C'est un véritable drame qui s'est produit durant la nuit de vendredi à samedi au niveau de l'oued Sébaou dans sa portion qui longe la commune de Tadmaït (20 km à l'ouest de Tizi Ouzou). L'oued «anthropophage» a englouti un homme ainsi que son engin. La victime, r Haddadi Samir, âgé de 28 ans, originaire du village El Qaria, dans la localité de Laziv n Zamoum, Naciria, sur le territoire de la wilaya de Boumerdès, est entré dans l'oued vers 4h du matin et s'adonnait à l'extraction illégale de sable et d'agrégats à l'aide d'une pelle baladeuse quand cette dernière s'est enfoncée dans une sorte de gouffre rempli d'eau remontant de la nappe mélangée à des eaux usées et l'a entraîné avec elle. Une équipe de plongeurs de l'unité marine de Tigzirt a été dépêchée aux premières heures de la matinée pour essayer de repêcher le corps de la victime, a indiqué une source de la Protection civile. L'engin a été remonté à l'aide d'une grue en fin de matinée, mais le corps du jeune Samir n'a pas encore été retrouvé en milieu de journée. Ce n'est pas la première victime au niveau du Sébaou, où l'extraction de sable se poursuit à un rythme soutenu. Il y a quelques années, un jeune de la commune d'Aït Aïssa Mimoun a été aussi avalé par l'oued Sébaou à proximité d'une sablière située au lieudit Voudekou. Pris d'une colère que rien ne pouvait contenir, les habitants ont saccagé et incendié cette sablière accusant le propriétaire d'avoir creusé des cratères qui dépassaient les quinze mètres à certains endroits comme celui où s'est noyée la victime.
Le Sébaou, «source de revenus mais de dangers aussi» Le Sébaou a de tout temps constitué une convoitise. Prenant sa course des hautes montagnes de la Kabylie et du majestueux Djurdujura, le Sébaou est le principal cours d'eau de la wilaya de Tizi Ouzou. Il dévale les abruptes hauteurs et débouche dans la plaine des Aït Aïssi, puis s'écoule vers le territoire des Amraouas. Récoltant au passage les multiples ruissellements des collines qu'il longe, il contourne Tizi Ouzou, s'étale dans l'immense plaine comprise entre Sidi Naâmane au nord et Draa Ben Khedda et Tadmait au sud, va jusqu'à Dellys et finit dans la mer Méditerranée. De tout temps, cet oued a constitué une importante source de revenus. L'administration, mise devant le fait accompli, avait plusieurs fois annoncé la prise de décisions à même de sauver ce qui reste du site de l'oued Sébaou, ce véritable écosystème, de plus en plus menacé par une extraction effrénée et incontrôlée de sable et autres agrégats. Depuis plusieurs décennies, c'est l'oued Sébaou qui pourvoit la Kabylie et d'autres régions du pays en sable destiné à la construction. Il a toujours été soumis à une grande pression à telle enseigne qu'une véritable menace pèse sur le site. Toutes les mesures, notamment la réglementation de l'extraction, l'obligation faite aux extracteurs de se soumettre au cahier des charges qui souvent contient des mesures de protection, etc. n'ont rien apporté. Le chômage aidant, un nombre important de jeunes chômeurs va trouver un «débouché» à son absence de ressources et d'horizon. Les berges de l'oued sont devenues le champ d'activité d'équipes de «panneurs de sable» et de chargeurs de camions, de nuit comme de jour. Une noria d'engins et de véhicules en tout genre et tonnage continue le pillage systématique des couches de sable qui se fait de plus en plus rare ; la vallée agonise depuis des années. Ni les contrôles inopinés des pouvoirs publics, qui sporadiquement sévissent (amendes, fourrière et même prison) ni l'insécurité ambiante, n'arrivent à décourager les particuliers comme «les barons du sable» dans leur folie destructrice. Le résultat est là, l'oued est devenu un monstre. Il «avale» hommes et engins.