«Les activités de change à Tizi Ouzou existent depuis fort longtemps. Le marché est vraiment florissant. Le nombre de personnes qui excellent dans ce domaine a connu un boom, ces dernières années, et les affaires marchent toujours à merveille», nous dira un «boursier» de la ville. La rue de la Paix est l'endroit choisi par ces «commerçants» pour pratiquer leur activité. C'est aux alentours du siège de la Badr que les «bousiers», environ une dizaine, élisent domicile. Les «échangeurs» de monnaie ne quittent jamais cet endroit, qu'il pleuve ou qu'il neige. Ils sont reconnaissables aux liasses étalées en toute quiétude et ils n'hésitent pas parfois à crier pour annoncer le coût du change. Mais la plupart des boursiers de Tizi Ouzou activent presque en catimini. Les transactions les plus importantes s'opèrent à l'intérieur des commerces, mais toujours dans la même rue, l'un des plus anciens quartiers de la capitale du Djurdjura. Des taxiphones, des magasins de vêtements et autres ne sont à vrai dire que des «banques clandestines» qui réalisent de gros chiffres d'affaires dans le marché parallèle de la devise. L'été est la période des bonnes affaires, affirme-t-on. L'afflux des émigrés est attendu avec impatience à Tizi Ouzou, une région qui possède le plus grand nombre d'émigrés en Algérie, voire en Afrique du Nord. C'est durant la saison estivale que de grosses sommes en devises sont achetées et mises de côté pour les «revendre» à haut prix le restant de l'année. En cette matinée ensoleillée, l'euro, la monnaie la plus demandée, a connu, contrairement à l'habitude en cette période, une légère hausse. 140,85 dinars à l'achat et 140,92 dinars à la vente. Le coût du dollar canadien connaît, quant à lui, une stabilité depuis plusieurs semaines. Il est estimé à 110,70 dinars à la vente et 111,10 à l'achat. Cette monnaie est également fortement demandée ces dernières années à cause de la croissance du nombre d'émigrés vers ce pays. Pour le dollar américain, la monnaie la moins demandée à Tizi Ouzou, cette semaine, 1 dollar est estimé à 111, 20 à l'achat et 110,80 à la vente. Si la plupart des clients sont des retraités qui ont fait carrière en France, une autre catégorie de clients n'est pas à négliger. Il s'agit des Algériens qui partent à l'étranger. Les 140 euros dont le voyageur bénéficie au niveau des banques sont largement insuffisants. Le marché parallèle s'avère inévitable pour se procurer de la devise. «On ouvre droit à un seul change de devises de 140 euros par année. Vraiment c'est aberrant ! Heureusement qu'on tolère le marché parallèle, sinon aucun Algérien ne pourrait franchir les frontières», nous dira un habitant de la ville des Genêts qui a l'habitude de rendre visite à ses deux enfants établis au Canada. L'autre problème est le refus des banques d'accorder des allocations touristiques. A Tizi Ouzou, seule la Banque extérieure d'Algérie (BEA) assure cette prestation et devant le flux des demandeurs, elle est confrontée parfois au manque de devises. Les autres banques refusent catégoriquement cette prestation même aux plus anciens de leurs clients. Toutefois, la difficulté pour les citoyens qui désirent acquérir des devises ne s'arrête pas à la cherté de ces dernières. Ouvrir un compte bancaire, y compris pour les fonctionnaires, s'avère un véritable parcours du combattant à Tizi Ouzou. Les demandeurs sont refoulés par la plupart des responsables de banque.