Tout avocat sensé se doit de suivre l'interrogatoire où son client est partie prenante. Devant le trio de la 4e chambre correctionnelle d'Alger, la plus jeune des Lamouri, maître Nacéra, a joué un coup de dés, constatant que le juge avait sous les yeux un casier où deux lignes étaient tracées. S'apercevant que son client avait l'étiquette de repris de justice, elle rectifia poliment et démontra le pourquoi. Entre temps, nous n'avions pas pris connaissance de celui qui a causé de gros dégâts dans le quartier en cylindrée. La justice est certes lourde mais souvent aveugle...«Qui donc a brisé l'auto ? Etes-vous un repris de justice ?», dit Bekri Boualem, le président de la 4e chambre correctionnelle d'Alger. Le prévenu est dans les nues. Il semble planer par la faute de la longue détention préventive et aussi par cette longue attente avant de passer à la barre. «Ce n'est pas moi», marmonne le détenu qui regarde avec beaucoup d'appréhension son avocate, elle-même craignant que le justiciable ne s'adonne à une autoflagellation, comme cela arrive souvent en pareille cas. Pour ce dossier, c'est exactement le contraire qui allait se produire. Le prévenu était debout à deux mètres et quelques centimètres de son avocat qui avait l'âge de sa fille aînée et était prêt à répondre «Non, Monsieur le président» à toutes les questions de la composition. Maître Lamouri Nacera se demande le pourquoi du verdict du tribunal. «Mon client n'a pas de casier, il n'a rien brisé, il n'a rien cassé, ce ne sont que de simples déclarations, pourquoi donc un an de prison ferme à Hussein Dey ? Il y avait foule dans le quartier. mon client n'était pas seul. Il y avait sur place plus d'une dizaine de jeunes. N'importe qui pouvait avoir détruit le pare-brise de l'automobile garée n'importe comment, je dois le préciser, monsieur le président, dira maître Nacéra Lamouri qui a tout de même réussi à se frayer un «passage» dans sa plaidoirie pour rectifier à sa manière Boualem Bekri, ce vieux renard des pupitres à propos de «repris de justice». «Monsieur le président, je suis tenue de reprendre votre terme pour attirer respectueusement votre attention et celle des conseillers et du procureur général pour vous préciser que le casier contient le «port d'arme prohibé» et non «la destruction de bien d'autrui». «Voilà monsieur le président les clarifications nécessaires à la bonne marche des débats». Bekri sourit, remercie l'avocate, se penche sur Amrani Abdenour et Tayeb Hellali son duo d'assistants et ordonne la mise en examen du dossier pour la semaine suivante. A moitié déçue, la jeune avocate aurait tant voulu que la composition pénale statue au moins pour cette affaire pour trancher sur le vif car le prévenu vivait de pénibles moments par la faute d'un suspense qui ne dit pas son nom. La grimace affichée par maître Lamouri en disait long sur ces histoires de mise en examen de dossiers souvent légers à traiter et donc qui peuvent être traités sur le siège et faire gagner du temps à tout le monde et permettre aux prévenus d'être fixés.