Pressés d'apporter des éclaircissements sur la «couverture» des actes de torture en Irak - Nouri El Maliki est persuadé qu'il s'agit d'une campagne de dénigrement diligentée contre sa personne -, les Etats-Unis doivent s'expliquer un autre dilemme. Citées par la radio Tsahal, des sources gouvernementales américaines estiment que Yitzhak Molcho, le chef des négociateurs israéliens, n'essaie pas vraiment d'atteindre la paix avec les Palestiniens ! Que fait-il donc alors que Benjamin Netanyahou n'arrête pas de crier sur le toit de son cabinet que les pourparlers directs doivent traiter des petites comme des grandes questions qui fâchent ? Yitzhak Molcho maîtrise-t-il lui aussi l'art de gagner du temps, l'Etat hébreu ayant toujours été plus obsédé par ce qui se passe sur l'échiquier régional que par les indigestes déjeuners de paix avec les caciques de la présidence palestinienne ? Ceux-là n'avaient qu'à bien tendre l'oreille pour écouter Avigdor Lieberman dire tout haut ce que la large majorité de la classe israélienne pense tout bas : il faudrait des décennies pour qu'Israéliens et Palestiniens accordent leurs luths à un fil. Si «Bibi» a fait semblant de courir derrière son partenaire de paix (Mahmoud Abbas) ce n'est sûrement pas pour lui offrir Al Qods-Est à Noël. Hanté par la menace de restrictions budgétaires US, Benjamin Netanyahou se devait de répondre à l'appel du jeune frère d'Amérique qui avait plaidé, à la tribune de l'université du Caire, en faveur d'une rapide reprise du processus. Calculs faits, cette reprise ne pouvait tomber mieux, à quelques mois des élections US de mi-mandat. Après ce «chacun trouve son compte», le déluge ? Voici que les colons israéliens annoncent à bétonnières battantes le début de la construction de 600 logements en Cisjordanie. Quant aux démocrates US, ils sont un peu plus optimistes depuis que le parti a entrepris de se spécialiser dans le travail de terrain. Si les négociations directes venaient à reprendre, Yitzhak Molcho n'aurait plus qu'à croiser ses jambes à l'américaine, semelle en l'air. Il n'aurait même plus à fournir un demi-effort, la coalition gouvernementale de Netanyahou est plus ou moins à l'abri d'un funeste sinistre. Stabilisée grâce au mortier, arme fatale des colons, elle peut même se permettre des mises en garde qui tiennent plus de l'effronterie. Gare à ce que les Palestiniens prennent unilatéralement une initiative visant à faire reconnaître un futur Etat palestinien par le Conseil de sécurité des Nations unies. Que doivent-ils faire alors, le parrain de la paix supputant, en son âme et conscience, que le chef des négociateurs ne se donne même pas la peine d'être sérieux à chacun de ses retours à la table des négociations ? D'abord, céder sur ce qui est la priorité des priorités chez les actuels gouvernants de Tel-Aviv : reconnaître le caractère juif de l'Etat d'Israël. Sans cela, l'Etat hébreu continuera de faire croire que la faute du blocage, voire de l'échec, ne lui incombe pas. Ce serait l'œuvre de l'axe Téhéran-Damas que l'alliance israélo-occidentale a cru isoler par le seul fait de relancer le processus de paix palestino-israélien. Maigre butin quand Yitzhak Molcho passe son temps à se rouler les pouces. C'est pourquoi Avigdor Lieberman, le malin chef de la diplomatie israélienne, vient de commander un rapport sur la doctrine politique et sécuritaire que l'Etat hébreu devra adopter quand l'Iran comptera par les pays nucléarisés. D'ici à ce que la communauté internationale montre toute son incapacité à empêcher le pouvoir iranien de se doter de l'arme atomique, les Israéliens vont-ils s'ennuyer à mourir ? Que nul n'y compte. Tout en continuant de donner cette impression de vouloir atteindre la paix, ils ne se priveront pas de crayonner des plans de guerre. Contre le Hamas palestinien qui, selon Tzipi Livni, n'aurait pas dû être autorisé à se présenter aux législatives palestiniennes de 2006 ? Ou contre le Hezbollah libanais qui attend la publication du rapport de l'Onu sur l'assassinat d'El Hariri ? La paix à moitié est conçue pour être une fabrique à cadavres.