d'exiger les eurodéputés, qui ne se limitent pas au constat, mais à demander que les Sahraouis soient protégés. Il est demandé donc aux Nations unies de renforcer la mission de la Minurso, institution créée après les accords de Houston de 1991 pour la supervision du cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario et la tenue d'un référendum d'autodétermination. Concrètement, de lui donner les moyens d'observer de près la situation des droits de l'homme dans l'ancienne colonie espagnole, autrement dit que le petit groupe de «Casques bleus» ne soit pas confiné dans une zone, mais d'être partout sur le terrain, au voisinage des Sahraouis. L'ONU en a-t-elle les moyens ? Le nombre d'observateurs qu'il faut ? La volonté politique existe-elle chez les amis du Maroc, la France et l'Espagne de Zapatero, pour faire valoir les principes, les droits de l'homme, dont ils en font les axes majeurs de leur politique étrangère ? C'est à cette somme de questions qu'il faut apporter des réponses, sans quoi la crédibilité de l'ONU elle-même resterait en question, et sa mission toujours contrariée. Plusieurs rapports et une seule conclusion : violation permanente des droits de l'homme au Sahara occidental. Madrid et Paris «veillent», elles, sur l'ami marocain. Madrid et Paris «dans l'ombre» Bernardino León Gross, ancien diplomate à l'ambassade d'Espagne à Alger, aujourd'hui secrétaire général de la Présidence du gouvernement espagnol, après avoir été secrétaire d'Etat espagnol aux Affaires étrangères, a plaidé, en juin 2005 à Rabat, pour que la Minurso puisse se redéployer sur le terrain et enquêter sur la répression des soulèvements populaires qui venaient de commencer dans toutes les villes sahraouies. Révolte de la classe politique espagnole. Députés, sénateurs et membres de la société civile espagnole prennent l'initiative de se rendre sur place. Leur avion aussitôt immobilisé est refoulé sur Las Palmas. Plusieurs missions de ce genre, espagnole ou européenne, connaîtront le même sort. Le patron à l'époque de Bernardino León, le ministre des Affaires étrangères Miguel Moratinos, ne proteste pas et laisse même entendre à certains de ses proches que la sécurité militaire algérienne aurait inspiré, sinon planifié ces manifestations populaires. Selon El Pais, trois années plus tard, José Luis Zapatero évitait de répondre, devant Abbas El Fassi, le Premier ministre marocain, en visite le 16 décembre 2008 à Madrid, aux questions des journalistes sur la supervision des droits de l'homme par la Minurso. La France, elle, pays où, hormis le gouvernement et une partie de la classe politique, personne ne sait où se trouve le Sahara occidental — malgré l'indice que révèle le nom de cette ancienne colonie espagnole — use de tout son poids pour que la question des droits de l'homme au Sahara occidental n'aille pas plus loin que les bureaux de certains organes humanitaires de l'ONU. En 2006, Jacques Chirac fait bloquer le rapport du HCR, estimant nécessaire que la Minurso suive de près la situation des droits de l'homme sur l'ensemble du territoire sahraoui. Ce rapport ne sera jamais publié. Selon notre confrère El Pais qui cite des «sources» proches des Nations unies. Discours galvaudé Les autorités marocaines, au pied du mur et pointées du doigt d'abord par les ONG puis par le Parlement européen, ont déjà la réponse. Leur réponse : les droits de l'homme sont violés dans les camps de réfugiés de Tindouf où nos frères sont séquestrés par le Polisario et l'armée algérienne. Un «constat» que seules font les autorités et la presse marocaine. Un discours galvaudé. Des arguments à la limite de la dérision n'était la dure réalité du désert que vit ce peuple depuis 1975 du fait de l'occupation de son territoire par l'armée marocaine.