Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est penché jeudi sur la situation au Sahel dont un rapport a été présenté par la nouvelle Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahel, Mme Hiroute Guebre Sellassie, qui a fait part de son inquiétude de la détérioration de la situation politique et sécuritaire dans cette région. "Pendant la courte période depuis que j'occupe ce poste, j'ai été frappée par la détérioration de la situation politique et sécuritaire dans la région, en particulier en Libye, par les défis sécuritaires et politiques durables au Mali, et par les attaques terroristes récurrentes à travers la région, en particulier celles menées par Boko Haram au Nigéria", a déclaré Mme Sellassie devant le Conseil de sécurité auquel elle a présenté un bilan annuel de la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. A ce propos, elle a avisé qu'il était impératif de renforcer la coordination de toutes les parties prenantes pour assurer le succès de cette Stratégie intégrée qui avait été présentée en juin 2013 par son prédécesseur, M. Romano Prodi, et qui est axée sur trois domaines prioritaires et interdépendants: gouvernance, sécurité et résilience. Devant l'organe de décision de l'ONU, Mme Sellassie a mis en garde que la situation humanitaire demeurait "extrêmement fragile" dans la région en 2014, avec au moins 20 millions de personnes menacées par l'insécurité alimentaire et près de cinq millions d'enfants exposés à des risques de malnutrition aigüe. Parallèlement, les taux élevés de chômage des jeunes au Sahel "ne font que renforcer l'attrait exercé par les idéologies violentes", a constaté Mme Sellassie. La Stratégie intégrée exige des changements politiques et économiques Elle a souligné que la mise en œuvre de la Stratégie intégrée exigeait à la fois la volonté politique des gouvernements de la région sahélienne et des profonds changements sur les plans politique, économique et social. Mme Sélassié a également noté que la multiplication des actes terroristes par Boko Haram dans le centre et le nord du Nigéria posait, désormais, menace au Cameroun, au Niger et au Tchad. De plus, a-t-elle ajouté l'Envoyée spéciale, le conflit et l'effondrement des institutions de l'Etat en République centrafricaine ont exacerbé les risques de connivence entre les groupes terroristes basés au Sahel, au Nigéria et dans la corne de l'Afrique et en Afrique de l'Est. La réalité sur le terrain, a-t-elle poursuivi, c'est que l'Afrique du Nord, de l'Ouest et centrale forment un espace géopolitique contigu où des réponses multidimensionnelles de moyen et de long termes à l'ensemble des menaces à la paix et à la sécurité devront être mises en œuvre de manière collective et coordonnée. Le chaos en Libye déborde bien au-delà des frontières du pays Lors du débat qui a suivi cette présentation, les membres du Conseil de sécurité ont considéré que le terrorisme, la criminalité transnationale organisée, le manque de capacités et d'infrastructures et le chômage élevé étaient autant de défis structurels pour les pays du Sahel, qui comptent au moins 20 millions de personnes menacées par l'insécurité alimentaire et près de cinq millions d'enfants par la malnutrition aigüe. Le représentant des Etats-Unis a ainsi affirmé que pour répondre de manière efficace aux défis importants de la région, il convenait de mettre en place des solutions régionales et inclure tous les acteurs concernés, notamment les organisations régionales, la société civile et les ONG. Pour sa part, le délégué chinois a observé que les pays du Sahel continuent d'être confrontés à des défis multiples, en citant un développement inégal, la propagation du terrorisme et la persistance de crises humanitaires aigues. Pour faire face à de telles menaces, les processus politiques doivent être renforcés grâce à des mécanismes de coordination régionaux, ainsi que les capacités des pays dans le domaine sécuritaire, a estimé le représentant tout en saluant les efforts déployés en ce sens, au cours de ces dernières années, par la CEDEAO. Le représentant du Nigéria a estimé, de son côté, que l'exposé de l'Envoyée spéciale et le rapport du Secrétaire général montraient que des défis considérables persistaient dans la région du Sahel. En matière de gouvernance, davantage doit être fait par les pays du Sahel pour une plus grande ouverture et favoriser la participation des groupes marginalisés, comme les femmes et les jeunes, a-t-il insisté. Il a fait observer que la sécurité des pays, les réformes, le développement économique avaient été tous affectés négativement par des institutions fragiles et l'insécurité des frontières. Les activités de groupes terroristes et de bandes armées, tels que Boko Haram ou des groupes affiliés à Al-Qaida contribuent à aggraver cette situation, a-t-il dit, estimant qu'un Etat ne peut, seul, faire face à ces défis sécuritaires, en ajoutant qu'à cet égard, la coopération des pays de la région et la coopération internationale étaient indispensables. A son tour, le représentant de la Russie a noté les liens étroits et complexes qui existent entre gouvernance, sécurité et résilience dans les pays de la région du Sahel, qui demeurent confrontés à de nombreuses menaces. Il incombe aux pays de la région du Sahel eux-mêmes d'assurer la réalisation des priorités établies par la Stratégie intégrée des Nations Unies, a insisté le représentant russe. Par ailleurs, il s'est inquiété de constater que le chaos en Libye continuait de déborder bien au-delà des frontières du pays.