Intervenant au cours d'une table ronde au forum d'El Moudjahid, sous le thème «La stabilité politique et ses conséquences sur les anticipations des agents économiques», l'expert et consultant international, Abdelmalek Serraï, a pointé du doigt hier, la classe politique et l'ensemble des syndicats, responsables selon lui, de par «leur éloignement des préoccupations des citoyens», des récents mouvements de contestation. Affirmant que l'Algérie vit dans une «certaine stabilité», Abdelmalek Serrai accuse : «Les syndicats sont en train de s'affaiblir et les partis politiques, vidés de leur essence populaire, s'éloignent dangereusement des citoyens», d'où selon lui la multiplication des revendications sociales. «Aucun parti n'a réussi à calmer le jeu. C'est très mauvais signe», affirme-t-il. L'Algérie est d'après lui un vaste chantier à construire. «S'il n' y a pas une forte mobilisation politique», prévient Serrai, «l'économique va aussi tomber dans la bêtise», soutient-il, regrettant que l'Algérie n'ait pas de réelle stratégie économique de développement, citant «les mesures étatiques pour calmer la colère». Abordant le volet des investissements étrangers (IDE), l'intervenant a critiqué le recours abusif à la loi de finances complémentaire (LFC) «qui casse l'image de marque de l'Algérie», et évoquera des déséquilibres régionaux (400 communes pauvres) qui font que les disparités sociales finissent par aboutir à des contestations. Pour le député Ramdane Taâzibt du Parti des travailleurs, qui rappelle que l'Algérie vient de sortir de deux décennies d'incertitudes caractérisées par la dégradation du niveau économique et «un génocide industriel», le pays connaît actuellement une explosion sociale sans précédent. «L'origine de l'instabilité est due au fait qu'on nous a imposé des politiques avec lesquelles il faut rompre», soutient-il, citant, en développant les idées du PT, les politiques économiques imposées par la banque mondiale et le FMI. Pour Taâzibt qui cite la Tunisie, considérée comme modèle de stabilité, «biaisée tout compte fait de par le manque de liberté et les bas salaires qui ont abouti à la révolution qu'on connaît», l'Algérie «devrait passer à une étape de prise en charge des préoccupations de la nation et prendre exemple sur ce qui se passe chez nos voisins». Il dira à cet effet que la stabilité ne doit pas se faire au détriment des droits et des libertés, révélant que «le gouvernement, affolé par la contestation, a consenti 5,5 milliards de dollars dans les mesures d'aides à l'emploi». Abondant dans le même sens, Zaïm Bensaci, président du conseil national de la PME, a estimé plus que nécessaire «d'en finir avec les politiques conjoncturelles». Préconisant le dialogue entre toutes les parties concernées, l'invité d'El Moudjahid qui souligne qu'il faut développer d'autres secteurs à l'exportation, estimera qu'il faut une action immédiate pour relancer le développement de la PME, créatrice d'emplois. «Il faut créer des conditions idoines et en finir avec le monstre qu'est la bureaucratie», a-t-il suggéré, expliquant qu'il faut seulement 48h pour créer une entreprise au Maroc, alors qu'en Algérie, la procédure prend plus d'une année. Affirmant qu'il y a plusieurs possibilités de création de PME dans diverses filières, l'orateur qui pointe du doigt l'informel, s'est dit favorable au lancement de ces entreprises dans le domaine de la sous-traitance, révélant qu'au niveau du conseil qu'il préside, un dossier dans ce sens est en préparation. Nacéra Haddad, de l'association algérienne des femmes chef d'entreprise, a pour sa part développé l'idée de consacrer l'initiative privée et de cesser d'opposer le secteur privé au secteur public. L'ensemble des intervenants ont soutenu pour la plupart l'idée d'une large débat incluant la société civile, seule à même d'assurer une stabilité aussi bien sur le plan social et politique que sur le plan économique.