A l´occasion de la fête du Trône, le roi Mohammed VI avait gracié 48 prisonniers espagnols. Parmi eux le pédophile Daniel Galván Viña condamné à 30 ans de prison pour abus sexuel sur environ une douzaine d'enfants marocains âgés de 3 à 15 ans. Pourtant, il n´avait purgé que deux ans de sa lourde peine. Il n'en revenait pas lui-même lorsque le directeur de la prison de Kenitra lui avait annoncé la bonne, la très bonne nouvelle. Le jour même, samedi, il était à Ceuta, en territoire espagnol, avant de gagner, dimanche, la ville de Murcie où il avait loué une chambre dans un petit hôtel. C´est là qu´il apprendra que le souverain alaouite était revenu sur son acte de «clémence», disant n´avoir pas été informé des crimes commis par cet individu. Premier bouc émissaire, le directeur de la prison qui a été relevé de ses fonctions sur ordre du roi. Juan Carlos n'a pas intercédé auprès du souverain alaouite Pourtant, les responsabilités de cette inédite «bévue» se trouvent dans l'entourage immédiat du monarque. Le palais royal marocain avait soutenu que c'est sur intervention du roi Juan Carlos auprès du roi Mohammed VI que les 48 prisonniers espagnols avaient été graciés par le souverain alaouite. Faux, a réagi hier le porte-parole du roi Juan Carlos, en des termes diplomatiques bien sûr très mesurés mais précis. Durant la visite officielle qu´il a effectuée au Maroc du 15 au 18 juillet, le roi Juan Carlos s´était seulement informé des conditions de détention des prisonniers, en particulier de l´un d'entre eux, dialysé et souffrant d'une insuffisance cardiaque, en vue de son possible transfert en Espagne. En fait, ce n´est pas le roi mais le gouvernement espagnol qui avait demandé la libération de 18 de ces 48 prisonniers, a révélé la presse espagnole. L´initiative avait été engagée par le ministère espagnol des Affaires étrangères à travers l'ambassade espagnole à Rabat. A la demande du principal conseiller du roi Mohammed VI, l'ambassadeur d´Espagne à Rabat, Alberto Navarro, avait remis alors au palais royal deux listes de prisonniers. La première comportait les noms des 18 prisonniers pour lesquels a été demandée la libération pure et simple, et la seconde, celle des 30 autres, dont Daniel Galván Viña, pour lesquels il avait été seulement demandé la possibilité qu'ils puissent accomplir le reste de leur peine dans une prison espagnole. Deux listes et non pas une seule La surprise du diplomate espagnol fut grande lorsqu´il reçut du cabinet royal une seule liste de 48 prisonniers tous graciés par le roi Mohammed VI. Malentendu ? Acte de clémence extrême ? Bévue du roi ? Rabat a tenté de rattraper le fugitif en lançant un mandat d´arrêt international contre lui. Le pédophile a été finalement interpellé lundi dans son hôtel de Murcie où l'attendaient une douzaine policiers. L´Audience nationale, la plus importante juridiction pénale espagnole, décidera de son cas, mais selon des sources judiciaires espagnoles, il est peu probable qu´il soit extradé vers le Maroc. «Ça va poser de sérieux problèmes juridiques», estime un avocat au moment où le procureur demandait hier au juge son placement sous mandat de dépôt en raison du risque de le voir quitter l'Espagne, la peine qui lui reste à accomplir étant de 28 ans. Hier, Madrid et Rabat négociaient toujours la possibilité qu'il puisse accomplir le reste de sa peine en Espagne La presse a présenté Viña comme un agent du CNI (services de renseignement espagnols) qui aurait intégré durant l´invasion d'Irak une équipe d'agents secrets opérationnels chargée de la mission de destitution du président Saddam Hussein. Le CNI a démenti catégoriquement que Viña soit l'un de ses agents. Il n´est pas exclu, selon cette institution, que cet individu dont l´identité réelle est en cours de vérification, soit une recrue d'un autre service de renseignement étranger. La CIA sûrement !