Wingz est un dessinateur de presse basé dans le sud de la France. Ingénieur de formation, il quitte le monde de l'entreprise pour se consacrer pleinement à sa passion, le dessin. F in observateur, il caricature le monde qui l'entoure avec un humour acéré et décalé. Ses dessins paraissent dans la presse et sur le web (Métro, 60 millions de consommateurs, Zelium, La mèche, Tribune du Sud, Boursereflex, Infos-matin, Gard-Eco…) Il travaille également avec des entreprises et des collectivités pour illustrer leurs communications grâce à l'humour. Son travail a été récompensé à plusieurs reprises lors de festivals (Prix du public Le Mans 2008, Cavaillon 2008, Tourcoing 2010…). En 2010, il reçoit également le trophée Presse-citron du meilleur dessin de presse de l'année. Le Temps d'Algérie : A propos des caricatures sur le Prophète Mohamed (QSSSL) publiées par Charlie Hebdo, les musulmans parlent d'«attaque anti-Islam» et Charlie Hebdo parle de «liberté d'expression». Selon vous, où se termine la liberté d'expression et où commence le caractère sacré des religions ? Wingz : Pourquoi opposer religion et liberté d'expression ? Les deux peuvent coexister. La religion doit par contre accepter l'ironie. La religion chrétienne se fait quotidiennement caricaturer en France, sans que cela ne soulève des vagues de violence. J'entends fréquemment le mot attaque dans cette affaire. C'est un mot très dur pour qualifier ce que nous appelons simplement dérision. Il faut vraiment de l'apaisement dans cette histoire. Ne pensez-vous pas que ces caricatures portent atteinte à la personne du Prophète (QSSSL) ? En tout cas, elles ne mettent pas le Prophète en valeur, de toute évidence. Mais les musulmans doivent-ils pour autant considérer cela comme une attaque ? Souvenons-nous du sens du mot caricature : une imitation grotesque, une exagération des traits. La caricature n'est pas une arme, l'objectif n'est pas d'offenser mais de faire sourire tout en dénonçant une situation. Je peux comprendre que tout le monde n'adhère pas à ces caricatures, mais je ne comprends pas le déchaînement de violence auquel nous assistons. Les musulmans ne doivent pas tomber dans ce piège ! Les intégristes islamistes soufflent sur les braises en utilisant ces dessins comme un instrument de division et de haine, alors que l'Islam est une religion qui porte des valeurs de paix et de tolérance. Ne croyez-vous pas que les religions doivent être à l'abri de toutes les attaques, médiatiques notamment ? Non, surtout pas ! Dans un pays laïc, la religion ne doit pas imposer ses lois. La liberté d'expression est le ciment de notre démocratie. Si la presse commence à se censurer sur un sujet, que ce soit la politique ou la religion, c'est le début d'une lente glissade vers la résignation et la dictature. En faisant une exception avec la religion, c'est tout l'édifice démocratique qui s'ébranlerait. La seule limite à notre liberté d'expression est celle fixée par la loi : la diffamation ou la calomnie, quel que soit le thème. Ne croyez-vous pas que ces caricatures ne devaient pas être publiées, en particulier dans cette conjoncture caractérisée par le tollé soulevé par le film anti-Islam l'Innocence of Muslims ? Il me paraît important de repositionner le débat sur ce qu'est le métier de dessinateur de presse. Nous sommes des commentateurs de l'actualité, et notre outil est le dessin satirique. Or depuis une semaine, le film l'Innocence des musulmans est au cœur de l'actualité. Il est impensable pour nous de ne pas traiter cette information. Les dessinateurs de Charlie Hebdo ont donc juste fait leur travail avec l'impertinence et la dérision qui caractérisent ce journal. Il n'y a pas de volonté d'attaquer ou de stigmatiser les musulmans. Il faut que le calme et la sérénité reviennent. Charlie Hebdo en rupture de stock. Croyez-vous que les caricatures ont été publiées pour des considérations commerciales ? Non, Charlie Hebdo n'a pas cherché à faire un «coup médiatique», c'est évident. S'il avait voulu faire de l'argent, il ne serait justement pas tombé en rupture de stock dès 9 heures du matin.