Dieu merci, l'Amérique d'Obama n'est pas muette. Elle parle, elle répond tardivement aux mollahs d'Iran par le biais du docteur El Baradei et il lui arrive même d'imposer sa vision des choses. Aussi bien au Pakistan qu'au Honduras, même si de plus en plus de démocrates sont en train de perdre la foi en la main tendue de l'administration en place. Avant de s'envoler pour Tel-Aviv, où son entretien avec Benjamin Netanyahu a été avancé d'une journée, Mme Clinton n'a pas décoléré face aux dirigeants d'Islamabad, invités à se débarrasser au plus vite des indésirables chefs d'Al Qaïda. Tenus devant des directeurs de journaux, ses propos n'étaient pas pour épater sa galerie. La patronne du Département d'Etat US pense bien ce qu'elle a dit : le gouvernement pakistanais est frappé d'incapacité, sinon de ce manque de volonté à percer le mystère qui fait que les hauts enturbannés de la mouvance djihadiste mondiale sont toujours introuvables. Le message qu'elle a voulu passer est un peu plus clair, la traque des talibans nationaux ne peut justifier à elle seule la poursuite de la lutte antiterroriste à l'échelle planétaire. Craint-elle qu'un jour soit livrée au pas de la grotte, où se terreraient les djihadistes en chef, quantité d'uranium hautement enrichi ? S'ils veulent empocher les 7,5 milliards de dollars, les autorités d'Islamabad sont sommées d'élargir leur champ d'action à Al Qaïda. De toute manière, toutes les guerres sont sales et les attentats contre les civils en ont toujours fait partie. Trop engagée pour reculer à présent, la République islamique du Pakistan n'aurait pas d'autre choix que de prendre au sérieux les conseils d'un certain George W. Bush qui est «revenu» aux affaires. Ce au moment où son successeur tient son conseil de guerre sur l'Afghanistan. Cherche-t-il à lui forcer la main pour qu'il signe l'ordre de mobilisation de troupes supplémentaires, les alliés n'obéissant toujours pas à l'œil et au doigt de Rasmussen ? W. Bush est formel, si les talibans et Al Qaïda reprennent le contrôle de l'Afghanistan, le monde fera face à de sérieuses menaces. Barack Obama, qui fait face à des scénarios aussi chaotiques les uns que les autres, ne peut ajourner éternellement sa décision au sujet de l'envoi ou non de nouvelles troupes. Son opinion publique pourrait bien se retourner contre lui dans le cas où la stabilisation sécuritaire n'est pas au rendez-vous. Néanmoins, elle fermera les yeux sur les rares progrès politiques, «mal acquis», en Afghanistan. Avant de remettre son voile bleu et de quitter Islamabad, Hillary Clinton a tenu à préciser ce qui suit : le second tour de la présidentielle afghane sera légitime avec ou sans le boycott que le candidat Abdullah Abdullah laisse planer. Bon ou mauvais apprentissage de la démocratie, les talibans locaux (différents de ceux du Pakistan !) ne doivent en aucun cas reprendre le dessus. Puisque les éliminer totalement révélerait du strict fantasme. Triste conclusion donc à laquelle sont arrivés Obama et ses conseillers. Toutefois, une question se pose : si le réalisme fait que les Américains ne peuvent pas faire réduire à zéro la menace talibane en Afghanistan, pourquoi les Pakistanais sont tenus de rendre copie vierge sur laquelle plus un nom des chefs d'Al Qaïda ne figurera ? Mme Clinton doit pouvoir y répondre.