Les rues commerçantes d'Alger connaissent ces derniers jours une animation intense. Le soir, ce sont des centaines de citoyens qui prennent d'assaut les magasins d'habillement et de chaussures en prévision de l'aïd tout proche. Chaque soir, ils sont des milliers à envahir les rues de la capitale pour l'achat de vêtements pour leurs enfants ou pour eux-mêmes. Souvent accompagnés de leur progéniture, les parents sillonnent les rues commerçantes en quête de la bonne affaire. Beaucoup sortent pour les achats de l'aïd après avoir accompli les prières des tarawih. Pour les fidèles, les dix derniers jours de ramadhan sont une occasion supplémentaire d'invoquer les faveurs du Créateur et d'approfondir leur spiritualité. La récitation du Coran prendra bientôt fin, ouvrant la voie à la nuit du Destin (leilat el qadr) qui coïncide avec la fin du mois sacré. L'événement pousse à plus de ferveur religieuse, comme en témoigne le nombre important de fidèles dans les mosquées. Les trottoirs pour étalage Une fois les prières surérogatoires accomplies, le commerce reprend de plus belle, notamment dans les quartiers populaires où les trottoirs ne sont plus «autorisés» aux passants. Et pour cause, ils sont squattés par des milliers de vendeurs informels qui les utilisent pour étaler leurs marchandises. C'est leur domaine réservé, et personne n'y peut rien, pas même les commerçants légaux. En général, ce sont de jeunes chômeurs qui s'improvisent marchands de vêtements, de chaussures, de jouets, de bijoux en toc et de tout un attirail de produits intéressant les enfants en particulier. Il faut dire que le chômage fait des ravages dans les faubourgs de la capitale et concerne de nombreux jeunes en rupture de scolarité. Les vendeurs le savent, les achats de l'aïd sont l'occasion inespérée de réaliser de bonnes affaires. La tradition veut que l'on achète des habits neufs aux enfants, des jouets et des cadeaux de toutes sortes. Et c'est la frénésie d'achats qui fait le bonheur des marchands, qu'ils aient pignon sur rue ou qu'ils le fassent à la sauvette. Concurrence illégale En voyant l'intense activité commerciale qui se déroule dans les quartiers de Sidi M'hamed ou Belouizdad, l'étranger qui visite pour la première fois le pays comprendra que si les Algérois sont si dépensiers, c'est qu'ils sont immensément riches. Les propriétaires des locaux inscrits au registre du commerce ont du mal à accepter la présence massive des commerçants informels. Ces derniers proposent en effet des articles à des prix défiant toute concurrence. Des vêtements, des chaussures, des sacs, des pantalons, pour la plupart importés de Chine, sont proposés à la clientèle, très intéressée par les prix affichés. Devant cette agitation et l'occupation des trottoirs, les piétons n'ont d'autre choix que de marcher carrément sur la chaussée, gênant par conséquent l'intense circulation automobile. Les automobilistes, agacés, essayent de fuir la marée humaine. Parmi eux, les familles qui se dirigent vers Vieux Kouba, désormais affublé du titre de nouvelle place forte de la crème glacée. Une bonne glace après les achats, la proposition ne peut que plaire aux membres de la famille, aux enfants surtout. Les lumières des salons de glace donnent cet aspect de festivité qui rend si heureux les bambins. La fin de ramadhan, période spéciale dans un mois spécial, aboutira par la suite à une fête, l'aïd, le jour de l'amour, de la fraternité et du pardon. Rendez-vous l'année prochaine.