Le mois de Ramadhan de cette année qui débutera le 11 août sera très chaud, non par rapport à la période d'été, mais eu égard à la hausse des prix des produits alimentaires qui flambent de jour en jour. L'instauration du crédit documentaire commence à peser également sur les commerçants algériens. Dans une virée au marché de gros de Semmar d'Alger où s'approvisionnent toutes les régions du pays, nous avons pu constater, en effet, une nette augmentation ces derniers jours. Aucun produit alimentaire n'échappe à cette envolée. Le lait en poudre est cédé à 175 DA l'étui de 500 grammes, les lentilles et les haricots blancs se vendent au prix de gros à 90 DA, ainsi que les fruits secs, acheminés en prévision du mois de Ramadhan, sont proposés à 240 le kilo. La tendance est toujours à la hausse. Chafik, importateur de produits alimentaires, nous a expliqué que «les prix vont encore augmenter. Au mois de Ramadhan, nous allons observer, impuissants, un marché plus que brûlant». Noureddine approuve de son côté les propos de son collègue. «Il faut savoir que le lait en poudre est importé d'Argentine. Ce qui se vend sur notre marché actuellement n'est que le stock des dernières importations. Or ce pays se trouve dans une situation difficile à cause des prix du lait et nos importateurs n'ont pas encore effectué des commandes, attendant la baisse des prix. En conséquence, la pénurie de ce produit se profile à l'horizon et donc le prix va encore augmenter», a tenu à clarifier ce commerçant. S'agissant du café, du sucre et de l'huile de table, Chafik a fait savoir que les prix de ces produits «sont liés aux cours boursiers. Donc c'est le marché mondial qui décide». Sofiane est le spécialiste du commerce de légumes secs. Il est l'un des plus importants importateurs de ces denrées à Semmar. Il déclare pour sa part que «le prix des lentilles est de 90 DA alors qu'au Canada, le pays fournisseur, son prix est à 11 ou 12 dollars». «Sincèrement, si les prix stagnent à ce niveau, je ne ferai pas de commande pour les mois à venir», affirme-t-il. Ce qui induira du coup la hausse des prix. Selon lui, «les décisions non réfléchies des pouvoirs publics nous pénalisent. Les pouvoirs publics nous mettent des bâtons dans les roues, notamment avec la fameuse lettre de crédit qui ne donne accès à l'importation qu'aux milliardaires alors que le citoyen baigne dans les pénuries et les flambées des prix». La lettre de crédit est apparemment à l'origine de cette hausse des prix. Le crédit documentaire profite aux barons Les différents importateurs et grossistes de l'agroalimentaire rencontrés sont unanimes à dire que «le crédit documentaire est une clé offerte aux barons de l'importation pour mettre la main sur le secteur. Ces barons sont capables de provoquer des pénuries et d'empêcher les consommateurs de s'offrir même les produits de première nécessité». Wahab est au bout de la faillite, lui qui nourrissait dans un passé proche des millions d'Algériens. C'est le numéro un du lait, nous dit-on. Actuellement, ce jeune homme se retrouve dans un local avec seulement une dizaine de sacs de lait, la raison ? Il explique : «J'étais parmi les premiers à investir dans l'importation du lait en vrac et je n'ai jamais eu de souci ni avec les services de douanes ni avec un autre organisme. Je payais mes impôts à chaque fin d'année, j'employais une dizaine de personnes. Depuis l'instauration du crédit documentaire, je me retrouve sans rien», affirme-t-il. Le jeune Wahab est très affecté, «j'ai toujours réinjecté mes bénéfices dans l'optique d'accroître encore mes entreprises dans le but d'investir dans une usine de fabrication agroalimentaire. Mais à l'heure actuelle, tout est tombé à l'eau». La lettre de crédit fait augmenter les prix de jours en jour, «nous n'avons plus d'argent pour importer, ça nous arrive très souvent de vendre à perte. Nos marges sont minimes, ajouter à cela l'obligation de payer nos marchandises avant même leur acheminement vers l'Algérie, du coup nous préférons arrêter», préviennent les importateurs. Pour le mois sacré du Ramadhan, ils craignent quasiment des pénuries, en plus des prix ruineux.