La décision prise en commun accord par l'Algérie et l'Union européenne de réviser le calendrier du démantèlement tarifaire est loin de rassurer les organisations patronales algériennes. Elles plaident plutôt pour une véritable mise à niveau de l'économie et à l'assouplissement de la circulation des personnes, notamment des hommes d'affaires. La décision de révision du démantèlement tarifaire a été annoncée mardi dernier par le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, et son homologue espagnol, Miguel Angel Moratinos, dont le pays assure actuellement la présidence tournante de l'UE, lors d'une conférence de presse conjointe sanctionnant la 5e réunion du Conseil d'association. Les organisations patronales relativisent cet engagement en mettant en avant «des problèmes réels» quant au processus d'adhésion à la zone de libre-échange avec l'Union européenne prévue en 2017. Le président de la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA), Naït Abdelaziz, a insisté sur la mise à niveau des entreprises algériennes dans l'optique de leur intégration à la zone de libre-échange. «Ce qui est attendu réellement dans le cadre de l'accord d'association avec l'UE est surtout l'appui aux entreprises algériennes et le développement des IDE. Le démantèlement tarifaire, qui a été en réalité une concession, a été fait dans la précipitation. On espérait une compensation par les investissements massifs des pays européens. Malheureusement, cela n'a pas été le cas. Maintenant, il faudrait s'atteler à cette question», indiquait-il hier tout en soulignant que «l'Algérie a mis du temps pour réagir et à remettre en marche son économie grâce à la loi de finances complémentaire 2009 qui a secoué le monde économique. La LFC 2009 a remis les pendules à l'heure, car le marché a été ouvert aux étrangers sans contrepartie. L'Algérie est devenue au fil du temps un déversoir de tous les produits, sans contrôle et avec tous les risques entraînés, contrefaçon et concurrence déloyale». Pour autant, il ne faut pas rejeter la balle uniquement sur l'Union européenne, soutient-il. «La facture de 40 milliards d'importations en 2008 ne doit pas se reproduire. Mais pour cela, il faudrait travailler et trouver les mécanismes de relance de la production locale, publique et privée. On ne peut aller loin avec un système bureaucratique qui ne motive pas les investisseurs. Il faut se préparer à la zone de libre-échange dès maintenant en prenant en charge les préoccupations des entreprises algériennes. Et cela passe par un dialogue permanent avec les pouvoirs publics de manière à ce que chacun prenne ses responsabilités. On doit changer donc le comportement et les mentalités des entreprises algériennes», a tenu à expliquer le président du CNPA, persuadé que l'accession à la zone de libre-échange ne sera pas un cadeau. Mohamed Saïd Naït Abdelaziz a insisté sur l'importance de la mise à niveau de l'économie algérienne dans sa globalité. Quant à la faiblesse des IDE de l'UE, notre interlocuteur ne s'alarme pas. «Il ne faut plus poser cette question. Les investisseurs étrangers ne viennent pas sans garantie et sans les conditions nécessaires. D'abord, ils cherchent leurs intérêts. C'est à nous, Algériens, de travailler de manière à les attirer et à leur offrir les conditions nécessaires. Nous devons ouvrir le marché, mais avec des conditions claires, notamment sur le plan de l'emploi, du transfert du savoir-faire et des résultats financiers», recommande le président de la CNPA. Circulation des personnes : un véritable casse-tête La Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa) a tenu, de son côté, à se prononcer sur la dernière rencontre entre l'Algérie et l'Union européenne. Le président de la Cipa, Abdelaziz Mehenni, soulève le problème de la circulation des personnes, particulièrement des hommes d'affaires. «Les affronts que subissent présentement les opérateurs économiques algériens auprès des représentations consulaires européennes à Alger dénoncent une atteinte flagrante à la souveraineté nationale préjudiciable à toute forme de business», écrit-il dans une note d'information parvenue à notre rédaction. Pour la Cipa, «les relations d'affaires entre la communauté européenne et la partie algérienne sont sérieusement remises en cause par les attitudes et les comportements affichés par les représentations consulaires en Algérie». L'Algérie, qui a eu gain de cause quant à la nécessité de revoir certaines clauses de l'accord d'association avec son partenaire européen, devra préparer des propositions concrètes. Aucune date n'a été fixée, mais les deux parties ont convenu de prendre des contacts dès que possible. L'Algérie devra convaincre l'Union européenne du bien-fondé de ses requêtes.