Tout magistrat digne de son statut ne peut trancher en l'absence d'une solide pièce normalement versée dans le dossier. Le juge Yahiaoui de Hussein Dey demande à examiner de près cette fameuse expertise. Celui qui se plaint de menace de mort doit avoir des témoins oculaires, les trois témoins dont une jeune femme dans une affaire de «menace de mort», fait prévu et puni par l'article 284 du code pénal, sont invités par Yahiaoui, le juge de Hussein Dey (cour d'Alger), à regagner la salle d'attente mitoyenne jusqu'au moment où ils devront revenir à la barre prêter serment et l'éclairer. Maître Abdelhamid Amara introduit d'emblée une question allant dans le sens de l'annulation des procédures. «L'expertise que devait ordonner le juge d'instruction n'ayant jamais eu lieu, la défense demande au tribunal de rejeter l'expertise effectuée par la PJ et de ne se plier qu'à la loi qui prévoit que seule l'expertise ordonnée par le magistrat instructeur est valable», a dit l'avocat. Le juge perd deux minutes à examiner le dossier avant de se prononcer. Halim Boudra, le procureur, l'interrompt pour vider son «sac» en rétorquant à maître Amara qui avait soulevé un gros problème omis : l'expertise. Le représentant du ministère public répond que l'expertise avait été exploitée par le juge d'instruction, car à Châteauneuf, on ne joue pas avec la liberté des citoyens. Maître Mustapha Kamel Boufafa demande un délai en vue de ramener un document émanant de la Cour suprême qui prévoit ce cas d'espèce. «Pourquoi la défense n'avait-elle pas demandé à l'époque de l'instruction une expertise ?», s'est écrié le jeune avocat. Maître Amara réplique que le souhait de la défense est d'éloigner l'expertise menée par la police dont le rôle ne peut être celui du juge d'instruction. Le président de la section correctionnelle s'achemine vers un probable renvoi et il y avait de quoi ! Enfin, l'avocat met au défi quiconque de ramener un quelconque document de la Cour suprême qui éloigne ou accepte une expertise émanant de la police judiciaire. Mohamed Yahiaoui va plutôt suivre Me Boufafa en accordant un délai d'une semaine et voir de près la réplique par écrit de l'avocat et le fameux arrêt de la Cour suprême. Me Boufafa est satisfait tout autant que Me Abdelhamid qui est sûr que son jeune confrère n'a rien entre les mains pour ce qui est de l'expertise. «Bluff pour bluff, laissons les plateaux de la balance décider», ironise-t-il. Entre-temps, les trois témoins étaient beaucoup mieux, car ils allaient être «libérés» de cette contrainte qui est une longue et pénible attente dans un espace réduit où même fumer n'est pas indiqué, que dis-je interdit ! Et pourtant, tout témoin est tenu de répondre à la justice ! Alors attendons une semaine pour voir de quoi retourne cette histoire de menace de mort entre deux citoyens probablement entrés dans une colère que seule une audience pénale pourra calmer et peut-être effacer, mais après avoir entendu toutes le parties. L'article 284 n'a jamais fait l'objet d'une retouche dans le fond et dans la forme depuis l'ordonnance n°75-47 du 17 juin 1975 tant les douze lignes rédigées à cet effet sont quasi parfaites.