Les «orangistes» sont de retour dans les rues de Kiev. S'il est trop tard pour que la belle Lilia Timochenko conteste les résultats de la dernière présidentielle, elle ne semble pas perdre histoire à «pourrir» le mandat présidentiel de son rival, le pro-russe, Viktor Ianoukovitch. Première décision impopulaire, première manifestation monstre de l'opposition devant le parlement ukrainien. Des milliers de personnes ont protesté contre l'accord prolongeant pour les vingt-cinq années à venir la présence de la flotte russe à Sébastopol. De la haute trahison en mer Noire ! Il faut dire que ce signe de rapprochement entre la Russie et l'Ukraine, voulu par le pouvoir en place et espéré par le Kremlin, n'a pas tardé à confirmer les craintes de l'opposition. Aurait-elle fait mieux d'aller disconvenir les résultats du dernier scrutin présidentiel devant la commission électorale ukrainienne, quitte à ce que soit provoquée une crise institutionnelle ? Que l'acceptation de sa défaite ait été reconnue par son propre gré ou qu'elle lui ait été soufflée, Timochenko a dû plier l'étendard orange au lieu de le ranger au placard. Elle semble avoir eu raison, le bail de la discorde lui offre une occasion en or pour commencer déjà à sonder les intentions de son rival quant au retour de l'Ukraine dans le giron russe. Un contrat de vingt-cinq ans c'est long mais constituera-t-il le point de départ d'une mobilisation qui rappellerait celle de 2004 sur la place de l'Indépendance ? Parce qu'il a fait ses preuves par le passé, la belle attendrait-elle les signaux sans failles d'un nouveau «déséquilibre démocratique» pour attaquer la bête par derrière ? Ce serait trop tôt pour que le bloc occidental donne le coup de grâce, via l'expansionnisme que l'Otan peine à asseoir de manière définitive dans cette partie de l'Europe. La flotte russe peut continuer de tanguer à Sébastopol durant les deux décennies à venir. De toute façon, les armes tactiques US resteront sur le vieux continent tant que la Russie n'a pas fait un geste, a réaffirmé Mme Clinton lors de la réunion informelle des chefs de la diplomatie de l'Otan qui s'est achevée en Estonie. Néanmoins, il faut reconnaître à Moscou ce premier revers gagnant en terre ukrainienne. Ses autorités ont été tellement enchantées par la reconduction de son bail qu'elles ont fait vite d'octroyer à Kiev des remises sur le prix du gaz naturel. Et ce n'est qu'un début, le président Medvedev, qui n'a pas écarté la possibilité de se représenter à la prochaine présidentielle, souhaite de tout cœur que les relations russo-polonaises se raffermissent après la disparition tragique du président Lech Kaczynski. A présent que la date du scrutin présidentiel anticipé a été fixée au 20 juin prochain, le Kremlin peut-il déjà se mettre à rêver d'un élu qui plaiderait contre la présence trop encombrante de l'Otan aux portes de la Fédération de Russie ou qui remettrait en cause le déploiement d'une partie du système de défense anti-missiles US ? Difficile de trouver un pareil oiseau rare, le favori du scrutin est un libéral invétéré. Un bail de vingt-cinq ans, c'est toujours bon à signer.