Quelques questions, quelques réponses et quelques commentaires de rue, de cafés, de murs, de bureau et de chaumière algérois. A tout seigneur, même en cavale, tout honneur, même s'il n'en a pas. Où est passé Kadhafi ? A Syrte, bien sûr ont répondu les plus perspicaces. Il ne va pas inventer une cachette alors qu'il en a une sous la main. On n'oublie pas Saddam au pied levé. Les dictateurs arabes vous disent toute leur vie durant que le pays est un et indivisible, qu'il n'y a pas un centimètre carré du territoire sacré qui n'aura pas bénéficié de leur grandiose œuvre de développement, qu'il n'y a pas la moindre contrée minuscule dont le bonheur serait oublié. Zenga, Zenga. Puis au moment de chuter, ils nous révèlent qu'ils ont un «fief», un terme qu'ils utilisent généralement pour circonscrire les «bandes criminelles», c'est-à-dire ceux qui les invitent gentiment à déguerpir, avant de passer à d'autres modes opératoires. Saddam avait son trou de Tikrt. Kadhafi le bunker de Syrte. Logique, non ? Pas du tout, ont répondu les plus optimistes. On ne change pas une équipe qui gagne, mais on change une cachette qui n'a pas fait ses preuves. Est-ce vraiment la fin de Kadhafi ? Evidemment, ont répondu les fatalistes résignés, c'était la fin depuis que l'Otan a interdit l'espace aérien à l'aviation libyenne. Cela peut venir, mais ce n'est pas encore fait, ont dit les modérés. Cela fait des mois qu'on nous annonce la prise de Tripoli, la fuite de Mouammar et la capture de ses enfants. Puis on découvre que Tripoli est toujours Tripoli de 1969, que Mouammar sait jouer aux échecs après avoir tout réussi et pour couronner le tout, Seif El Islam peut marcher à pied jusqu'à l'hôtel où résident les journalistes qui sonnaient l'hallali. Et l'Algérie dans tout ça ? Rien à voir, bien sûr, ont encore dit les plus perspicaces. On a eu le lait et l'huile au prix «normal», on peut squatter tous les trottoirs pour vendre et acheter, on va avoir des logements et les réformes sont en cours. Que demande le peuple ? Non, ont rétorqué les pessimistes. Rien à voir parce que l'Otan ne nous «compte pas», parce que nous produisons à peine la moitié du pétrole que produit la Libye. Ni l'un, ni l'autre, ont tranché les «peptimistes», heureux d'étaler leur culture. Explication : peptimistes est un terme de synthèse d'optimiste et pessimiste que l'écrivain palestien Emile Habibé a inventé et utilisé comme titre de l'un de ses romans. Les peptimistes donc pensent que l'Algérie est une démocratie, qu'il y a des partis politiques, un Parlement, de l'huile et du lait, en attendant les logements. Une dernière pour la route : le drapeau des insurgés libyens flotte déjà à Alger. Est-ce que le drapeau algérien flottera bientôt à Tripoli ? Personne n'y a répondu. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir