Pour la deuxième journée consécutive, des tirs nourris d'artillerie et d'obus ont été entendus aux alentours d'Adjedabia, contre laquelle les forces de Mouammar Kadhafi ont lancé leur offensive la plus soutenue depuis le début des bombardements internationaux le mois dernier. Les combats ont fait au moins 13 morts parmi les opposants depuis samedi, a indiqué Mohammed Idris, directeur de l'hôpital d'Adjedabia dont la chute ouvrirait aux forces gouvernementales la route de Benghazi, fief de l'insurrection et de Tobrouk, sur la frontière égyptienne. Les forces régulières ont progressé vers le centre d'Adjedabia, hier, contraignant les opposants à se réfugier dans des ruelles pour échapper aux tirs d'artillerie lourde et de roquettes. Au moins quatre rebelles ont été tués, ont indiqué les insurgés. «J'en ai vu quatre ce matin. Leurs gorges étaient tranchées et ils ont tous été touchés à la poitrine et abandonnés sur la route. Leur voiture était criblée de balles», a indiqué un opposant, Mohammed Saah, à un point de contrôle de la porte Est d'Adjedabia. Un autre opposant, Hassan Bosayna, a indiqué que huit combattants de Kadhafi et quatre rebelles avaient été tués samedi, dont un insurgé tué d'une balle dans la tête par un tireur embusqué. Toujours sur le front Est, l'Otan a annoncé avoir détruit onze chars des troupes du colonel Kadhafi qui s'approchaient de cette ville considérée comme «un verrou» stratégique. Sur le front Ouest, les bombardements des forces gouvernementales sur Misrata se sont poursuivis hier, faisant un mort et deux blessés, selon un médecin de l'hôpital local ayant requis l'anonymat. La ville, seule localité tenue par les opposants dans l'ouest du pays, est pilonnée depuis plus d'un mois mais continue de résister. Là aussi, l'Alliance atlantique a également mené plusieurs raids à Misrata pour venir en aide aux opposants assiégés par les soldats de Kadhafi, détruisant quatorze de leurs chars. Sur le plan politique, le gouvernement libyen a tenté de montrer un visage réformiste en annonçant une nouvelle Constitution présentée comme la «version libyenne» de la démocratie. Lors d'une présentation du projet à la presse étrangère, les dirigeants libyens n'ont pas précisé le rôle que Mouammar Kadhafi allait être appelé à jouer à l'avenir, ni la nature du système politique qu'ils envisagent de mettre en place. Le Livre vert, recueil des pensées de Kadhafi publié dans les années 1970, fait actuellement office de Constitution en Libye, dont le nom officiel est «Grande Jamahiriya arabe libyenne socialiste et populaire». Son système politique opaque – Jamahiriya signifie Etat des masses – est dénoncé par les opposants qui tentent de renverser le régime du guide de la révolution au pouvoir depuis 1969. «Nous espérons que la Constitution sera adoptée très prochainement», a déclaré Khaled Kaim, vice-ministre des Affaires étrangères lors d'une conférence de presse destinée à la presse étrangère. «Il y a des gens que les réformes politiques n'intéressent pas. Ils veulent le pouvoir et la richesse et pas la Constitution.» Le président du Congrès général du peuple (Parlement), Mohamed Zwai, a fait savoir que le projet était prêt et serait examiné prochainement. Interrogé sur la nature du nouveau régime, Ibrahim Moukzham, membre du panel, a répondu qu'il s'agirait d'une «version libyenne». «Les Constitutions ne sont pas faites pour se focaliser autour d'individus. Elles doivent servir la nation et chaque citoyen doit trouver sa place dans la Constitution», a-t-il dit. «Mouammar Kadhafi, en tant que citoyen libyen, peut trouver sa place dans la Constitution. La grande majorité du peuple souhaite le voir rester. Il est un symbole.»