«Nous voulons revenir vers l'entreprise mère.» Ce sont les mots martelés par une centaine de dockers rassemblés hier devant les portes closes de la direction générale du port d'Alger. Affectés au niveau du terminal à containers, géré en concession par l'entreprise algéro-émiratie Djazair Port World, ces dockers ne sont pas à leur premier débrayage. De nombreux arrêts de travail ont été observés ces derniers jours pour dénoncer leurs nouvelles conditions de travail jugées «inhumaines». C'est la «déception totale» et «la colère» qui se sont manifestées hier lors de notre déplacement auprès de ces dockers. «On nous a leurrés avec de fausses promesses. Les responsables de la nouvelle société nous ont fait miroiter une augmentation conséquente de salaire et de meilleures conditions de travail. Tous ce qu'on a eu, c'est une infime augmentation, en contrepartie nous trimons plus», affirment-ils offusqués. Selon ces contestataires, les effectifs d'une équipe de travail ont été réduits considérablement. Dorénavant, les dockers travailleront sous l'autorité d'un chef de quai. Trois postes n'existent plus, à savoir celui de chef d'équipe, du contremaître et d'homme de chaîne. «Pourtant, cette dernière fonction est indispensable pour orienter le grutier qui a en charge d'accrocher le sprider, cette grosse barre en fer qu'on accroche pour déplacer les containers», tente de nous expliquer un des dockers rencontré sur place. On apprend que sur les 850 dockers en poste au terminal d'Alger, ils ne sont plus que 290 aujourd'hui à assurer les prestations. Un des contestataires nous fait découvrir les conditions de travail à travers un enregistrement sur son portable. En effet, on y voit deux travailleurs debout sur le sprider porté par une grue, à une hauteur vertigineuse. Ils tiennent les câbles d'attaches avec les mains sans aucune protection de sécurité. «Le risque de lâcher prise après une forte secousse ou après rupture du câble peut à tout instant les faire basculer dans le vide», craint-il. Selon des explications fournies au niveau de l'Epal, les travailleurs avaient l'habitude d'accomplir cette tâche à l'intérieur de cages pour les protéger de la chute. «Ils nous exploitent» Par ailleurs, ces dockers n'ont pas pu bénéficier de récupération ni encore de congé. A DPW, on leur refuse le congé, arguant du fait que ces travailleurs n'ont pas activé pendant les 12 mois requis dans leur entreprise. Avant d'être affectés, ces dockers affirment avoir travaillé au niveau de l'Epal et totalisent une année d'activité. Le service de nuit est l'autre sujet à contestation. Car, selon les dockers, «c'est devenu désormais une obligation, alors que c'était un choix à l'entreprise portuaire d'Alger». Les dockers ont insisté pour dire que «la besogne ne leur fait pas peur mais de quel droit les oblige-t-on à bosser plus que les heures prévues par la législation». Pour avoir, nous dit-on, réclamé leur droit à la récupération afin de rendre visite à leur famille, vivant à l'intérieur du pays, la réponse fut la suivante : «Si vous n'êtes pas de la capitale, il fallait rester travailler près de chez vous» ! Après quatre jours du déclenchement du mouvement de protestation, les dockers ont été reçus hier par le PDG de l'entreprise portuaire d'Alger, qui a promis à l'occasion de trouver une solution à ce problème. Nos tentatives de faire réagir la direction du port n'ont pas pu aboutir malgré notre insistance. Le chargé de la communication n'a pas voulu répondre à notre sollicitation. En attendant, le collectif des dockers campe sur ses positions : pas de retour chez Djazair Port World. Le secrétariat général de l'Union générale des travailleurs algériens a été informé de cette situation par la section syndicale du port d'Alger