Après la qualification notre envoyé spécial au Soudan Omar Belkacem a rencontré l'entraîneur national.Un Rabah Saâdane soulagé et tout souriant qui lui a fait part de tous ses sentiments après cette consécration Avec du recul, cette qualification pour la Coupe du monde et la CAN vous l'évaluez comment ? Sans aucune démagogie, je dirai que le grand mérite revient d'abord aux joueurs, car ce sont eux qui se sont battus sur le terrain et qui ont subi toutes ces hostilités au Caire avec cette agression qui a laissé des traces sur le plan psychologique et qui a diminué au moins de moitié leurs capacités techniques. Cette agression a eu à ce point des répercussions sur le rendement des joueurs dans ce match du Caire ? Non seulement l'agression à l'arrivée mais également notre entrée au Cairo Stadium dans des conditions absolument inimaginables, bon mais on ne va pas revenir sur les détails, je dirai tout juste que, eu égard à cela, les joueurs ont eu des difficultés pour entrer dans le match. Mais vous vous attendiez tout de même à des difficultés dans ce match, non ? Oui, en effet, mais il fallait faire des choix, entrer avec une tactique et faire évoluer au fil des minutes. J'ai d'ailleurs énormément parlé avec les joueurs avant ce match du Caire, car il fallait vite réparer les dégâts psychologiques causés par l'agression de notre bus entre l'aéroport et l'hôtel. Visiblement ça n'a pas marché... Sur le match je dois dire qu'on est passé à côté. En plus, tous les changements que nous avons effectués pendant le match n'étaient pas tactiques mais forcés par des blessures. Dieu merci, on est sorti de ce traquenard pas éliminés. Et après coup, je me dis heureusement que nous ne nous sommes pas qualifiés au Caire, car les conséquences auraient été graves et les dégâts peut-être irréparables. En tout cas, vous avez rejoint Khartoum avec une équipe abattue moralement... En allant au Soudan, on avait une équipe diminuée par deux joueurs, Gaouaoui et Lemouchia, suspendus et qui seraient donc absents pour le match d'appui, et tous les joueurs psychologiquement irrités parce qu'ils n'avaient pas perdu par le football ce match du Caire. Mais au Soudan, c'était tout de même autre chose... Ah complètement, les conditions étaient favorables et le soutien de nos supporters ainsi que celui du peuple soudanais déterminant. La préparation psychologique n'en était que plus facile dans des conditions comme celles-là. D'ailleurs, lorsque nous somme arrivés à Khartoum, j'avais décidé de ne travailler que sur l'aspect psychologique, et ça a bien marché. C'est pour cela qu'exceptionnellement vous avez programmé la séance d'entraînement d'avant-match avec public ? Exactement, j'en ai discuté avec le président Raouraoua et nous étions tous les deux tombés d'accord pour laisser entrer le public, et lorsque nous sommes entrés sur le terrain c'était extraordinaire, il y avait quelque 15 000 spectateurs. Pour plaisanter, j'ai dit aux joueurs ils se sont trompés, ils ont dû croire que c'est aujourd'hui le match (rires). Il y avait en effet des milliers de Soudanais avec le drapeau algérien et nos supporters qui étaient déjà à Khartoum, ça nous a donné la chair de poule. Et je crois que c'est à ce moment-là qu'il y a eu ce déclic chez les joueurs, ils ont dû se dire c'est pas possible, on ne peut pas perdre ce match. En tout cas, je suis persuadé maintenant que c'était un moment crucial pour remonter le moral des joueurs. Et le reste s'est fait sur le terrain le jour du match... Bien évidemment, il fallait juste faire les bons choix, les bons réglages, et c'est ce que nous avons fait en sacrifiant d'entrée un joueur qui était très affecté psychologiquement, en l'occurrence Matmour, et en appliquant un 4-4-2 avec deux attaquants, Saïfi et Ghezzal. Après le but de Antar Yahia, il fallait gérer notre avantage au score tout en essayant de marquer un second but, chose que nous avons failli réussir sur cette tête de Ghezzal, arrêtée sur la ligne par le gardien égyptien. Ensuite c'était la délivrance au coup de sifflet final de l'arbitre... Ah oui ! Cette victoire nous a soulagés tous, car nous la méritions depuis le début. Moi personnellement j'avais un énorme poids sur les épaules, et après ce match je me sentais léger, mais alors d'une légèreté que je ne peux pas décrire. C'est une sensation que je n'ai sans doute jamais eue. Pourtant il y a eu 1982 et 1986 ? Oui, mais cette fois ce n'était pas pareil. Des trois, c'est la meilleure selon vous ? C'est vrai que chaque période a ses sensations, mais celle-là a une saveur particulière car elle arrive après une longue période de disette pour le football algérien et pour un public qui attendait depuis si longtemps une qualification en Coupe du monde. Donc je dirai que c'est celle-là que je préfère. Vous avez rendu hommage aux joueurs mais il y a eu quand même un énorme travail collégial.. Tout à fait, et je commencerai par remercier le président de la République qui a énormément fait pour le football et pour l'équipe nationale, et la dernière action en date est ce déplacement des supporters à Khartoum organisé à la perfection et en si peu de temps. Je remercie aussi les supporters qui sont venus en masse pour nous soutenir et aussi le peuple soudanais, ainsi que les responsables de ce pays frère qui ont offert les meilleures conditions. Vous aviez également à vos côtés une fédération qui a été omniprésente pour résoudre tous vos problèmes... Il est indéniable que la FAF, avec à sa tête le président Mohamed Raouraoua, a fait un travail colossal avec beaucoup de professionnalisme et a mis à notre disposition tous les moyens dont nous avions besoin pour atteindre cet objectif. Un objectif qui au départ n'était pas de se qualifier pour le Mondial... C'est vrai qu'au tout début, notre objectif était surtout de nous qualifier à la CAN, car nous étions absents à cette compétition depuis 2004, et puis tout le monde donnait l'Egypte favorite du groupe par rapport à son statut de double champion d'Afrique. Mais après trois matches, notre équipe s'est affirmée et a montré de réelles capacités d'aller au Mondial. Notre objectif a donc changé.
Maintenant, il y a la CAN qui pointe déjà à l'horizon... La CAN est pour nous un bon objectif intermédiaire dans la perspective de la Coupe du monde. Le seul problème, c'est que nous n'aurons pas beaucoup de temps pour préparer cette compétition, compte tenu du calendrier des joueurs professionnels avec leurs clubs, mais enfin on va voir la meilleure solution. Entretien réalisé par Omar Belkacem