Les tractations diplomatiques pour tenter de trouver une solution politique au conflit en Syrie se poursuivaient hier à Vienne avec la participation de Téhéran, allié fondamental de Damas. Les intervenants diplomatiques sont au coude-à-coude pour tenter de trouver un consensus autour du sort à réserver au président syrien. Moscou et Téhéran avaient une position opposée à celle de Washington. Mais Washington aurait changé sa position et n'exige plus le départ inconditionnel d'Al-Assad, selon le Wall Street Journal, qui cite une source de l'administration américaine. La Maison-Blanche, selon cette source, était prête à évoquer cette possibilité lors des pourparlers sur la Syrie qui se tenaient hier à Vienne. Un calendrier très serré a été programmé pour préparer la réunion d'hier, avec une série d'entrevues entre les représentants des grandes puissances adversaires ou alliées de Damas, dont l'Iran. Une rencontre préparatoire s'est tenue entre le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, ce jeudi, dans la capitale autrichienne, et ses homologues iranien Mohammad Javad Zarif et russe Sergueï Lavrov, les deux représentants et fidèles soutiens de Damas. Dans la même journée, les chefs de la diplomatie russe, américain, saoudien et turc se sont également réunis à huis clos durant environ une heure. Une rencontre élargie s'est tenue hier à Vienne où une vingtaine de diplomates régionaux et européens ont évoqué les différents scénarios possibles pour solutionner le conflit syrien, qui a fait plus de 250 000 morts depuis 2011. Téhéran a estimé qu'il n'y a aucun changement dans sa position au sujet de son soutien à la Syrie et rejette toute pression allant dans le sens contraire. Washington change de cap Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères chargé des Affaires arabes et africaines, Hossein Amir-Abdollahia, rappellera aux Occidentaux que «ceux qui souhaitent le départ de M. Al-Assad savent bien que seul le peuple syrien décidera de son destin dans le cadre d'un processus politique». Preuve du changement de cap de Washington, le sous-secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, a déclaré sur les ondes d'une radio française que, dans les prochaines discussions, l'éviction de M. Al-Assad n'est pas un pré-requis. Pour Antony Blinken, ce sera plutôt un processus qui conduira «au départ de M. Al-Assad». Téhéran étant un élément clé dans ces pourparlers, Washington trouve une parade à cela en estimant qu'«il est temps d'accorder à l'Iran une place à la table». La Russie a de son côté réussi un tour de force en réunissant autour d'une même table les principaux acteurs dans le dossier syrien : les membres du Conseil permanent (de sécurité de l'Onu), l'Iran, l'Egypte, les pays du Golfe, l'Irak, parallèlement à ses entrevues avec leurs partenaires iraniens. Faire converger les positions A quel accord aboutiront les participants à ces tractations diplomatiques ? Probablement aucun sur le fond, concernant le sort à réserver au président syrien. D'autres sessions seront certainement programmées la semaine prochaine. La difficulté de faire converger les positions entre tous les participants est toujours patente. Chaque camp manœuvre en coulisse avec plusieurs partenaires au même temps et les intérêts géostratégiques seront encore plus à préserver. Même si tous les Occidentaux et leurs alliés saoudiens crient à qui veut les entendre que seul le sort du peuple syrien les inquiète. En réalité, pour de nombreux observateurs, ce qui a pesé dans la balance, c'est-à-dire cette réunion élargie de Vienne, c'est la crise migratoire, un flux ininterrompu de réfugiés syriens qui continue d'arriver en Europe. Alors, les positions s'assouplissent, l'Iran n'est plus persona non grata à cette réunion, car il faut au plus vite sauver le navire Europe, quitte, pour les Occidentaux, à accepter une «période de transition avec Bachar Al-Assad». D'où l'appel du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui attend des intervenants dans ces tractations diplomatiques à Vienne plus de «flexibilité», quelles que soient leurs divergences. Outre la Russie et les Etats occidentaux, l'Irak, l'Iran, l'Egypte et le Liban ont pris part aux consultations sur la crise syrienne à Vienne. Le Kremlin a souhaité que l'opposition syrienne puisse participer à ces pourparlers. La Russie et l'Arabie saoudite auraient échangé des listes de personnalités de l'opposition susceptibles de participer aux tractations de Vienne. Enfin, à travers ce ballet diplomatique, chaque intervenant tente de se replacer au mieux dans cet échiquier, à l'image de la France qui essaye tant bien que mal de s'imposer comme partenaire incontournable en les attirant sur son territoire. Aucun de «ses partenaires» ne voudrait de son «habile expérience libyenne».