Corruption, infraction voire violation de la législation relative aux passations de marché (absence d'avis d'appel à la concurrence, défaut de justifications économiques, commerciales et financières et des critères dans le choix des fournisseurs) ainsi que complicité de corruption ont été les chefs d'inculpation retenus contre 21 cadres, dont plusieurs PDG d'entreprises du textile. Il s'agit, entre autres, de l'Enaditex de Batna reconfigurée en Sarl Cotinter en 1990 après sa fusion avec l'entreprise MTHB de Hadjas Brahim, de l'Enaditex de Tissemsilt ainsi que de bon nombre d'autres entreprises nationales et filiales installées en Algérie à l'instar de celle de Constantine, Barika. Devant la complexité de cette affaire dont les faits remontent aux années 90, le président de l'audience, Omar Belkherchi, a annoncé le verdict pour le 19 du mois en cours. Cette affaire a été examinée hier par la chambre pénale de la cour d'Alger. L'ex- directeur général d'une entreprise espagnole (Ratco) Y. T. qui, par la suite, créa une entreprise à Lyon (France), convoitant de devenir un des principaux fournisseurs des entreprises algériennes du textile, est actuellement en fuite et risque un mandat de recherche international. Appelés à la barre, la plupart des inculpés ont nié les faits qui leur sont reprochés. Seul un des inculpés qui, en réponse à une question du juge, révèle la vérité sur les sommes faramineuses «virées au compte de Continter établi à l'étranger». Toutefois, ce dernier indiqua qu'«une cabale montée par des concurrents féroces afin de déstabiliser son entreprise s'était taillé une part du marché», ajoutant que «les sommes ont été versées dans le compte de notre entreprise par une personne inconnue à dessein de nous accuser de corruption». «Les sommes versées seraient de l'ordre de 4 millions de dollars». Dans les coulisses, le nom de l'ex-directeur de la firme espagnole, algérien de nationalité (en fuite), était cité comme étant «à l'origine du virement visant à déstabiliser Cotinter afin d'accaparer les nombreux clients de même que le marché du textile qui était conditionné par l'importation massive de produits de première nécessité tels que le coton etc.» Une histoire de marchés Cet ex-DG, à la tête d'une entreprise activant à Lyon, aurait été à l'origine du déclenchement de l'enquête en fournissant «des documents falsifiés aux enquêteurs afin de détourner leurs soupçons sur ses véritables intentions de phagocyter le marché du textile dont dépendait l'industrie algérienne.» La même source indique également que «cette manœuvre insidieuse de la part de cet ancien directeur de Ratco (principal fournisseur espagnol des algériens et représentant des autres firmes au Maghreb) était destinée à tromper les enquêteurs». Il est à rappeler dans l'arrêt de renvoi rédigé suite à une enquête diligentée en 1997 par l'appareil judiciaire, qu'un premier procès de cette affaire s'est tenu en novembre 2009. Le tribunal de Sidi M'hamed avait prononcé un acquittement et des peines de sursis pour l'ensemble des personnes inculpées. Dans leurs plaidoiries, les avocats devaient rappeler le contexte de cette affaire coïncidant avec «la période de cessation de paiement dans laquelle se trouvait le pays perturbé par le terrorisme et le manque de financement qui a contraint les entreprises algériennes à s'orienter vers le partenariat», soulignant, pour justifier les relations de leurs clients avec les espagnols que «l'état espagnol avait décidé d'accorder des crédits à ses entreprises dans le cadre du partenariat et à dessein d'aider l'industrie du textile algérien qui évoluait dans des conditions d'instabilité». Les avocats ont mis en exergue «les ruses et astuces» utilisées par les concurrents pour déstabiliser ce partenariat en faisant allusion à T. Y. en cavale. Devant la complexité de cette affaire et devant les nombreux arguments apportés par la défense, le président de l'audience a décidé de se retirer en délibération en annonçant que le verdict sera rendu le 19 mai. Il sied de préciser que durant l'enquête, les experts de l'IGF, dans un rapport remis en 1997 à la justice, avait relevé dans leurs conclusions «le manque d'informations juridiques, financières etc., relatives à la société contractuelle ainsi qu'au bon nombre d'autres remarques négatives sur la firme espagnole Ratco».