L'ETA a frappé deux fois ce week-end. A Madrid, capitale politique, l'organisation armée basque a lancé un premier message pour rappeler que 50 ans après sa création, le problème de l'identité basque reste posé, sans la moindre perspective sérieuse d'une solution politique conforme aux aspirations des indépendantistes. Sous la dictature du général Franco, décédé en 1976, le recours à l'usage de la violence contre un système féroce pouvait encore trouver une certaine légitimité aux yeux d'une grande partie de l'opinion espagnole et à l'étranger. Ce n'est plus le cas depuis que l'Espagne s'est orientée, il y a trente ans, vers la voie de la démocratie pour mettre en place un véritable Etat de droit et se ranger, ainsi, parmi les plus vieilles démocraties du monde. Pour l' ETA, mais aussi pour une bonne partie de la population basque qui n' approuve pas le recours à la violence comme moyen de revendication de la souveraineté de sa région, les libertés politiques et la démocratie sont une chose, l' identité nationale en est une autre. Autrement dit, la jeune démocratie n'a pas apporté de solution à un problème de fond. 50 ans après, on est au même stade. Les indépendantistes, membres de l'ETA, qui ont choisi la clandestinité, et les nationalistes qui proposent une solution souverainiste en association avec l'Espagne – c'est la cas du parti nationaliste basque, le PNV qui a gouverné le Pays basque depuis le début de l'ère de la démocratie, en 1979 jusqu' en mars dernier – campent sur leurs positions. Le gouvernement central aussi. Sous le parti populaire de l'ex-président Aznar comme actuellement sous le parti socialiste de José Luis Zapatero, on accepte de larges attributions aux autonomies mais pas question de souveraineté des régions. Des trêves sans suite Des trêves et des pauses dans le recours à la violence ont été observées par moments, selon la conjoncture politique de l'Espagne. La meilleure opportunité pour arriver à une solution négociée du problème basque s'est présentée, en mars 2007, lorsque l'ETA avait décidé d'observer une trêve permanente unilatérale. Le gouvernement Zapatero saisit la perche tendue et ouvre la voie à des négociations secrètes avec l'aile modérée de l'ETA. Sept mois après, c'est l'impasse. L'aile dure de l'organisation, dont les dirigeants sont établis clandestinement en France, rompt la trêve à travers l'attentat spectaculaire du 31 décembre contre le nouvel aéroport le Madrid. Le gouvernement Zapatero met fin alors définitivement au processus de dialogue qui aura suscité les plus réels espoirs depuis la création de l'ETA. Des deux côtés, les positions se sont depuis radicalisées. Grâce à une coopération antiterroriste sans faille entre Paris et Madrid, la durée de vie de toute direction militaire de l'organisation armée basque ne dépasse guère les six mois. L'ETA, dans le désarroi tout le long de l'année en cours, redouble ses menaces et multiplie ses attentats meurtriers contre les gendarmes et les membres de la police. En plus de l'arrestation en série de ses dirigeants sitôt installés dans leurs fonctions, les nouvelles élections régionales de mars dernier ont écarté du pouvoir, pour la première fois, les nationalistes conduits par Juan José Ibarretxe, grâce à l'accord de coalition de gouvernement entre les socialistes et le Parti, et son remplacement par le leader du PS local Patxi Lopez. Désormais, la question de la souveraineté du Pays basque en association avec l'Espagne, ce minimum exigé par les nationalistes basques modérés, ne sera plus à l'ordre du jour, ce qui offre la possibilité pour les radicaux de l'ETA de s'engager davantage dans la voie de la violence. La cible du tourisme L'ETA semble avoir adapté sa stratégie à la conjoncture économique difficile, au plan économique, que traverse l'Espagne. Au printemps dernier, elle avait commis deux attentats, dont l'un sur une plage dans le Pays bas que. Le message est clair. La cible cette fois, c'est le secteur touristique, le principal moteur de l'économie qui rapporte autant d'argent à l'Etat espagnol la même recette en devises que les 2 millions de barils vendus quotidiennement par les Emirats Arabes Unis. La menace est sérieuse, car le second moteur de l'économie espagnole, celui de la construction, est en panne depuis le début de l'année 2008. Un million de chômeurs en 12 mois. D' autant que les perspectives du secteur touristique sont quelque peu inquiétantes, au point de pousser le gouvernement Zapatero à organiser le traditionnel conseil des ministres, le 26 juillet à Palma, autour du seul thème du tourisme, en chute de 11%. C'est donc à Palma que l'ETA décide de frapper cette fois et adresser son second message aux autorités centrale qui pensent, à tort, que l'ETA est en déroute.