L'Algérie devra chercher d'autres débouchés pour vendre son gaz, après le coup de passe-passe des Russes, en cassant les prix du gaz sur le marché spot, le surplus de l'offre mondiale et la réorientation de la demande vers les pays émergents, notamment la Chine et l'Inde, sans renoncer à son client «naturel», l'Europe. La compagnie Sonatrach est le 2e exportateur de gaz naturel liquéfié (GNL) et de gaz de pétrole liquéfié (GPL) et le 3e exportateur de gaz naturel (GN) en Europe, notamment à travers les deux projets de gazoducs, le Medgaz, reliant l'Algérie à l'Espagne et le Galsi qui la relie à l'Italie, pour approvisionner l'Europe avec une capacité exportée de gaz passant de 62, en 2009, à 85 milliards de mètres cubes en 2012. Dans cet objectif, l'Algérie a investi dans toute la chaîne de production de l'exploration, l'exploitation, le transport et le raffinage et s'est diversifiée dans la pétrochimie, dans le transport maritime via sa filiale Hyproc Shipping, participant à hauteur de 31% des parts de marché dans l'exportation du GNL algérien et à hauteur de 24% pour les GPL avec sa propre flotte. Par ailleurs, les experts tirent la sonnette d'alarme sur la persistance de la bulle gazière à cause des Etats-Unis en mettant sur le marché des gaz non conventionnels, qui représentent 50% de leur production totale, et des Européens qui encouragent le marché spot, où les prix du gaz ont été divisés par 10, par rapport aux contrats à long terme dont les prix sont indexés à ceux du pétrole (prix du baril de pétrole divisé par six actuellement). De plus, la Russie, premier exportateur mondial de gaz, vient de casser les prix à la demande de ses clients européens. L'Union européenne (UE) s'approvisionne, aujourd'hui, à hauteur de 40% de ses importations en gaz de Russie, 30% d'Algérie et 25% de Norvège. Justement, cette situation inquiète l'UE, puisqu'elle importe 60% de son gaz qui atteindra les 80% en 2025, selon un rapport qui vient d'être publié par le Centre d'études prospectives et d'information internationale (Cepii), rattaché au Premier ministère français. Pour s'affirmer face à ses fournisseurs (Gazprom et Sonatrach), l'Europe tente de relancer l'idée d'une centrale d'achat de gaz qui pourrait devenir à terme, une agence d'approvisionnement en gaz. 100 Gm3 de GNL en trop sur le marché mondial Actuellement, selon les spécialistes du marché énergétique, il y a 100 Gm3 de GNL en trop sur le marché mondial qui ne trouve pas preneur, soit à peu près 1/4 de la capacité mondiale. Cette tendance est à la hausse avec l'arrivée sur le marché de nouveaux volumes provenant de projets en chantier qui pourrait amener ce volume de surplus sur le marché à 130 Gm3 d'ici 2013. Cet état de fait fera dégringoler les prix du gaz sachant que le décalage entre les deux marchés est estimé à 50% en moyenne. Selon les économistes algériens, cette situation va accélérer la naissance de l'Opep du gaz qui régulerait l'offre de GNL pour laisser une place aux transactions de long terme nécessaires pour le développement de l'offre gazière. Dans ce sens, le Forum des pays exportateurs de gaz (Fpeg), qui regroupe aujourd'hui les principaux pays gaziers qui contrôlent 73% des réserves mondiales et 42% de la production de cette énergie, va se réunir le 19 avril prochain à Oran pour trancher cette question. A cette occasion, l'Algérie présentera une étude sur le marché mondial du gaz. Pour sa part, faut-il le signaler, l'Union européenne, pour sa part, à travers un de ses membres, l'Espagne, prépare une étude spécifique sur le marché algérien des énergies fossiles. Vers plus de gaz algérien sur les marchés turc et anglais L'Algérie exportera son gaz vers la Turquie au-delà de 2014, date d'expiration du contrat en cours entre Sonatrach et la société turque Botas, a décidé le gouvernement à l'ouverture de la 9e session de la commission mixte algéro-turque de coopération économique, scientifique et technique, mercredi dernier à Alger. Il est à rappeler que l'Algérie exporte 4 milliards de mètres cubes de gaz naturel liquéfié (GNL) par an vers la Turquie, et ce pendant 20 ans, en vertu d'un contrat signé en 1995. Par ailleurs, la visite du ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, au Royaume Uni, il y a deux semaines, portait sur l'augmentation des volumes de gaz à livrer à ce pays. L'Algérie assure 5% des besoins britanniques en GNL. Afin d'augmenter cette part, Sonatrach et British Petroleum (BP) doivent lancer une société mixte pour assurer l'approvisionnement en GNL algérien. Par ailleurs, les experts économistes s'accordent à dire que la demande reprendra cette année (2010) grâce aux pays émergents, donc l'Algérie devra trouver des marchés dans ces pays pour son gaz notamment en Asie avec l'Inde et la Chine ainsi que dans les pays moyen-orientaux, comme l'a déjà évoqué le ministre. Toutefois, l'Algérie ne renoncera pas, pour autant, au marché européen puisque, selon les prévisions, l'Europe va accroître sa demande en gaz de plus de 80% en 2030.